L’anesthesie intraosseuse en cas de grands kystes L e traitement des kystes max
L’anesthesie intraosseuse en cas de grands kystes L e traitement des kystes maxillaires est une nécessité thérapeutique fréquente en chirurgie maxillaire, la taille des kystes ou des tissus infectieux variant considérablement d’une pa- thologie à l’autre et impose dans tous les cas une exérèse totale du tissu os- seux affecté. Une des difficultés fré- quentes de ces interventions est d’ob- tenir un silence opératoire total si l’exérèse est effectuée sous anesthé- sie locale. L’utilisation de l’anesthé- sie intraosseuse permet d’obtenir une analgésie complète du site autorisant un curetage efficace qui garantit une régénération osseuse. INTRODUCTION Les situations opératoires sont multi- ples : granulomes apicaux, kystes infé- rieurs à 1 cm, kystes étendus ou proces- sus infectieux sont des complications fréquemment rencontrées en odon- to-stomatologie. Quelles sont les exi- gences particulières de l’anesthésie lo- cale dans ces cas-là ? Elle vise à obtenir l’analgésie parfaite et l’hémostase du site opératoire, ainsi que le contrôle ef- ficace des douleurs postopératoires du- rant plusieurs jours (Hargreaves et al., 2005 ; Morrox et al., 2002). LES TECHNIQUES D’ANESTHÉSIE LOCALE CLASSIQUEMENT PRÉCONISÉES POUR LA CURE DES KYSTES L’infiltration sous-muqueuse : tenue habituellement pour la technique de choix au maxillaire, et pour l’anesthé- sie du secteur mandibulaire antérieur (Fragouli et al. 2008). Pour l’anesthésie des prémolaires et molaires mandibu- laires, on fait une infiltration sous-mu- queuse au niveau du site opératoire pour une anesthésie et une hémostase satis- faisantes (Morrow et al., 2002). Les incon- vénients principaux de cette technique sont les suivants : durée de l’anesthésie relativement longue, et injection pala- tine douloureuse dans certaines mains (Endo et al., 2008). L’anesthésie loco-régionale du nerf alvéolaire inférieur : est considérée comme la technique de choix pour le traitement des molaires et prémolaires mandibulaires (Fragouli et al. 2008). Elle doit être obligatoirement complétée par une infiltration sous-mu- queuse vestibulaire adrénalinée afin d’anesthésier le nerf buccal (branche du V3) et d’assurer une bonne hémostase lo- cale (Morrow et al., 2002). Cette technique présente les inconvénients suivants (Endo et al., 2008) : anesthésie de la langue, des lèvres et de la joue et de longue durée, parfois très surdimensionnée par rapport à la durée de l’intervention. L’anesthésie intra-ligamentaire : par voie desmodontale, la solution anes- thésique traverse la lame criblée pour baigner l’os spongieux. Sa réalisation en chirurgie apicale permet d’instiller par voie directe la solution anesthésique au sein de la lésion. En effet, le curetage du tissu de granulation peut s’avérer dou- loureux, malgré une anesthésie par infil- tration. La quantité d’anesthésique né- cessaire est très minime, ce qui permet de limiter l’apport de vasoconstricteurs L’utilisation de l’anesthésie intraosseuse permet d’obtenir une analgésie complète du site, autorisant un curetage efficace qui garantit une régénération osseuse. clinique : Dr B. GUILLAUME ANALGÉSIE OPÉRATOIRE l'auteur Dr B. GUILLAUME • Chirurgien maxillo-facial. • Président du Collège français d’implantologie. • Expert près la Cour d’appel de Paris. • Co-directeur du DU d’implantologie de la faculté de médecine d’Angers. • Co-auteur de « Tissu osseux et biomatériaux en chirurgie Dentaire », Quintescence 2015. 34 - Dentoscope n°166 maxillaires © ultramarinfoto - iStock by Getty Images chez les patients pour lesquels leur utili- sation en quantités trop importantes est déconseillée. En outre, l’effet est quasi- ment immédiat, l’anesthésie profonde, assez peu douloureuse à réaliser, et elle constitue un bon complément des autres techniques anesthésiques. Mais l’anes- thésie est de courte durée (moins de 30 mi- nutes) et peu étendue, donc contre-indi- quée pour des chirurgies de vastes kystes (Endo et al., 2008). Dirnbacher a comparé ces trois tech- niques anesthésiques en 2002. L’anesthésie intra-ligamentaire pré- sente de bons résultats. Son unique in- convénient semble être sa courte ef- ficacité dans le temps. L’infiltration sous-muqueuse et l’anesthésie troncu- laire présentent des résultats quasiment identiques. Leur avantage majeur, sur- tout dans le cas d’interventions chirur- gicales de longue durée, est leur temps d’action prolongé. Force est de consta- ter que si ces trois techniques sont effi- caces, elles n’apportent pas toujours l’ef- fet recherché. Elles nécessitent souvent des réinjections successives et imposent le recours à des quantités élevées d’anes- thésique et des points d’injections multi- ples. Elles gagnent donc à être associées pour une anesthésie complète et de durée suffisante. En pratique, on constate sou- vent le maintien d’un niveau de sensibi- lité particulièrement gênant tant pour le patient que pour le praticien, qui risque de voir son geste opératoire limité. Anesthésie intraosseuse : quantités réduites dans l’os spongieux de l’os alvéolaire Ces divers éléments nous ont amenés à envisager l’utilisation de l’anesthésie