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1 Auguste Comte et la transculturalité Orient Occident. Georges Bertin1 « Le grand mérite des positivistes brésiliens est d’avoir suivi Comte dans toute la richesse de sa personne et de sa pensée ». Paul Arbousse-Bastide. Plan. Contexte Transculturalité Orient et Occident aspects structurels aspects socio politiques aspects anthropologiques 1 directeur de recherches au CNAM des Pays de la Loire, communication au colloque sur Auguste Comte et le positivisme Association Sol do Sul, Paris, le 10/010/2014, Festival du Rio Grande do Sul organisé par Jaqueline Meyer. 2 Contexte. Le 19e siècle occidental se découvre une passion pour les études orientales et les rapprochements avec l’Orient, même si celui-ci est souvent fantasmé. Il opère ainsi les prémisses d’une Trans culturalité positive si on la réfère au contexte de l’époque car elle est porteuse d’intérêts philosophiques, religieux et culturels que croisent cultures et univers. Pourtant, il est encore le reflet d’une pensée binaire produisant des processus de fixation et d’essentialisation des différences. Siècle du positivisme, le 19ème siècle redécouvre le Bouddha et les études orientales (Eugène Burnouf (1801- 1885), Sylvain Lévi (1863-1935) qui décrit les Indes comme un creuset transculturel comme un creuset transculturel, Emile Guimet (1831-1916) et aussi les romantiques qui s’inspirent du Moyen-Age occidental, de l'art gothique et de l'Orient dans leurs œuvres. Le Positivisme d’Auguste Comte. Auguste Comte a été l’assistant d’Henri Saint Simon de 1816 à 1822. Si l’Orient est pratiquement absent de la doctrine de Saint Simon, Prosper Enfantin (1796-1864), son successeur, directeur de la compagnie des chemins de fer Paris-Lyon-Méditerranée, qui devient chef de file du mouvement vers 1830, prêchera l’union de l’Occident et de l’Orient et l’affranchissement de la femme, en faisant un des principes apostoliques du 3 mouvement saint simonien. Du fond de sa prison, Enfantin entendait l’Orient qui appelait l’Occident endormi. Sa position révèle l’idée traditionnelle dichotomique occidentale selon laquelle l’Orient est considéré comme une femme. Elle lui fait occuper une position subalterne, idée que renforce la critique du despotisme oriental. L’Occident est crédité du progrès matériel (de fait industriel) et l’Orient, en complément, du souci de la Nature de la Vie organique en tant que compensation. Car le mot Orient implique pour lui un élan vital, les jouissances collectives du corps sans cesse raccordé au Cosmos. Et l’Orient chez Prosper Enfantin deviendra l’enjeu, par excellence de toutes les révolutions à venir, le levier qui permettra de faire sortir la vieille Europe de ses ornières. Ainsi nombre de publications littéraires de cette mouvance appelleront à l’union de la Croix et du Croissant dans une grande réconciliation spirituelle et religieuse2. Premier jalon. Ainsi, parmi d’autres, Auguste Comte appartient au grand mouvement de « Renaissance orientale » de l’époque. En assignant à la culture européenne, qu’il désigne comme occidentale, son pendant oriental ; il annonce que le positivisme ralliera dignement l’Orient à l’Occident pour le développement des attributs humains3. Il parle aussi d'un « Comité positif » qui guidera le monde vers un accord global (S 1: 392) et admet qu'il faudra deux siècles avant que la grande harmonie positive ne remplace «l'interrègne spirituel au centre du Grand-Être» (= de l'Humanité), car «l'anarchie actuelle» ne saurait durer ! Comte a toute confiance dans le fait que la 2 Jao Huyk Yang, L’Orient de Saint Simon et des Saint-Simoniens, 1825-1840, Thèse de doctorat d’histoire contemporaine, Université de Paris 8, 2012 . 3 Comte Auguste, Système de politique positive, t.4, Paris, Société positiviste, 1851-54. p. 13. 4 philosophie « finale » résoudra tous les problèmes, pour les pays d'élite (en Europe) et les « populations retardées » (S 1: 392), entendez orientales et africaines. «[Le positivisme] comportera bientôt une efficacité croissante, soit pour la préparation directe des populations retardées, soit surtout en confirmant la famille d'élite dans sa nouvelle foi, ainsi appelée à manifester son universalité caractéristique. » Transculturalité. A la croisée du rationalisme et de l’empirisme, le concept de Trans culturalité se définit comme complexité. Posé à la croisée des proximités et en dépit des différences, dans la reconnaissance de « moments épistémologiques irréductibles », .au cœur de nos révolutions épistémologiques actuelles, il s’oppose à toute hiérarchie entre les cultures et à toute normativité culturelle, laquelle ne produirait que résistances et nuirait aux dynamiques interculturelles. Et d’en faire varier l’extension et la compréhension, incorporer les traits d’exception, dans une double démarche de réflexivité et d’extranéité fondée sur le comparatisme4. Une méthode d’approche en découle : la transdisciplinarité, autre façon de concevoir les cultures non plus comme des ilots distincts objectifs mais comme des réseaux interactifs de sens et de pratiques. Car toute relation transculturelle est hybridité, « changeability and incertainty » elle amène à envisager des liens ouverts fluides, liquides5. Elle y est puissamment vectorisée par des systèmes d’information fluides, à la réaction instantanée, dans l’intercommunabilité des échanges. Pour autant, divers espaces sont et ont été plus propices que d’autres aux 4 Chatué Jacques, Epistémologie et transculturalité - L’Harmattan, 2009. 