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Sexpolitiques Queer zones 2 SEXPOLITIQUE_SEXPOLITIQUE 04/03/13 14:38 Page1 Marie-Hélène Bourcier Sexpolitiques Queer zones 2 SEXPOLITIQUE_SEXPOLITIQUE 04/03/13 14:38 Page3 © La Fabrique éditions, 2005 Conception graphique : Jérôme Saint-Loubert Bié Révision du manuscrit: Stéphane Passadéos Réalisation: Élisabeth Welter Impression: Floch, Mayenne ISBN: 2-913372-44-9 La Fabrique éditions 64, rue Rébeval 75019 Paris lafabrique@lafabrique.fr Diffusion: Les Belles Lettres Pour Claire Pour Marco À Aileen Wuornos et K.B. RIP RWWB: Restless We Will Be Merci aux deux Eric et à Stéphane SEXPOLITIQUE_SEXPOLITIQUE 04/03/13 14:38 Page4 Sommaire Dirty talk Cultural Studies et politiques de la discipline: talk dirty to me! — 9 Nique la Rep! Nique la Rep! Petit portrait de la France post-coloniale: Y a pas bon Banania République — 35 Sex and the city — 83 Dominator contre Madonna (nouvelles questions post-femme) La «fin de la domination (masculine)»: genres, performances et post-féminisme queer — 115 Material girl en guerre contre Madonna et le queer: le «woman-identified» lesbianisme radical en France de 2002 à 1980 — 131 Il y a une vie après l’éjac faciale: de l’hystérique à la pute post-moderne Sexorcisme: Baise-moi, Charcot, l’Exorciste et les porn stars — 157 Pipe d’auteur: la «nouvelle vague pornographique française» et ses intellectuels (avec Jean-Pierre Léaud et Ovidie, Catherine Millet et son mari et toute la presse) — 187 Nique ton genre! Le silence des butchs — 209 Freaks, le retour — 231 ZAP la psy ZAP la psy: on a retrouvé la bite à Lacan! — 251 Notes — 273 SEXPOLITIQUE_SEXPOLITIQUE 04/03/13 14:38 Page5 SEXPOLITIQUE_SEXPOLITIQUE 04/03/13 14:38 Page6 Dirty talk SEXPOLITIQUE_SEXPOLITIQUE 04/03/13 14:38 Page7 SEXPOLITIQUE_SEXPOLITIQUE 04/03/13 14:38 Page8 Cultural Studies et politiques de la discipline: talk dirty to me! Que se passe-t-il lorsqu’une démarche universi- taire et théorique essaye de s’engager dans des pédagogies qui incluent l’engagement actif des individus et des groupes et essaye de faire la dif- férence dans le lieu institutionnel où elle est située? […] Cela requiert d’assumer que la culture fonc- tionnera toujours à travers ses textualités et que la textualité n’est jamais assez. Mais assez de quoi, pour quoi ? C’est là une question à laquelle il est extrêmement difficile de répondre parce que, phi- losophiquement, il s’est toujours révélé impossible dans le champ théorique des cultural studies – que celui-ci soit conçu en termes de textes et de con- textes, d’intertextualité, de formations historiques dans lesquelles se logent les pratiques culturelles – d’arriver à quelque chose qui corresponde à une formulation adéquate de la culture et de ses effets. Néanmoins, je veux insister sur le fait que si les cultural studies n’apprennent pas à vivre avec cette tension, une tension que toutes les pratiques tex- tuelles se doivent d’assumer, une tension que Said décrit comme étant l’étude du texte dans ses liens avec « les institutions, les agents, les classes, les universités, les entreprises, les groupes, les par- tis et les professions, les nations, les races et les genres dans leur définition idéologique», alors les cultural studies auront renoncé à leur vocation à 9 SEXPOLITIQUE_SEXPOLITIQUE 04/03/13 14:38 Page9 être au monde. […] Si vous perdez de vue cette ten- sion, vous pouvez faire un bon travail intellectuel mais vous perdrez la pratique intellectuelle comme politique. Je vous dis cela non pas pour vous dire ce que les cultural studies devraient être […] mais parce que je pense que c’est ce qui définit le pro- jet des cultural studies. Dans le contexte anglais comme dans le contexte américain, les cultural studies ont attiré l’attention non pas à cause d’un développement théorique interne mirobolant, mais parce qu’elles maintiennent les questions théo- riques et politiques dans une tension permanente et sans résolution.1 L’un des mérites des cultural studies en France est de politiser les savoirs en général et les disciplines en particulier, pire encore, de fissionner le réacteur républicain en activant des théorisations et des pra- tiques culturelles et politiques en chaîne venues des marges: les études post-coloniales, les féminismes et le post-féminisme, les études ethniques, les études gaies, lesbiennes et trans, les études queer, les disa- bilities studies, les beur studies, les whiteness stu- dies, les porn studies, les gender studies et toutes les études issues de l’intégration. Il y a effectivement de quoi avoir peur pour qui cherche encore à se confor- ter à l’ombre des grands récits de la modernité qui ont promis le progrès social, la justice et l’égalité pour tous alors qu’il n’était question que de la défense de l’universel blanc masculin hétérosexuel; de quoi trem- bler pour ses privilèges épistémopolitiques, ses casiers