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__________________________________________________________________________________________ © Houdement C.(2012) Démarche expérimentale en résolution de problèmes. In Dorier J.-L., Coutat S. (Eds.) Enseignement des mathématiques et contrat social : enjeux et défis pour le 21e siècle – Actes du colloque EMF2012 (GT10, pp. 1389-1399). http://www.emf2012.unige.ch/index.php/actes-emf-2012 DÉMARCHE EXPÉRIMENTALE EN RÉSOLUTION DE PROBLÈMES Catherine HOUDEMENT* Résumé – Deux questions sont soulevées dans cette contribution. (1) Est-il possible de tirer des fils conducteurs communs et en contrepartie de dégager des spécificités entre démarches d’enseignement des sciences, notamment entre mathématiques et autres sciences ? Ces fils seraient en particulier bienvenus pour une culture didactique scientifique des professeurs polyvalents. (2) Les démarches personnelles des élèves dans la résolution des questions mathématiques peuvent-elles ressembler à ce qu’ils font dans les sciences autres que les mathématiques ? Ce serait un pas vers la définition d'éléments minimaux d’intégration d’une culture scientifique chez des élèves de primaire. Mots-clefs : Démarche d’investigation, Démarche expérimentale, Résolution de problèmes, Contrôles, Raisonnement Abstract – This paper addresses two questions. (1) Is it possible to find common and specific characteristics when comparing mathematics teaching and other science (physic, biology) teaching? This would contribute to organise the scientific culture of primary teachers. (2) Is it possible to describe specific mathematical problem solving as experimental investigation, an usual scientific methodology? This would help to define primary school students' scientific literacy. Keywords: Inquiry-Based Science Education, Experimental Investigation, Problem Solving, Control, Reasoning En quoi et pourquoi le concept de démarche d’investigation se décline-t-il différemment, ou non, en mathématiques et dans d’autres disciplines dites scientifiques (physique, chimie, biologie, géologie, technologie, etc.) ? Comment se distingue-t-il de celui de résolution de problème ? Comment les questions de validations sont-elles réglées selon les disciplines en jeu ? (EMF 2012, texte introductif à GT10) Ces questions initiatrices du groupe de travail GT10 sont stimulantes : elles cherchent à établir des rapprochements entre les démarches pédagogiques liées aux disciplines scientifiques. Ce questionnement a été l’occasion à l’IUFM de Haute Normandie d’un travail collaboratif de formateurs1 d’enseignants du premier degré sur deux thématiques (preuve, mesure). La finalité du travail de ce groupe était d’aider les étudiants et élèves professeurs à concevoir les enseignements scientifiques comme des variantes d’un enseignement à la compréhension du réel. La démarche d’investigation a traversé nos échanges, je m’appuierai ici sur le travail du groupe autour de l'élucidation des ressemblances et différences entre les enseignements des sciences, les mathématiques étant considérées comme une science2. I. DEMARCHE D'INVESTIGATION ET DEMARCHE EXPERIMENTALE DANS LES PROGRAMMES DE L'ECOLE D’après Laugier (2006), la démarche d’investigation est insufflée dans les programmes de primaire de sciences (2002) sous l’impulsion du PRESTE3 et de la Main à La Pâte. Il s’agit de conseiller aux enseignants l’utilisation d’une démarche pédagogique appuyée sur un changement de paradigme de l’acquisition des connaissances : non plus par simples observations du réel, mais par questionnement sur les objets et les phénomènes et élaboration de réponses à ces questions. * LDAR, Universités Paris Denis Diderot et Rouen (IUFM) – France – catherine.houdement@univ-rouen.fr 1 Groupe de recherche-formation dont j'étais responsable, associant sur trois ans des formateurs enseignants de physique, de sciences de la vie et de la terre, de technologie et professeurs des écoles : Pierre Emery, Joël Gaudrain, C.Houdement, Catherine Lecoq, Nicolas LoRé, Arlette L’Haridon, Isabelle Martinet, Éric Minot. 2 Comme le titre de Kahane J.-P. (2002, dir) L'enseignement des sciences mathématiques. Éditions Odile Jacob. 3 PRESTE : Plan de rénovation des Sciences et de la Technologie à l’école (BO n°23, juin 2000) 1390 EMF2012 – GT10 Drouard (2008) précise les différentes phases :  Transformation par l’enseignant d’une situation de départ ou fonctionnelle (Coquidé et Giordan (2002) parlent de situations déclenchantes et de questions introductrices) qui intéresse les élèves, en un problème à résoudre. L’auteur insiste bien sur la responsabilité de l’enseignant dans la formulation du problème, ses liens avec les conceptions et les questions des élèves et les connaissances visées.  Passage du problème à résoudre en hypothèses à tester ou problème reformulé : il s’agit là de séparer ce qui relève de connaissances anciennes et ce qui reste en question sous forme d’hypothèses.  