5 Van Sayek Pascal, Transgressions: binaries revisited, in Nationalism and social imaginary : negotiation of social signification… doctorat d’études transculturelles, Université Jean Moulin, Lyon, 2011 5 transferts culturels, la vogue de l’Orientalisme du 19 e siècle auquel Auguste Comte n’était pas étranger notamment du fait de sa proximité avec Saint Simon a constitué le terreau transculturel dont nous faisons l’hypothèse que sa philosophie a pu se trouver empreinte. Elle consiste également, pour Gilbert Durand6, à mettre en évidence les conflits entre les représentations de la défiguration de l’homme et les images de sa figure traditionnelle, ce que nous le verrons, peut-être repéré dans l’oeuvre de Auguste Comte. Ainsi, Raymond Schwab, spécialiste des Indes, consacre plusieurs pages à Auguste Comte dans son ouvrage « La Renaissance Orientale 7». Orient-Occident. La relation entre l'Orient et l'Occident est, de fait, un sujet central, déjà transculturel, dans la Littérature du 19ème siècle, la Musique, les Arts, Alfred de Vigny avait l'esprit occupé de Bouddha, Edouard Quinet et Hippolyte Taine rapprochaient les deux religions, un nouveau souffle courait sur les études orientales. Avec Le Voyage en Orient de Gérard de Nerval chacun se sent tour à tour « païen en Grèce, musulman en Egypte, panthéiste au milieu des druses, dévot sur les mers aux astres dieux de Chaldée et… a compris la grandeur de cette tolérance universelle qu’exercent aujourd’hui les Turcs »8. Et nous avons tous rêvé sur Les Orientales de Victor Hugo. 6 In Science de l’Homme et Tradition, Paris, Berg, 1979/ 7 Schwab R., La Renaissance Orientale, Payot, 2014 (réédition de 1950), p. 374. 8 Nerval Gérard (de), Le Voyage en Orient, Paris Charpentier, 1851. 6 De même, les influences notoires de la pensée du président de Brosses9 sur Comte qui lui doit sa définition du fétichisme et dont nous savons quel intérêt il portait aux études égyptiennes et africaines, semblent l’indiquer. Aspects structurels. Chine. La transculturalité est observable au cœur de l’écriture d’Auguste Comte, formellement dans son style, sa forme même que Lazinier10 a comparée à l’écriture chinoise. Il décrit le goût d’Auguste Comte pour les formules et son attrait pour les regroupements numériques les circonlocutions rituelles comme dans sa répugnance à se relire. Citant Walter J Ong, Lazinier met cela en relation avec le rapport de similitude que Comte entretient avec le discours chinois, en effet les formules y jouent un rôle considérable (on y recense deux mille chengyu ou expressions consacrées). Et les regroupements numériques prolifèrent comme les épithètes consacrées car les chinois ont donc conservé l’essentiel des structures mentales de l’oralité primaire liée à l’animisme que Comte nomme « fétichisme prépositiviste » et dont il emprunte la description au Président de Brosses. De même la relation aux dictionnaires est très importante en Chine, basée sur des regroupements numériques, par exemple les trois religions et les neuf écoles. Pour Lazinier, si Comte n’a connu la Chine que tardivement, il y a néanmoins trouvé un intérêt particulier et l’indique dans plusieurs écrits. Il sentait que la Chine fétichocratique 9 De Brosses Charles, Du culte des dieux fétiches, 1760, éd Fayard, 1988. 10 Lazinier Emmanuel, in Revue CoÉvolution. No 6. Automne 1981 7 attendait depuis plusieurs siècles la religion universelle qui devait surgir en Occident indiquant que le sacerdoce de l’humanité y trouvait des affinités spéciales. Transculturel donc que ce rapport particulier à la pensée chinoise, à son écriture même et qui le conduit pour Lazinier à penser une synthèse vraiment de ce fait transculturelle entre positivisme et fétichisme et qu’il propose à l’adoration des fidèles de l’avenir soit la Trinité positiviste Grand Etre/Humanité/ Grand Fétiche -Gaia/Grand Milieu est bien chinoise… Il y a donc bien imprégnation de deux systèmes culturels en interaction et non simple juxtaposition. Oscar A. Haac11 a souligné les convergences entre les doctrines de Confucius et d’Auguste Comte tant dans leurs concepts de la Terre et du Ciel que dans leur humanisme, parallèles trop nombreux pour qu’ils soient le fait du hasard, soit :  conception de l’individu en société, de sa liberté,  pouvoir de l’Etat, (dictature républicaine chez Comte), garantissant Ordre et Progrés,  mise à l’honneur de l’Homme et de la Tradition, uploads/Societe et culture/ auguste-comte-et-la-transculturalite-orient-occident 1 .pdf

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