m REVUE BIBLIQUE Typorrraphie Firmin-Didot et C". — Paris. NOUVELLE SERIE TREIZ
m REVUE BIBLIQUE Typorrraphie Firmin-Didot et C". — Paris. NOUVELLE SERIE TREIZIEME ANNEE TOME \III REVUE BIBLIQUE PUBLIEE PAR L'ECOLE PRATIQUE D'ÉTUDES BIBLIQUES ETAr.LIE AU COUVENT DOMINICAIN S \INT-ETIENNE DE JERUSALEM PARIS LIBRAIRIE VICTOR LECOFFRE J. GABALDA, ÉDITEUR RUE BONAPARTE, 90 1916 QIELQ[IES PROCÉDÉS LITTÉRATRES DE SAINT >[ATTIIIi:i] On connaît le but du premier évangéliste : montrer que Jésus est bien le Messie annoncé par les prophètes, qu'il a fondé le royaume promis au vrai Israël, et que, s'il n'a pas été reconnu par la majeure partie de la nation et par ses chefs, c'est qu'obstinément renfermés dans leurs préjugés et leur infidélilé aux avances divines, ils se sont exclus eux-mêmes de ce royaume, en laissant la place aux Gentils empressés d'y entrer. Pour développer cette thèse, et dans le milieu même où s'étaient passés les événements, il n'était pas besoin d'insister sur le détail des faits et sur leur enchaînement réel, ni de les replacer exactement dans les temps et les lieux de leur accomplis- sement. La plupart des premiers auditeurs de la parole apostolique, A Jérusalem et dans la Palestine, n'avaient-ils pas été témoins de ces faits qui avaient eu un tel retentissement par tout le pays? Dans un tel milieu, il importait davantage pour un évangile, écho fidèle de la première prédication, de présenter de préférence les enseigne- ments du Maître, et, afin d'en mieux faire saisir la portée, de les réunir sous certaines idées principales, sans trop se préoccuper des circonstances particulières de toutes les paroles. Cette absence de préoccupation vraiment historique se révèle au premier abord dans les grands discours et dans le groupement des faits miraculeux. Voyez les cinq grands discours qui forment comme cinq chapitres de la doctrine sur le royaume de Dieu : L'esprit du nouveau royaume et sa justice (ch. v-vii), l'apostolat du nouveau royaume (ch, x\ la description du royaume lui-même dans ses origines, ses conditions et ses progrès (ch. xiii), les relations des membres du nouveau royaume (ch. xviii), enfin la consommation du royaume et la fin de toutes clioses (ch. xxiv-xxvl. Chacun de ces discours, qui se terminent par une formule semblable de transition avec la suite de l'évangile, est construit d'après une même méthode. A un fond prin- cipal qui forme l'essentiel du discours et se rapporte à une situation (; HKVl r. illIiLIOli:. «Irtorminée, sont ajoutés d'autres matériaux liiés d'enseignements du .Maître, donnés en des temps et des lieux dillérents, mais se laissant plus ou moins étroitement ratlachei' par Tanalogie des idées. Ainsi dans le sermon sur la Montagne, l'évangéliste prétend bien donner un vrai discours de Jésus-Christ prononcé en (ialilée, discours dans lequel la justice intérieure et spirituelle du nouveau royaume est mise en opposition avec la justice extérieure et légale des pharisiens. Mais ;\ l'organisme primitif de ce discours il ajoute beaucoup d'élé- ments étrangers, auxquels saint Luc, plus historien, assigne dans la vie de .lésus-Christ une place différente, dans un contexte qui expli- (]uc mieux le sens précis des paroles. Le premier évang-éliste fait entrer dans le discours ces additions, sans indiquer qu'il les donne comme telles; mais le caractère morcelé de certains passages, leur lion assez lAche avec le fond du discours et surtout la comparaison avec saint Luc, nous font apparaître le procédé littéraire de l'auteur. Tout en donnant comme authentiques les paroles qu'il met dans la bouche du Sauveur, il ne prétend point que toutes ont été dites dans cette circonstance particulière : plusieurs ne viennent qu'à titre de complément, d'explication ou de développement des premières. il groupe les faits conmie les paroles : Ainsi les dix miracles, men- tionnés par saint Matthieu api'ès le sermon sur la Montagne dans ses chapitres viii et ix, sont réunis dans un dessein tout autre que la suite chronologique des événements. Le récit de saint Luc nous montre que cet ordre eût exig-é la répartition de ces miracles à des époques très diverses de la vie de Notre-Seigneur. D'ailleurs saint Matthieu n'a pas rattaché ces faits entre eux par des transitions ayant une valeur de précision historique (1). On ne le voit pas non plus s'arrê- ter d'ordinaire au détail des événements comme saint Marc ou saint Luc : il se liAte d'arriver, ou à la parole de Jésus comme à la chose essentielle qui dévoile le sens du fait, ou" à la prophétie qui rattache le fait cité à l'idée principale de son évangile. Avec de telles préoc- cupations la peinture détaillée des événements, leur place historique <lans la suite de la vie n'ont évidenmient qu'une importance secon- daire. (>es consitlérations i:éin lalrs sur la méthode (li(lacti(|ue, j>arlicu- lière ;\ noli'c auteur. e\pli(pieut (pichpu'S j)ni((''ilés |>arliculiers (juc (I Les fiirimili^s vaRUCs cmnnx; c/i cr linips-hi, nltirs. voici (pie, <'k-. soiil |iluliil < (tinme un ii lio do la |irA(lirntinii n|iiislnli<|iir |>riinitivc. dans l,i(|(i('llo on (oinnKMKail les f«its vn ro|«irlanl la pensée des ainliteurs a ri|>o(|iie ^irnérale de l.i vie pulilique de Jj'sus-Chrisl. MUELuLi'S im;o(.kih:s i.iïTi:fiAmi:s df. saint MViTiiiiiii. 