249 Le semis direct pour une agriculture pluviale de conservation O. El Gharras

249 Le semis direct pour une agriculture pluviale de conservation O. El Gharras1, A. ElBrahli2, A. ElAissaoui1 et N. El Hantaoui3 1. Centre Régional de la Recherche Agronomique de Settat, 2. Ingénieur consultant NADAR, 3. Centre de Travaux 10-04 de Settat. Résumé Les enjeux liés à l’agriculture de conservation motivent de plus en plus d’agriculteurs et d’institutions de recherche à travers le monde. Déjà largement pratiquées en Amériques et en Australie, plusieurs pays en Asie ont commencé à tracer leur chemin vers l’adoption de ces systèmes de production plus respectueux vis-à-vis des ressources naturelles. Les résultats obtenus au Centre Régional de la Recherche Agronomiques de Settat chez les agriculteurs sont très prometteurs et montrent que le semis direct constitue un grand potentiel pour le Maroc. Le développement et l’adoption de ce système de production ne peut être en confl it avec les systèmes de production basés sur l’intégration culture/ élevage, bien ancrés dans la culture et l’économie rurales marocaines. Cependant, des solutions adaptées à la gestion des phases de transitions doivent êtres réfl échis et mises en œuvre. L’adaptation et le développement du semis direct au Maroc, pour une agriculture durable, reste tributaire d’une prise de conscience des décideurs politiques et de la disponibilité de la technologie, principalement le semoir, au niveau des exploitations agricoles. Mots clés: Agriculture de conservation, Semis direct, Effi cience, Ressources naturelles, Céréales, Maroc. Introduction L’agriculture pluviale devient de plus en plus vulnérable vis-à-vis des fl uctuations climatiques. Au Maroc, ce sont près de 7 millions d’hectares, où les céréales représentent à elles seules environ les deux tiers, qui sont concernés par ces problèmes de changements climatiques. La principale contrainte de cet agro-écosystème réside dans la détérioration de sa productivité. Les diff érentes actions entreprises par l’état depuis l’indépendance jusqu’à présent ont permis d’augmenter la production mais aussi d’exploiter d’une façon minière nos ressources naturelles principalement l’eau et le sol. En eff et, l’opération labour a permis d’étendre les superfi cies agricoles même dans les zones marginales. Les opérations engrais et désherbage ont essayé de remédier aux problèmes de chute des rendements. Mais toutes ces actions n’ont pas suffi t pour assurer une productivité stable. Les programmes entrepris pour atténuer les eff ets de la sécheresse n’ont présenté que des résultats mitigés. Quand au programme de sécurisation de la production céréalière, il est resté une ambition et un vœu politique sans plan d’action réalisable. Les systèmes de production traditionnels doivent, désormais, s’adapter aux nouvelles donnes imposées par les changements climatiques qui prévoient une augmentation de la fréquence des sécheresses et la concentration des pluies sur de courtes périodes (Yakoubi et al, 1998). En plus de ces contraintes, viennent s’ajouter les coûts des intrants, de plus en plus élevés, le faible taux de mécanisation des exploitations agricoles marocaines et une main d’œuvre agricole de moins en moins disponible. Partie 4: Cultures, itinéraires techniques et productivité 250 Symposium international «Agriculture durable en région Méditerranéenne (AGDUMED)», Rabat, Maroc, 14-16 mai 2009 Le présent article examine les limites des pratiques conventionnelles en agriculture pluviale sur le sol, l’environnement et la gestion des cultures au Maroc. Appuyé de résultats de recherche obtenus aussi bien aux domaines expérimentaux que chez les agriculteurs, le but est d’essayer de montrer que l’adoption du système de semis direct a le potentiel et la possibilité de mettre à niveau l’agriculture pluviale, accroître la productivité des grandes cultures tout en respectant l’harmonie entre exploitation et préservation des ressources naturelles. 1. Limites de l’agriculture conventionnelle pluviale 1.1 Travaux du sol et complexité de la gestion des cultures L’agriculture des zones pluviales dépend des caprices du climat et particulièrement d’une pluviométrie diffi cile à appréhender. En plus de ces contraintes, au Maroc, le faible taux de mécanisation, la dominance des outils à disques et les coûts des opérations rendent complexes les prises de décision pour la conduite des cultures. Ainsi, des décisions aussi faciles que la réalisation des travaux du sol ou la date de semis se trouvent tributaires des premières pluies et de la disponibilité des équipements au moment opportun. Si dans certaines régions, comme Abda et Chaouia, l’accès aux parcelles ne pose pas un grand problème, la précocité de semis par contre est déterminante dans l’élaboration du rendement des céréales. Celle-ci suppose des travaux à sec avec des puissances et outils qui font défaut dans la majorité des exploitations agricoles dites mécanisées. Donc, des coûts