Systèmes de recommandation et réseaux sociaux, quelles implications pour le mar
Systèmes de recommandation et réseaux sociaux, quelles implications pour le marketing digital ? Maria Mercanti-Guérin Maître de conférences, CNAM, Dicen Introduction Les systèmes de recommandation sont pratiqués depuis l'origine par les réseaux sociaux. Le cas le plus emblématique est celui de Facebook qui intègre au fil d'actualité les préférences des amis de l'utilisateur. Au graphe social, les réseaux sociaux les plus connus ajoutent les graphes socio-géolocalisés (graph search de Facebook). L'ensemble de ces systèmes de recommandation fait l'objet de constructions d'offres publicitaires monétisées. S’ils sont incontournables pour les modèles économiques des réseaux comme Google Plus, YouTube, Twitter ou Facebook, ils soulèvent, néanmoins, un certain nombre de questions sur l'évolution du marketing digital et plus spécifiquement du e-commerce 1. Par ailleurs, ils ne représentent qu’un type de recommandation et se retrouvent, de plus en plus, appliqués en synergie avec d’autres types de recommandations dont la recommandation personnalisée. L'objectif de ce chapitre est donc de décrire, dans un premier temps, le concept de recommandation sociale. Nous montrerons que sa gestion est difficile pour les marques et que les systèmes de recommandation permettent de s’affranchir d’un certain nombre de difficultés portant, notamment, sur l’émetteur de la recommandation (consommateur, expert, leader d’opinion...). Dans un deuxième temps, nous mettrons en exergue les apports de ces systèmes de recommandation sur la croissance du commerce social. Nous traiterons de leur efficacité en termes de ventes en ligne, leurs principes de fonctionnement, leurs principales utilisations. Une présentation de la recommandation sociale telle qu’elle est appliquée par Facebook nous permettra d’aborder son acceptation par les consommateurs et des questionnements plus théoriques destinés à faire avancer la réflexion sur les bonnes pratiques de la recommandation sociale ainsi que les évolutions technologiques qui accroissent considérablement ses possibilités. 1. Les recommandations sociales : une pratique ancienne revitalisée par le digital La recommandation sociale a trouvé un essor nouveau grâce aux réseaux sociaux. Elle se distingue des trois autres grands types de recommandation à savoir : [1] La recommandation objet : cette recommandation repose sur une analyse des préférences pour conseiller au consommateur un produit similaire. Les préférences peuvent être déterminées grâce au comportement d’achat passé de l’individu. 1 Le e-commerce peut se définir comme l’ensemble des transactions commerciales s’effectuant sur Internet à partir de différents types de terminaux comme les ordinateurs, les tablettes, les mobiles mais aussi la télévision connectée. Néanmoins, on assiste peu à peu à une dilution des frontières entre e-commerce et commerce physique. Ainsi, les applications mobile sont des leviers d’achat appartenant au e-commerce mais elles ont également pour fonction de faire retrouver aux consommateurs le chemin des magasins via des promotions comme les SMS Push ou la géolocalisation. Le e- commerce est aussi un aspect du marketing digital qui s’intéresse à tous les leviers d’acquisition de trafic et de conversion (on parle alors de marketing à la performance permettant l’amélioration des résultats commerciaux sur Internet) mais aussi à la vie des marques sur le Web, leur e-réputation, leurs stratégies de construction et d’amélioration d’image (on parle alors de branding). [2] La recommandation personnalisée : cette recommandation passe par une analyse du comportement de navigation de l’internaute. Elle prendra en compte les mots-clé tapés, l’historique des recherches, le parcours de navigation au sein du site, etc. [3] La recommandation hybride : cette recommandation combine la recommandation objet, personnalisée et sociale. Elle permet de pallier les problèmes de rareté des données souvent rencontrés par les algorithmes de recommandation. La recommandation sociale identifie les utilisateurs ayant des préférences similaires. L’idée est de considérer que si A a choisi un même objet X que B, alors il est pertinent de recommander à B le produit Y qu’A a également acheté. Cette recommandation est généralement fondée sur une approche user-centric (centrée sur l’utilisateur). La notion de voisinage (A est voisin de B) est donc à la base de la recommandation sociale. Elle repose sur l’idée vérifiée par la recherche que nous sommes plus influencés par un autre « nous-même » que par un individu perçu comme différent. Ainsi, le concept de recommandation sociale est largement traité en marketing. Il a d’abord été abordé sous l’angle du bouche à oreille. Herr, Kardes et Kim (1991) montrent que les consommateurs écoutent plus volontiers les conseils de leurs proches concernant les marques et les produits à acheter plutôt que la publicité. Ces informations interpersonnelles peuvent provenir de différentes sources : familles, amis, entourage au sens large. Malgré l’abondance de la littérature consacrée à la recommandation, les chercheurs continuent à se poser des questions structurelles sur la recommandation, ses implications et la façon dont les marques peuvent les gérer. 