Elaboration et réalisation d’une organisation4 qui teste les hypothèses et conduit à des résultats exploitables. Plusieurs organisations sont possibles pour construire des réponses, décrites globalement par trois méthodologies : expérimentation, observation et recherche documentaire. L’expérimentation (aussi connue sous le nom de démarche expérimentale) est un exemple d'organisation, qui se déroule selon des conditions et un déroulement bien précis (voir annexe 1). La démarche expérimentale reste l'organisation emblématique de la démarche d'investigation, qui se trouve souvent réduite à la seule démarche expérimentale. Mais l'expérimentation n’est pas toujours possible, d'autres organisations peuvent être utilisées. Par exemple une modélisation où on matérialise en laboratoire l’idée qu’on se fait du fonctionnement de quelque chose, ce qui permet de tester cette idée : Drouard cite la construction, après observation guidée de la réalité (palpation des membres, exercices de contraction, observation de radiographies…) d'un modèle de fonctionnement des articulations bras/avant-bras avec des planchettes pour les os et des ficelles pour les muscles ; ou une observation : là encore la réalité peut ne pas être directement observable, le travail a lieu sur des documents (films, photos, données recueillies par des scientifiques) ; ou encore une recherche documentaire.  Confrontation des résultats obtenus (suite à l’organisation retenue) aux hypothèses.  Synthèse de l’ensemble du travail : structuration des connaissances en jeu.  Confrontation au savoir savant. Cette présentation de Drouard (2008) met en avant une des visées de cette méthodologie d'enseignement qu'est la démarche d’investigation, l’acquisition de connaissances nouvelles, confirmées par un savoir savant de référence, écrit. Mais un autre objectif d’apprentissage relève de l’apprentissage de la démarche scientifique : maints enseignants ont cherché à s’emparer de cet objectif dès les années 2000, mais son enseignement en primaire reste toujours complexe et questionné (par exemple Blanchon 2005). Notons qu’on retrouve bien les deux objectifs d’acquisition mentionnés dans l’introduction du GT10 : connaissances conceptuelles et démarche ordinaire (au sens de Kuhn 1962) de l’exploration des paradigmes scientifiques. La prescription institutionnelle de la démarche d’investigation dans l’enseignement des sciences au primaire et au secondaire qui perdure en 2011 amène à questionner sa présence ou la possibilité de sa présence en mathématiques. Il est à noter que les programmes 2008 de collège se limitent à une injonction (MEN 2008 p. 4). Dans les programmes mathématiques 2002 de l'école, on pourrait d'abord interpréter comme l’indication d’une démarche d’investigation en mathématiques, la présence des « problèmes de recherche » avec leurs deux objectifs : apprendre des connaissances 4 A l’instar de Drouard (2008) je préfère cette expression à celle, pédagogiquement usitée, de protocole, parce qu'elle évoque davantage l'idée de planification, terme que propose aussi Drouard. Je conserverai le terme de protocole pour la démarche expérimentale. Démarche expérimentale en résolution de problèmes 1391 mathématiques et faire preuve d’initiative et d’imagination face à des problèmes nouveaux. On lit par exemple (cf. annexe 2) : (…) des problèmes de recherche, c’est-à-dire des problèmes pour lesquels l'élève ne dispose pas de démarche préalablement explorée : certains de ces problèmes sont utilisés pour permettre la construction de connaissances nouvelles, d’autres sont davantage destinés à placer l’élève en situation de chercher, d’élaborer une solution originale (MJER-DESCO 2002 cycle 3 p. 13) Ce qui m’intéresse dans cette étude c’est d’abord le second objectif. J’entends par là non pas, à l’instar des enseignements de la Théorie des Situations Didactiques (TSD) mettre les élèves en « situation didactique » (Brousseau 1998) de façon à ce que l’expérience les amène à produire des connaissances qui participent du savoir visé, mais les rendre pleinement conscients de l’intérêt d’une démarche de résolution de problèmes qui consiste à émettre des hypothèses, les confronter au réel (qui est la nature usuelle du milieu matériel à l’école primaire) et en déduire des possibilités de réponses, dit autrement, à émettre des propositions de l’ordre du réfutable. Cette conscience serait elle-même une connaissance instrumentale (au sens de Drouhard 2011). Compte tenu de ce qui a été développé sur la démarche d'investigation, il semble que ce soit là une entrée des élèves plutôt dans la démarche expérimentale, qui n'est qu'une des organisations de la démarche d'investigation. II. SPECIFICITES DE LA DEMARCHE EXPERIMENTALE EN MATHEMATIQUES RELATIVEMENT AUX AUTRES SCIENCES Pour engager les élèves en mathématiques dans une démarche expérimentale, il s’agirait d’abord de les confronter à des problèmes qui portent cette potentialité. Bien sûr la situation du puzzle de Brousseau, qui amène les élèves de CM1-CM2-6ème (grades 4-5, 9 à 12 ans) à réfuter des protocoles d’agrandissement (séparé) des morceaux d’un puzzle par la réalisation effective du puzzle, est un exemple célèbre de mise en œuvre de démarche expérimentale (Robert et Houdement 2005). Mais dans la TSD, elle n’est pas construite avec l’intention d’enseigner une démarche expérimentale, mais plutôt de pousser les élèves à mettre en défaut leurs idées premières pour enrichir leurs connaissances sur le modèle numérique de la similitude, in fine à enrichir leurs connaissances sur les nombres. Il me semble que la situation didactique aménage la possibilité de cette démarche uploads/Science et Technologie/ demarche-experimentale-en-resolution-de-problemes.pdf

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