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HAL Id: halshs-00868605 https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00868605 Submitted on 1 Oct 2013 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. Le pouvoir des mythes dans la société française postmoderne. Des créatifs au social, du social au mythe. Françoise Piot-Tricoire To cite this version: Françoise Piot-Tricoire. Le pouvoir des mythes dans la société française postmoderne. Des créatifs au social, du social au mythe.. M@gm@, Orazio Maria Valastro, 2013, vol.11 (n°2), pp.1-7. ￿halshs- 00868605￿ Françoise Piot-Tricoire Université d’Angers Enseignant-chercheur en sociologie UMR 6590 ESO « Espaces et Sociétés » Le pouvoir des mythes dans la société française postmoderne. Des créatifs au social, du social au mythe. La fonction d’imagination est à la base du processus de la conscience et se révèle être la marque de l’esprit humain. Elle produit le contenu de l’imaginaire : symboles, archétypes, mythes. L’activité mythique en particulier est une nécessité anthropologique. C’est parce que l’homme sait qu’il va mourir, que son souci fondamental est de faire « passer le temps », de conjurer l’angoisse du temps qui passe et qui le rapproche inéluctablement de la mort, en amenant le temps sur le terrain où il sera le plus facilement combattu. L’activité mythique confère un sens à la vie, donne un but à son existence. L’homme est ainsi un fabricateur de dieux. Il crée une imagerie sacrée et symbolique qui se glisse sous les traits des discours d’artistes, des mouvements citoyens, des créatifs en tout genre. Le mythe tient à la fois du discours et du symbole. Le discours, constitué en texte, n’en possède pas moins un patron (pattern) mythique et symbolique. Ainsi le mythe, de par son activité symbolique, ne démontre pas. Il fonctionne par imprégnation, il martèle les consciences en répétant ses leçons pour les persuader. La méthodologie consiste à réunir et analyser un corpus de textes, d’images, de discours qui s’imposent dans la société française actuelle, issu d’acteurs qui constituent l’élite créative de la société : tendanceurs de mode, artistes, créatifs, mais aussi d’actions et de discours citoyens. Les artistes « matérialisent l’impalpable esprit environnant » (Maffesoli, 1990). Ainsi partagent-ils une même communauté d’esprits, de valeurs et d’imaginaires avec l’ensemble de la population et expriment par leur capacité créative les ruissellements imaginales de la société. Les leçons des mythes postmodernes Le mythe prométhéen, mythe dominant de la société industrielle moderne arrive à saturation et se fait submerger par les eaux du régime de l’image jusqu’alors refoulé. De nouveaux mythes font leur lit. Leurs ruissellements coulent dans la société comme autant de leçons socioculturelles, « mentalitaires » et imaginales. Les leçons socioculturelles La nature du lien social entre les individus est une base socioculturelle implicante. Durkheim, Tönnies, en ont fait un axe de réflexion privilégié pour penser les changements sociaux marquant le développement de la société moderne. Nous vivons actuellement une telle époque de mutation qui s’exprime dans tous les champs de l’activité humaine et en premier lieu dans le lien social. La multiplication de micros-groupes sociaux souvent mus par la seule volonté d’être ensemble pour partager des goûts communs (festivals, événements sportifs, flash-mob…) et accompagnés par les réseaux sociaux digitaux, est une caractéristique majeure de l’organisation sociale post-moderne. Ce phénomène de tribalisme (Maffesoli, 1988) est aussi défini par le caractère éphémère de ces groupes et un zapping relationnel. Loin des engagements et des relations contractuelles générés par les cadres de sociabilités classiques (syndicats, paroisse, famille…), les micros-groupes sociaux postmodernes trouvent leur raison d’être dans la liberté d’aller et de venir, de participer ou de se retirer, d’être de multiples groupes à la fois. L’individu construit une identité plurielle à partir d’identifications multiples. L’usage du pseudonyme et de l’avatar dans l’utilisation d’internet permettent de se confectionner et de vivre plusieurs identités en parallèle. De la même façon, la mode vestimentaire rend possible l’expression de différentes facettes de sa personnalité et de donner à voir différents personnages en fonction de ses envies et des contextes changeants de la vie sociale. L’époque moderne a fait prévaloir l’idée d’un individu libre parce qu’indépendant des autres et se suffisant à lui-même. Les attaches communautaires étaient dans l’idéologie républicaine une entrave à la liberté. La conception d’une identité « une et indivisible » fait place aujourd’hui à une identité syncrétique, « l’altérité est aujourd’hui vécue comme nécessaire pour devenir soi-même » (Hugon, 2010). Les