*Mondher Kilani L'anthropologie de terrain et le terrain de l'anthropologie. Ob
*Mondher Kilani L'anthropologie de terrain et le terrain de l'anthropologie. Observation, description et textualisation en anthropologie In: R seaux, 1987, volume 5 n 27. pp. 39-78. Citer ce document / Cite this document : Kilani Mondher. L'anthropologie de terrain et le terrain de l'anthropologie. Observation, description et textualisation en anthropologie. In: R seaux, 1987, volume 5 n 27. pp. 39-78. doi : 10.3406/reso.1987.1321 http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/reso_0751- 7971_1987_num_5_27_1321 L'ANTHROPOLOGIE DE TERRAIN ET LE TERRAIN DE L'ANTHROPOLOGIE OBSERVATION, DESCRIPTION ET TEXTUALISATION EN ANTHROPOLOGIE MONDHER KILANI Mondher KILANI A para tre dans "travaux du centre de recherches s miologiques" Universit de Neuchatel L'ANTHROPOLOGIE DE TERRAIN ET LE TERRAIN DE L'ANTHROPOLOGIE . OBSERVATION, DESCRIPTION ET TEXTUALISATION EN ANTHROPOLOGIE MALINOWSKI ET LA "REVOLUTION" EN ANTHROPOLOGIE Dans son c l bre ouvrage Les Argonautes du Pacifique, Malinowski relevait un paradoxe : "L'ethnologie, disait-il, se trouve dans une situation la fois ridicule et d plorable, pour ne pas dire tragique, car l'heure o elle commence s'organiser, forger ses propres outils et tre en tat d'accomplir la t che qui est sienne, voil que le md aste srpia ur ansutre ."l eq(1u9e6l3 p:o r5t8e ). son tude dispara t avec une rapidit Comment interpr ter une telle inqui tude alors que nous sommes m me de constater, plus d'un demi-si cle plus tard, que non seulement l'anthropologie a fleuri comme discipline scientifique et acad mique mais que l'id al m thodologique et la cl ture de l'objet tels que les a pos s Malinowski furent justement l'origine d'un genre ethnographique qui a fait autorit pendant toutes ces d cennies ? D'o viendrait alors l'erreur d'appr ciation de Malinowski ? D'avoir identifi son propre d coupage de l'objet, la "communaut primitive" comme isol t culturel, la "r alit " empirique, est l'origine d'une illusion m thodologique qui n'en tait pas moins la condition fondatrice de l'anthropologie moderne. En effet, dans le m me mouvement ou il s'inqui tait de voir son objet en voie de dissolution alors qu'"il ne faisait que s'historiciser davantage" (Jamin 1986 : 15), Malinowski affirmait pleinement son id al scientifique, savoir : l'image d'un savant bien form qui p n tre dans une soci t homog ne, pr serv e de toute influence ext rieure (formant en quelque sorte un laboratoire), pour en devenir l'interpr te autoris . Ce faisant, Malinowski probl matisait une relation. Comme dans toute d marche de type scientifique, il proc dait un choix fixant les r gles de son observation et les principes analytiques qui devaient le relier T"autre", son objet. Mais parce qu'il voulait fonder la nouvelle anthropologie sur des bases inspir es des sciences naturelles, Malinowski allait confondre cette relation particuli re l'objet avec l'objet lui-m me. Dans son epistemologie "contemplative" qui met nettement en avant le visuel et fait de l'observation participante la norme ("planter sa tente au milieu du village"), Malinowski en vient en 41 effet une m thode inductiviste qui amalgame l'exp rience personnelle et l' tude m thodique de la r alit et transforme la th orie en une sorte de "contemplation instrumentale du r el" (Ulin 1984 : 19). Dans le paradigme inaugur 7 par Malinowski, l'argument de 1 'autor f rentialit (le "j'y tais") devient un des piliers de l'au torit de la nouvelle anthropologie. Travailler en "pr sence" de l'objet d' tude constitue ce dernier en un "pr sent ethnographique" d tach de toute paisseur historique et de toute d termination ext rieure. En annulant toute distance, le "temps pr sent" transforme l'objet ethnographique en un donn pr t tre observ et identifie le discours de l'anthropologue au langage de l'observation neutre. Cette nouvelle l gitimation de l'anthropologie sur les bases d'une "rh torique du regard" est comprendre dans le contexte historique et intellectuel du d but du