7 nous ronconti'ons dans la composition de son évangile, et sur lesquels nous voudrions nous arrêter. C'est d'abord le pluriel mis volontiers à la place du singulier, plu- riel d'indétermination ou pluriel de catégorie. C'est aussi une sorte de condensation de plusieurs faits ou des détails d'un même fait, telle que leur ordre ou développement réel est négligé au profit d'un enseignement à mettre plus en relief. ^Quelquefois ces deux procédés sont unis ensemble. Voici quelques exemples. Il est certain qu'en bien des cas le pluriel a quelque chose de plus indéterminé que le singulier. Comparez, par exemple, dans le récit de la première tentation, la formule de saint Matthieu à celle de saint Luc. D'après le premier évangéliste (iv, 3 , le tentateur s'a- dresse ainsi à Jésus-Christ : Dis que ces pierres deviennent pains. L'expression de saint Luc (iv, 8) est certainement plus précise et plus pittoresque : Dis à cette pierre quelle devienne pain. De même dans les conseils sur la prière : « Si vous, qui êtes mé- chants, savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus votre Père céleste donnera-t-il à ceux qui le prient de bonnes choses, 2;xhx? » (Matth., VII, 11). L'expression est générale et assez vague. Celle de saint Luc : « une bonne disposition, un esprit droit et saint, 7:vcj;Aa y.yizy », est plus particulière et s'harmonise mieux avec la portée élevée de l'oraison dominicale, qui est le point de départ de ces développements sur la prière. Après le récit d'un éclatant miracle, saint Matthieu (ix, 8) fait cette remarque : « Les foules glorifiaient Dieu qui a donné une telle puis- sance aux hommes » : il n'a cependant en vue, dans le cas présent, que la puissance donnée à Jésus, au Fils de l'homme. C'est avec la même indétermination qu'il dit après la mort d'IIérode (11, 20) : « Ceux qui cherchaient la vie de l'enfant sont morts. » Il ne s'agit évidemment que de la mort d'Hérode seul. Un autre exemple du pluriel mis pour le singulier se rencontre probablement dans le récit du lestin de Béthanie (xxvi, 8). En voyant une femme répandre des parfums de grand prix sur la tête de Jésus, « les disciples dirent avec indignation : A quoi bon cette perte? On aurait pu vendre ce parfum très cher et en donner le prix aux pauvres (1) ». Saint Jean, qui nous rapporte le même fait (xii, 5), met dans la bouche de Judas cette réflexion : « Pourquoi n'a-t-on pas vendu (1) Le récit du second évangéliste (xiv, 4) est à peu de choses prés identif|ue. Cependant au lieu de la formule générale ttoàXoj, « très cher », pour le prix du parfum, il donne une appréciation précise : trois cents deniers. 8 HKVUE BIBLIQUE. ce parfum trois cents deniers pour les donner aux pauvres? « Et reconnaissant Je vrai motif de son apparent souci des indigents, il ajoute : <( Il dit cela, non par souci des pauvres, mais parce qu'il était voleur et qu'ayant la bourse, il dérobait ce qu'on y mettait. » Dans ce lécit le quatrième évangéliste est beaucoup plus précis que le pre- mier : il désigne le nom de la femme, Marie; le prix du parfum, trois cents deniers; l'auteur de la réflexion intéressée. Judas, le disci- ple habitué à compter, qui, d'un simple coup d'œil, a su apprécier la valeur du parfum. Eu regard, saint Matthieu parait bien imprécis; il se contente do formules générales. Pour concilier les deux récits, nombre de commentateurs ont pensé «juc Judas ayant exprimé à ses voisins de table le mécontentement que lui causait la profusion faite sous ses yeux, plusieurs autres disciples auraient fait écho à sa plainte. Saint Jean mentionnerait spécialement Judas comme étant l'instigateur de ces murmures, et .saint iMatlhieu comprendrait, sous le terme général les disciples, et celui qui prit la parole. Judas, et ceux qui conçurent en eu.x-mêmes du mécontentement de cette profusion, et le manifestèrent plus ou moins par leur attitude. Ce qui retient ces commentateurs uploads/s1/ ecole-pratique-d-x27-etudes-bibliques-revue-biblique-1892-volume-25.pdf
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- Publié le Mar 23, 2021
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