intraosseuse dans laquelle la solution anesthésique est injectée, en quantités réduites, directement dans l’os spon- gieux de l’os alvéolaire. L’effet de l’anes- thésie est immédiat et la durée est satis- faisante. (Fragouli et al. 2008). Cette avancée technique apporte de réels bénéfices sur de nombreux points : sim- plification de l’acte d’anesthésie, élar- gissement du champ d’action, effica- cité anesthésique accrue et morbidité moindre pour le patient. Déjà utilisée en chirurgie implantaire et réparatrice par greffe osseuse (Guillaume et Villette, 1994), l’anesthésie intraosseuse peut également intervenir dans les traite- ments des pathologies kystiques. La pré- sence de l’anesthésique au sein de la ma- trice osseuse, et non plus seulement en nappe dans les tissus muqueux, assure une durée d’action efficace pour ces actes chirurgicaux ; (Fig.1). MATÉRIEL ET MÉTHODE Nous avons utilisé l’appareil Quicksleeper, avec des aiguilles spécifiques à biseau modifié (de type « scalpel » de Dental Hi Tec, France), répondant aux contraintes liées à la perforation de l'os. Il permet la pé- nétration progressive par une mise en rotation discontinue visant à en limiter l’échauffement, grâce à une capacité de perforation supérieure aux modèles stan- dards, avec un taux d'obstruction parti- culièrement réduit. Choix de la solution anesthésique Les tissus kystiques se caractérisent par une néo-vascularisation importante liée au développement du processus inflam- matoire kystique. L’utilisation d’une so- lution anesthésique nous a permis de limiter le saignement et d’assurer une vi- sibilité opératoire réelle. L’anesthésiant qui a été utilisé est la Scandicaine 20 mg / mL adrenalinée au 1 / 100 000. La population opérée est souvent poly-médicamentée, de sorte que les in- teractions médicamenteuses avec des anesthésiques locaux et vasoconstric- teurs est à prendre obligatoirement en considération. C’est le cas, entre autres, pour les traitements anti-arythmiques, les anticoagulants, les biphosphonates, etc. (Malamed, 2013). Les choix de tel ou tel type d’anesthésique reste du domaine et de l’usage clinique de chaque praticien et des traitements médicaux éventuels en cours du patient. PROTOCOLE D’INJECTION Considérations générales Il faut déterminer la zone devant être anesthésiée grâce à un bilan radiogra- phique panoramique, et / ou cone beam, afin de repérer une zone osseuse saine proche du site kyste où se fera le point de pénétration de l’aiguille lors de l’anes- thésie intra-osseuse. En effet, la zone kystique, où la totalité du tissu osseux a été profondément remanié ou bien a dis- paru, est bordée par de l’os corticotrabécu- laire. L’injection intraosseuse devra donc se faire au sein du tissu osseux sain et non directement dans la cavité kystique. Le premier temps débute par une anesthésie de la muqueuse par injection d’un quart de cartouche. Il importe d’anesthésier la muqueuse au- delà des limites radiographiques du kyste, selon la taille de celui-ci. Le but de cette infiltration sous-muqueuse aux limites externes de la cavité kystique est, d’une part, d’assurer une hémostase dès le dé- but de l’intervention, et d’autre part, de permettre la réalisation indolore de l’anes- thésie intra-osseuse (anesthésie du périoste sous-jacent). La prise stylo, autorisée par le QuickSleeper, au plus près de l'aiguille, avec des points d'appui efficaces, permet un contrôle parfait et une précision maximale. On place l'aiguille à proximité de l'endroit de la future perforation ostéocentrale ou transcorticale, presque parallèle à la muqueuse, ce qui assure une profondeur de pénétration minimale, sans toucher le périoste. L’aiguille pénètre de seulement 0.5 millimètre sous la muqueuse, et on in- jecte lentement. Le deuxième temps est l’anesthésie intraosseuse proprement dite. Deux options techniques se présentent : Soit une anesthésie transcorticale consistant à injecter l'anesthésique dans l’os spongieux après avoir traversé la corticale vestibulaire. La perforation se traduit par la perception dʼun déclic. L’aiguille de 16 mm permet de déposer lʼanesthésique au plus proche de lʼapex et un diamètre de 40 / 100e. Soit une anesthésie ostéocentrale consis- tant à placer l’anesthésique dans l’os trabéculaire en passant par le sommet du septum, en son milieu, entre les corticales linguale et vestibulaire. La phase de per- foration se traduit par plusieurs déclics marquant la traversée des mini-corti- cales formées par les trabéculations. Les aiguilles utilisées, de 16 mm de long et 30 / 100e, sont dʼun diamètre inférieur à celles des transcorticales, car le septum est moins difficile à traverser qu’une cor- ticale. Ces anesthésies sont simples, ap- plicable à la plupart des cas, rapide à ad- ministrer, et sans temps de latence. On place l'aiguille au sommet de la papille inter-dentaire, parallèle à l'axe des ra- cines dans le plan mésio-distal, avec un angle de 15° et uploads/Sante/ 2016-guillaume-l-x27-anesthesie-intraosseuse-en-cas-de-grands-kystes-maxillaires.pdf
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- Publié le Dec 07, 2022
- Catégorie Health / Santé
- Langue French
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