micros-groupes sociaux auxquels les individus participent fournissent des cercles d’identification multiples où l’on tient des rôles sociaux. Les nouvelles technologies donnent la possibilité d’avancer masquer et de se retirer du jeu social, de maîtriser la distance avec les autres, ou de changer de cercle social comme bon nous semble. La conception moderne, selon laquelle vivre sous le regard des autres est un enfer, a vécu. Pour vivre heureux, il ne s’agit plus de vivre caché mais au contraire de se mettre en scène, de montrer des parties de soi jusqu’alors jugées intimes et demeurées cachées. Ce désir d’extimité (Tisseron, 2001) se manifeste sur les réseaux sociaux, blogs, émissions télévisuelles de téléréalité, émissions confessions dans lesquels l’individu se donne à voir sous ses multiples facettes, réelles ou imaginées, toujours mises en scène. L’enjeu est de partager, échanger, s’exprimer, même et surtout si l’on a rien à dire, afin d’attirer l’attention, susciter l’intérêt, former une communauté. Les caractéristiques communautaires idéales-typiques mises en évidence par Tönnies et Litt, soulignent la qualité charismatique du lien social. L’affectif et les sentiments président à la formation du lien qui fait vivre une « communauté d’esprit » animée par des relations vivantes, chaudes et proxémiques. Ainsi pour Tönnies, le rapport à l’autre communautaire résulte d’un « état primitif et naturel » (Tönnies, 1944). C’est au sein de la famille que s’exprime d’abord l’instinct du plaisir compris comme volonté de vivre, de se nourrir et de se reproduire. Le plaisir des sens est l’expression d’un vouloir-vivre profond et essentiel, issu d’une « volonté organique ». Ces relations communautaires caractéristiques des micros- groupes sociaux contemporains dessinent le phénomène social du tribalisme. Ces relations sont un horizon idéal pour bien des individus. Leur récurrence dans le temps évoque le mythe de la communauté. La prégnance sociale de ce mythe s’exprime non seulement dans l’organisation sociale de la société mais aussi dans le mode de vie où les plaisirs de la chaire et la valorisation des sens prennent une place considérable. L’esthétisation de l’existence ne fait aucun doute lorsque l’on observe l’importance accordée à la forme, plutôt qu’au fond, au packaging plus qu’au contenu, dans une société où l’on est que si l’on communique une image, un message. Le nombre de revues spécialisées en design, décoration d’intérieur, architecture, mode, lifestyle… continu à s’accroître. Le culte des apparences n’est désormais plus à démontrer. Un autre élément d’importance dans cette valorisation des sens est l’importance accordée à la chaire. Les émissions télévisuelles font la part belle ces dernières années au « top chef », « masterchef », au « dîner presque parfait », la littérature « cuisine et gastronomie » abonde, les chefs ouvrent aux ménagères leur cuisine pour des ateliers d’apprentissage de savoir-faire. Après le fast-food et la pause alimentaire forcée et bon marché, la prise en compte du plaisir semble resurgir comme motivation de l’acte alimentaire. Il est aussi support de convivialité et de divertissement médiatique. Le mythe de la communauté implique aussi des valeurs de partage et de solidarité. Des initiatives citoyennes ou associatives développent des actions de jardins partagés. A la différence des jardins ouvriers et des jardins familiaux, les jardins partagés ne sont pas le fruit d’une mise à disposition par la collectivité mais d’échanges entre particuliers. Le jardin partagé est un phénomène urbain qui implique toutes les catégories sociales et prend des formes différentes. L’expérience actuelle des jardins partagés à Nantes implique des personnes à la retraite possédant un jardin mais ne pouvant plus le cultiver et majoritairement des femmes à la recherche d’un jardin productif vivrier ou un carré de potager pour leur loisir. Dans la même veine, les systèmes d’échanges locaux, échanges de services non monétarisés, et des sites de co-recyclage, se développent dans un esprit de troc où l’on donne et récupère gratuitement des objets en tout genre. Le partage citoyen, entre particuliers, en dehors d’institutions ou de cadres formels se réactualise. Le contexte économique incite les ménages à faire des économies, le contexte social à sortir de l’isolement, le contexte culturel à pondérer la valeur individualiste. Les leçons mentalitaires et imaginales Un autre angle de vue est de s’intéresser aux valeurs de la société post-moderne. Celles-ci participent de la constellation symbolique qui mène à la lecture des mythes. Alors que le mythe de l’abondance, la conception d’un monde infini et de ressources uploads/Societe et culture/ le-pouvoir-des-mythes-dans-la-socia-ta-postmoderne-magma.pdf

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