« Qui protège Houria Bouteldja » ? Nous ! Les commentaires antisémites qui ont

« Qui protège Houria Bouteldja » ? Nous ! Les commentaires antisémites qui ont visé la dauphine de l'élection Miss France 2020, April Benayoum, ont été unanimement, et évidemment à raison, déplorés et condamnés. Pourtant, l'une de ces réactions a valu à son auteure de se retrouver la cible d'accusation d'antisémitisme, menant jusqu'au retrait du texte incriminé de Médiapart, site que nous avons l'habitude de compter parmi nos alliés. Ces attaques viennent principalement des personnes et groupes que nous avons l'habitude de retrouver en première ligne chaque fois qu'il est question de défendre l'Etat face aux avancées de l'antiracisme politique. Ont-ils raison ? Houria Bouteldja, antisémite ? A cette dernière question, nous répondons sans hésitation : non. Que les idées qu'elle défend plaisent ou non, cela relève du débat démocratique. Mais l'antisémitisme, lui, est un délit, un crime intellectuel qui relève du pénal. Ceux qui, la main sur le cœur, accusent Houria Bouteldja de tenir publiquement des propos antisémites alors que précisément elle pointait dans son article les dérives antisémites à l’encontre de Miss Provence ainsi que l’hypocrisie des puissances occidentales qui s’abstiennent de voter une résolution de l’ONU proposant de combattre le néonazisme, sont de vulgaires tartuffes. Force est de constater que tout ce bruit n'aura été qu'une campagne profitant à un certain courant d'idée (qui essaime du Printemps républicain à Valeurs actuelles en passant par l'extrême droite) et desservant la lutte politique contre l'antisémitisme. Houria Bouteldja s'est déjà expliquée, notamment sur la phrase qui aura servi d'étincelle : « on ne peut pas être israélien innocemment1. » Résumons la lecture qui en a été faite par nos inquisiteurs : tout israélien est par essence coupable des crimes de la colonisation israélienne ; donc tout juif l'est aussi ; donc il est permis de les haïr en tant qu'ils sont israéliens, donc en tant qu'ils sont juifs. Si rien ne va dans cette lecture, c'est qu'elle fait mine d'ignorer la longue tradition littéraire et politique dans laquelle s'inscrit Houria Bouteldja, reprenant quelques fils qu'ont suivis des penseurs comme Aimé Césaire, Albert Memmi ou encore Jean Paul Sartre. Réfléchissant à la manière dont les structures de domination (notamment coloniales) agissaient sur les rapports sociaux entre groupes et entre individus, sur les représentations collectives qui en découlaient, ils en ont tiré la conséquence suivante : nul n'échappe à ces rapports sociaux, aux profits ou aux désavantages qu'ils confèrent. Mais dans la mesure où existe la liberté de se positionner, nul ne peut s'en déresponsabiliser. Sauf à considérer les Israéliens comme des cas à part, ou bien à nier la réalité de la situation coloniale en Palestine, il n'y a pas de raison de s'émouvoir lorsque cette analyse y est appliquée. Le bat blesse plus douloureusement pour nous, antiracistes, 1 https://blogs.mediapart.fr/dominique-natanson/blog/291220/clavreul-cesaire- et-moi-de-l-innocence-des-uns-et-de-la-conscience-des-autres lorsque les accusations de nos détracteurs sont soutenus par l'assimilation entre judaïsme et sionisme, entre juifs et sionistes. Là ou il s'agirait plutôt de déconstruire et d'expliciter cette confusion dangereuse, ce que Houria Bouteldja a le courage de faire. Mais n'est-ce pas là l'air du temps soufflé par une certaine doxa dominante depuis les plus hauts sommets de l'Etat, comme l'a montré la détermination macronienne de faire entrer l'antisionisme dans la définition de l'antisémitisme ? Ainsi, à la question complotiste de Marianne : Qui protège Houria Bouteldja ? Nous répondons : pas les médias mainstream, pas les institutions, pas les structures de pouvoir, pas les intellectuels de salon, pas des pouvoirs occultes et encore moins des forces honteuses d’elles-mêmes. Ceux qui la soutiennent, ce sont Nous ! Des militants antiracistes et anti-impérialistes qui savent parfaitement reconnaître l'antisémitisme même sous ses formes les plus sophistiquées comme nous savons reconnaître une authentique militante décoloniale. Finalement, la polémique qui a suivi la publication du papier de Houria Bouteldja en dit bien plus sur le contexte de sa réception que sur son auteure. Tant il est vrai que cette dernière n'a jamais cédé ni à l'essentialisation, ni au judéocentrisme. Au contraire, elle mobilise les idées indissociables de liberté et de responsabilité, pour elle-même comme pour les autres. Antisémite, Houria Bouteldja ? Sûrement pas ! En revanche, nos détracteurs n'en finissent plus de se radicaliser dans la défense de l'Etat, de son discours islamophobe et négrophobe, de ses structures inégalitaires. Nous déplorons que le site Médiapart ait cédé devant ces funestes sirènes. Nous croyons cependant que ce qu'il faut bien nommer par son nom, cette censure, n'est qu'une erreur due à un débat public sciemment saboté. Partant, nous demandons que réparation soit faite et que le texte soit remis en ligne. uploads/Politique/ qui-protege-houria-bouteldja-nous-final.pdf

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