exorbitants en équipement et énergie dans un environnement à risques. Dans les zones plus favorables, où une fl exibilité de la date de semis est possible, les types de sol n’off rent pas un accès facile aux parcelles. Dans ce cas comme dans l’autre, les travaux du sol restent l’opération majeure aussi bien en termes de sa nature que son coût. Devant cette situation, le compromis souvent adopté est d’entreprendre un labour à sec en été et une préparation du lit de semence après les pluies. Il en résulte des dépenses d’énergie et d’équipements et une perte des réserves en eau dans le sol par évaporation. Dans d’autres situations, le travail du sol eff ectué à la hâte, dans des conditions humides, détruit la structure du sol et produit des horizons compactés favorisant le ruissellement et l’érosion du sol. Une perte d’une partie des premières pluies, voir celle de toute la saison automnale, fait que les semis accusent souvent des retards à cause des travaux du sol qui ne sont pas réalisés au temps opportun et fi nit par exposer les cultures au stress hydrique de fi n du cycle. Le même scénario, même plus grave, se produit pour les cultures de printemps. Les parcelles destinées à ces cultures subissent des labours répétés en hiver en conditions humides. Il en découle directement un tassement et des pertes de sol et d’humidité. Les semis sont eff ectués aux mois de février-mars ou le défaut et retard des pluies induit des levées tardives et hétérogènes avec exposition de ces cultures aux mois secs et chauds en début d’été. L’absence de couverture du sol dans les cultures en lignes accentue ces phénomènes. L’abandon du tournesol et la réduction des superfi cies des pois chiches, ces dernières années, sont le témoignage de l’inadaptation des pratiques culturales aux conditions climatiques. De ces faits, on ne doit pas s’étonner que, d’année en année, la productivité agricole diminue et l’autosuffi sance devient diffi cile à réaliser. 1.2 Agriculture conventionnelle et environnement Le maniement du sol et l’enfouissement des résidus accélère la minéralisation de la matière organique et particulièrement, l’humus qui donne au sol sa stabilité structurale et sa porosité ainsi que les conditions favorables à la vie active du sol. Le sol, au lieu d’être un réservoir de séquestration du carbone, se transforme en une source d’émission de quantités importantes de gaz carbonique à eff et de serre, une des mauvaises attributions de l’agriculture conventionnelle à la détérioration de l’environnement. L’état de dégradation observé des collines pré-rifaines, des bassins versants des plaines de Sais, Zaïr et Chaouia ainsi que la pollution des cours d’eau, et la El Gharras et al.: Le semis direct pour une agriculture pluviale de conservation 251 charge de l’air en poussière au moindre souffl e de vent sont les témoignages des manipulations abusives du sol. En eff et, si l’exportation des résidus des récoltes est massive, l’agriculture conventionnelle basée sur les travaux du sol, ne fait qu’accentuer leur appauvrissement par la minéralisation de l’humus et la dégradation de la qualité physico-chimique des sols qui deviennent peu fertiles et plus vulnérables à l’érosion. 2. Système de semis direct base de l’agriculture de conservation: Acquis de la pratique du semis direct au Maroc L’agriculture de conservation est un nouveau concept d’exploitation agricole qui favorise l’équilibre entre une productivité optimale et une utilisation effi ciente et durable des ressources naturelles. Le système semis direct constitue la base de cette agriculture de conservation. Il repose sur l’élimination des travaux du sol, le maintien des résidus en surface, le choix des rotations culturales et la gestion des cultures en fonction des potentialités de l’agro-écosystème en question. L’installation des cultures est ainsi réalisée par un semoir combiné capable de couper les résidus, d’ouvrir un sillon sur un sol non labouré, de déposer les fertilisants et les semences, et les recouvrir à l’aide de roues tasseuses. 2.1 Semis direct; conservation et effi cience d’utilisation de l’eau Au Maroc, il est reconnu et suffi samment montré que les cultures pluviales subissent des conditions de stress plus au moins marquées tout le long de leur cycle de croissance et développement. Il en résulte, une production fl uctuante avec une tendance générale à la baisse. Le travail du sol était considéré, avant les années quatre vingt, comme un moyen pour améliorer le captage et l’économie de l’eau. Il fallait des années de recherche conduites dans la région de Chouia et Abda utilisant plusieurs combinaisons d’outils à des époques d’intervention variées (Bouzza, 1990) pour démontrer que ces croyances étaient controversées. La conservation de l’eau était bien possible par le non labour et le maintien d’une partie uploads/Societe et culture/ elgharras-semis-direct-agriculture-pluviale-conservation.pdf

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