vingti me si cle ou il s'agissait pour Malinowski de rompre explicitement avec les coles volutionnistes qui le pr c daient et plus particuli rement avec son ma tre J.G. Frazer. Frazer d'ailleurs, dans sa pr face aux Argonautes, avait pris acte de cette volont de renouvellement. N'avait- il pas en effet reconnu Malinowski la valeur du "travail ethnographique de plein air" qui associait (enfin ?) la "formation de th oricien" et 1 '"exp rience pratique" (1963 : 45) et permettait une appr ciation concr te, et non plus abstraite, de "la complexit de la nature humaine" (1963 : 47). Cependant, rien ne garantissait a priori la l gitimit de ce nouveau statut du chercheur de terrain comme meilleur interpr te des cultures exotiques. Bien avant Malinowski l'engagement personnel de l'ethnographe sur le terrain tait largement pratiqu . Rappelons ici la connaissance directe qu'avait L. Morgan, dans les ann es I860 d j , des cultures indiennes qui lui servaient de base pour ses grandes synth ses sur la famille et l'organisation politique, le r le primordial que jouait la recherche de terrain chez Boas partir de 1885, l'immersion prolong e de Cushing dans la culture Zuni entre 1880 et 1890, les nombreux et longs s jours effectu s partir de 1890 par Mooney chez les Indiens des Plaines, le survey culturel permanent qu'organisait le Bureau of American Ethnology d s 1879, et surtout le s jour de A.R. Radcliffe-Brown chez les Andaman entre 1906 et 1908, qui inaugura le premier, d s avant Malinowski, l'exigence de l'observation de terrain pour l'anthropologue professionnel. Sur le plan de la m thode, les principes que Malinowski a d velopp s dans son chapitre introductif 42 aux Argonautes ne consti tuaient pas non plus une innovation totale. Comme*le souligne Stocking ils n'offraient "pas beaucoup plus que ce que Rivers proposait dans Notes and Queries" (1983 : 105 . . Enfin sur le plan de la th orie, il tait admis jusque-l , que la r flexion et la construction de th ories g n rales sur l'humanit et les soci t s pouvaient tre effectu es " distance" par les anthropologues "de cabinet" sur la base des observations recueillies par les "hommes sur les lieux" (missionnaires, administrateurs, explorateurs, etc.). Il suffisait pour cela de s'entourer des pr cautions n cessaires pour contr ler la qualit des mat riaux rapport s et utilis s. C'est pour r pondre un tel souci de contr le que les anthropologues de "cabinet" avaient d'ailleurs pris l'habitude d' laborer des listes de questions qu'ils envoyaient ceux qui vivaient sur place parmi les peuples exotiques. Tel fut le cas des listes de questions tablies respectivement par Morgan et par Frazer. Tel fut galement le cas du questionnaire le plus syst matique jamais tabli, celui que l'Institut royal d'anthropologie a publi en 1874 sous le titre de Notes and Queries in Anthropology (Notes et questions en anthropologie) , et depuis r guli rement r dit Avant Malinowski le probl me de la validit des donn es l'origine des g n ralisations th oriques tait donc pos . Plus encore, certains anthropologues "de cabinet", comme le Fran ais M. Mauss, taient m me consid r s, et le sont toujours, comme de v ritables ma tres de . "anthropologie exp rimentale". M. Mauss, qui n'a jamais "fait de terrain", n'aura pas moins t l'instigateur des recherches ethnographiques sur le terrain qui allaient tre men es partir des ann es trente par les scientifiques fran ais. Th oricien "tourn vers le concret", Mauss attendait des donn es qu'elles r agissent sur la th orie. Son enseignement tendait " rendre ses tudiants capables d'observer et d'enregistrer les choses correctement" (Dumont 1972 : 9), de m me qu'il insistait sur l'analyse intellectuelle en tant qu'instrument n cessaire pour transformer les donn es observ es ou rapport es en faits ethnographiques bien tablis. Bref, en portant une attention particuli re la mani uploads/Societe et culture/ kilani.pdf
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- Publié le Jui 19, 2022
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