disciplinaires et ses universités straight. De fait, l’une des problématiques centrales des cultural studies est celle des politiques de la discipline. Mais il faut aussi parler de la rencontre des cultural studies, du marxisme et du post-structuralisme, des cultural stu- dies américaines et des cultural studies anglaises, 10 Sexpolitiques SEXPOLITIQUE_SEXPOLITIQUE 04/03/13 14:38 Page10 de la collision des grands objets des cultural studies, comme les médias de masse par exemple, avec des météorites qui criblent la nappe des champs à peine constitués, sans oublier les raids des minorités sur les cultural studies. Je ne serais pas là où je suis si je n’avais pas décou- vert les textes de l’« école » de Birmingham, si je n’avais pas lu les cultural studies en anglais et en américain, si je n’avais pas redécouvert le féminisme dans ses aspects politiques et théoriques tel qu’il a évolué et s’est vu redistribué dans les media studies et les queer studies dans les années 1990. Je ne pour- rais pas revendiquer ma qualité de mauvais sujet queer pervers et indiscipliné, mon identité sexuelle et de genre, mon rapport aux savoirs, aux pouvoirs et aux politiques sans une position constructiviste radi- cale qui affecte aussi bien la conception du langage et de la réalité que de la culture et des identités. J’ai donc choisi d’adopter un style autobiographique pour raconter des situations révélatrices du type de résis- tance que suscitent les cultural studies en France. À partir de ces résistances constatées, j’essayerai par la suite de définir ce que l’on peut entendre par cultural studies en décrivant plusieurs niveaux opé- ratoires: les objets et la dimension profondément poli- tique des cultural studies. Une fois passées en revue les caractéristiques épistémopolitiques des cultural studies, on verra mieux en quoi elles cherchent à renoncer à toute forme d’autorité de la discipline. Mêlant tonalité autobiographique et fragments de «l’histoire» des cultural studies, cette mosaïque «tex- tuelle » fera plaisir à ceux qui ont encore besoin de réduire les cultural studies à une inflation langagière, métaphorique et apolitique. Elle signifiera à d’autres que le personnel, le théorique, les disciplines sont politiques. 11 Cultural Studies… SEXPOLITIQUE_SEXPOLITIQUE 04/03/13 14:38 Page11 Autant prévenir tout de suite de l’agacement que suscite souvent ce genre d’écriture. Il vient du fait que l’on trouve ce genre de prose inutile et cheap par rapport à des modèles de la théorie plus nobles et plus rigoureux. Cette manière d’écrire serait si «amé- ricaine»: les Américains n’ont-ils pas cette tendance à émotionnaliser leurs propos, leurs expériences, avec ce style Alcooliques Anonymes qui serait le leur? Pour ce qui est du stéréotype culturel de l’américa- nité, il masque mal le propos critique de cet ancrage «subjectif». On voudrait sans doute, même dans les sciences humaines françaises, continuer d’opposer tranquillement subjectivité et objectivité, avec un modèle hypothético-déductif à la clé ou des manières de vérification empruntées aux sciences dures. Commencer ainsi revient à déconstruire le sujet que je suis, la fiction particulière qu’il représente, l’effet d’une histoire, d’un contexte, de certains discours. Pas de démarche culturaliste qui ne considère la ques- tion du sujet comme tout aussi importante que celle des objets d’investigation, qui ne voit que l’une et l’autre sont, voire doivent être liées. Mieux vaut être gai pour faire de l’observation participante dans les backrooms2. Mieux vaut être un fan de séries pour enquêter sur les fans de séries. La proximité avec son objet est une richesse et non un biais et il faut admettre que la plupart des enquêtes sur la sexua- lité des minorités et des «Autres» se sont faites jus- qu’à très récemment non d’un point de vue objectif, mais d’un point de vue hétérocentré et masculin (qui peut parfaitement être relayé par une autre femme dite biologique). Le modèle objectivant est finale- ment bien plus louche (que l’on pense à ce qu’il a donné dans une certaine anthropologie coloniale). Un départ subjectif réflexif constitue aussi une manière de contrer l’existence «naturelle» d’un sujet neutre, 12 Sexpolitiques SEXPOLITIQUE_SEXPOLITIQUE 04/03/13 14:38 Page12 non genré, non marqué par la classe ou la race : bref, universel et blanc. Cette manière d’écrire fait écho aux textes à voix multiples que j’ai lus dans les années 1990, qui m’ont sortie du monologue et de la pensée straight et qui, de Douglas Crimp3 à Stuart Hall, m’ont fait comprendre ce qu’il y avait de fic- tionnel et d’autobiographique chez les sujets des sciences humaines et en quoi parler autobiographi- quement permet de relativiser le principe d’autorité que confère la théorie. Pour ne plus succomber à uploads/Politique/ sexpolitiques-queer-zones-2-paris-la-fa.pdf

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