1.1. Les recommandations : une difficile gestion par les marques Le consommateur attribue souvent des compétences accrues à son entourage, compétences parfois largement surestimées. Ainsi, les choix faits à partir des recommandations seraient non optimaux et aboutiraient parfois, à de véritables erreurs en matière de décision d’achat. Enfin, plus le produit à acheter est impliquant, plus les recommandations des pairs sont écoutées en priorité par rapport à d’autres sources d’informations. Le digital a multiplié les émetteurs de recommandations. Aux consommateurs utilisateurs des produits se sont ajoutés les lead-user (Franke, Von Hippel et Schreier, 2006) ou les experts. Néanmoins, cette multiplication des sources n’aboutit pas forcément à une meilleure connaissance du produit ou à un choix adapté à ses besoins. Bertrandias et Vernette (2012) ont montré à travers une étude sur 634 consommateurs portant sur leur choix d’un micro- ordinateur portable que les conseils des amis et des leaders d’opinion sont plus recherchés. Les experts seraient moins sollicités, leur compétence étant sous-estimée. Cette recherche permet d’aller à l’encontre d’une idée reçue : le consommateur est un expert, il a la possibilité de joindre les experts sur les forums ou dans son entourage. En fait, le consommateur n’est pas en mesure de distinguer le pseudo-leader d’opinion de l’authentique leader. Par ailleurs, il suit les avis de ses amis pour des raisons plus affectives qu’objectives. Les marques sont donc condamnées à multiplier les campagnes de communication pour contrer les idées fausses véhiculées par les réseaux sociaux ou l’entourage proche de leurs acheteurs. Cette difficile gestion des recommandations s’est accentuée avec l’apparition d’Internet. 1.2. Les recommandations sur Internet : présence sociale et recommandations personnalisées Les recommandations sur Internet ont suscité l’intérêt des chercheurs à mesure de la prise en compte de leur importance dans le choix d’un produit. Larceneux (2007) montre que le buzz sur Internet est issu d’un nombre important de recommandations des internautes et que ce buzz peut expliquer le succès des films de cinéma au box-office. Dès 2000, Mann et Stewart décrivent les recommandations comme une participation à des échanges sur des intérêts communs créant ainsi une proximité électronique entre individus. Ces recommandations peuvent être considérées comme issues de la volonté de certains individus de transmettre leur opinion sur l’expérience vécue avec le produit. Vernette (2007) les décrit comme indépendants et influenceurs. Enfin, Vernette et Flores (2004) mettent l’accent sur les internautes, souvent les premiers acheteurs qui partagent leur impression sur le produit d’autant plus facilement qu’ils se sentent experts. Ces résultats sont de plus en plus envisagés sous l’angle des réseaux sociaux. Ardelet et Brial (2011) montrent que la présence sociale joue un rôle incontournable dans la confiance que les internautes placent dans les recommandations. Définie comme « la capacité subjective d’un écran à rendre saillant un interlocuteur lors d’une discussion médiatisée par un écran (Short, Williams et Christie, 1976), la présence sociale est restituée sur les réseaux sociaux alors que les interlocuteurs ne se voient pas. Les recommandations sur le Web reposent, la plupart du temps, sur des vecteurs non anthropomorphiques2mais cet état est remis en question par les réseaux sociaux. L’émetteur de la recommandation est souvent identifié par des formules telles que « Dans votre réseau, Alain aime aussi ce produit » ou « Partagez votre dernier achat avec vos amis ». Selon Ardelet et Brial (2011), cette présence serait subjective et dépendrait d’une certaine proximité psychologique entre l’influenceur et l’influencé. Elle permettrait de réduire la distance spatiale. Dès lors, la recommandation doit être sociale ET personnalisée car cette similarité perçue accroît son pouvoir de recommandation. Cette similarité peut reposer sur des critères individuels relativement précis : âge ou genre (Gefen et Straub, 1997), motivations d’achat (Hassanein et Head, 2006). Ces similarités se retrouvent dans les parcours de navigation, les recherches effectuées, les sites visités. Toutefois, présence sociale et recommandations personnalisées ne sont pas les deux seules variables à prendre en compte dans une stratégie réussie d’influence. Ardelet et Brial (2011) montrent que certains supports digitaux comme les blogs bénéficient de systèmes de recommandations à très faible présence sociale (pas de noms des contributeurs, pas de photos ou d’avatars). Pourtant, leurs recommandations ont un pouvoir d’influence plus grand que certains moteurs reposant sur une mise en avant de nombreux vecteurs anthropomorphiques. En effet, la confiance dans l’émetteur surpasse parfois la force des recommandations. Autre questionnement, comment les consommateurs peuvent-ils juger la valeur des recommandations de certains professionnels de la recommandation (des consommateurs bénéficiant de promotions et uploads/Politique/ syste-mes-de-recommandation-et-re-seaux-sociaux3.pdf
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- Publié le Fev 03, 2021
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