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RECHERCHE AVANCÉE (HTTP://RESSOURCES.IRCAM.FR/INDEX.PHP?ID=37)  FR EN Analyse de Traiettoria de Marco Stroppa par Vincent Tiffon (/analyses/authors/#Vincent%20Tiffon) Résumé Traiettoria (1982-1984) est une œuvre mixte, permettant la rencontre intime entre un piano et des sons électroniques réalisés par ordinateur. Avec cette œuvre emblématique du répertoire mixte, Marco Stroppa nous permet d'entrer à l'intérieur du son, par une double exploration : celle des sons de synthèse par des concepts instrumentaux, et inversement celle de l'univers instrumental par les concepts issus de la recherche en acoustique et de l'informatique musicale (la synthèse numérique par le logiciel Music V, dans ce cas précis). Pour permettre une interprétation en concert (comme une interprétation musicologique) à la hauteur des enjeux, Marco Stroppa invente également une notation spécifique (susceptible de rendre compte avec exactitude à la fois de la réalité sonore des sons de synthèse qu'il nomme "orchestre synthétique"), mais aussi des techniques d'écriture communes aux deux univers (à même d'expliciter un concept-clé au centre du processus compositionnel, qu'il nomme les "Organismes d'Information Musicale"). Sons de synthèse Tous les sons de synthèse des 3 pièces ont été : Réalisés au CSC (Centro di Sonologia Computazionale) de l'Université de Padoue (avec la collaboration de Graziano Tisato, Alvise Vidolin, Adriano Ambrosini), Générés par le logiciel Music (et Music 360), Mixés via le programme ICMS ("Interactive Computer Music System") de Graziano Tisato au CSC (Centro di Sonologia Computazionale) de l'Université de Padoue. Equipement technique (à l'époque de la création) Lecteur de bande magnétique Table de mixage 5 canaux d'amplification monophonique 2 microphones (multi-directionnels) pour le piano 7 haut-parleurs Equipement technique nécessaire (années 2000) Patch Max/msp (tous les sons sont mixés en stéréo), avec possibilité d'accorder la partie électronique au type d'accord du piano Table de mixage Microphones (2 ou plus) pour le piano Un dispositif de projection sonore avec 7 HP minimum (un dispositif de type acousmonium est recommandé) (/media/image/01_stroppa_traiettoria_analyse01.scr_1.png) (/media/image/01_stroppa_traiettoria_analyse01.scr_1.png) Schéma de disposition des instruments (à l'époque de la création) - extrait de la partition de Deviata, © Traiettoria (1982 - 1984, rev. 1988) By courtesy of Casa Ricordi. Plan de mixage (version de la création) Entrée : sons électroniques 1/2 Entrée : piano : 3/4 Sortie : canal 1 : HP 1 et 3 (sons électroniques, canal gauche) Sortie : canal 2 : HP 2 et 4 (sons électroniques, canal droit) Sortie : canal 3 : HP 5 (sons électroniques, canal droit et gauche) Sortie : canal 4 : HP 6 (piano, microphone 1) Sortie : canal 5 : HP 7 (piano, microphone 2) Analyse Introduction générale Eléments esthétiques En raison de l'accélération des progrès en termes de capacité de calcul des machines, la période des années 1980 est propice à la création d'œuvres mettant en jeu la synthèse sonore issue des acquis techniques et technologiques des années 1960-1970, notamment la synthèse directe en temps différé développée aux Bell Telephone Laboratories autour de Max Mathews (John Pierce et Jean-Claude Risset (/jean-claude-risset)), mais aussi la synthèse numérique par modulation de fréquence avec John Chowning (/john-chowning). L'édition du catalogue An Introductory Catalogue of Computer Synthesized Sounds en 1969 (CD WERGO 20332 (http://www.wergo.de/shop/en_UK/Audio_CDs/1000083/1660296/show,93269,h.html)) de Jean-Claude Risset montre par l'exemple la possibilité de "composer le son lui-même" (Risset, 1986, 1990), avec des outils progressivement plus ductiles. Si finalement peu de compositeurs, par défaut de compétence en informatique musicale, ont eu la possibilité d'exploiter le son de l'intérieur grâce aux ressources offertes notamment par les travaux et compositions de Jean-Claude Risset (cf. Mutations (/works/work/11501/), Contours (/works/work/11495/), Songes (/works/work/11505/)), Marco Stroppa peut apparaître comme le continuateur de cette logique, par ses recherches musicales développées en Italie au sein du CSC de l'Université de Padoue. Au même moment, le développement important des sciences cognitives et de la psychoacoustique fait que les conditions théoriques et techniques sont réunies pour permettre l'éclosion d'œuvres, plutôt que d'essais ou d'études comme c'était le cas jusqu'alors. La convergence du cadre théorique élargi (sciences cognitives, acoustique musicale, etc.) et des sessions de formation en l'informatique musicale à destination des compositeurs, font des années 1980 la décennie du basculement de la création musicale dans l'univers numérique selon une esthétique proche de ce que défend l'école spectrale, notamment par l'idée d'un continuum hauteur/harmonie/spectre. Notons que, dans la période incluant la composition de Traiettoria, Stroppa a une connaissance très fine des musiciens et compositions de cette "école" dite spectrale (Stroppa, 1985, p. 35-68). Le credo défendu par Pierre Boulez (/pierre-boulez) à la tête de l'Ircam, à savoir enrichir l'écriture instrumentale par les technologies numériques, est au cœur d'une œuvre comme Traiettoria. Mais l'informatique est ici au service de l'instrumental autant que l'inverse. Les deux sont pensés dans un même geste. Le choix de sons électroniques réalisés "en temps différé" (plutôt qu'en "temps réel" comme le préconise Boulez) est revendiqué comme le moyen d'atteindre cette "rencontre du 3e type" (Risset, 1988), symptomatique d'une musique mixte non ornementale. Si, par la suite, Stroppa ne s'interdira pas l'usage des technologies "temps réel", il restera fidèle à cette exigence d'équilibre entre deux univers (instrumental et électronique). Traiettoria correspond à une première phase dans l'œuvre de Stroppa qu'il qualifiera lui-même de "positiviste" (cf. Stroppa 2002 : la croyance selon laquelle l'informatique résoudra tous les problèmes. Stroppa n'est donc pas encore dans l'ouverture vers des catégories plus larges, c'est-à-dire des formes classiques de la musique savante occidentale aux cultures extra-européennes (cf. Ferrari (http://brahms.ircam.fr/composers/composer/3074/workcourse/#parcours), 2008, §. 7 et 9). Il serait hasardeux de déterminer les influences musicales de Stroppa pour une pièce quasi initiatique. Ce sont davantage les disciplines comme l'informatique fondamentale (la programmation structurée), l'acoustique et la psychoacoustique (les idées de seuils, d'effets de masque...) et les sciences cognitives qui sont le socle de son environnement intellectuel, en lien direct avec sa formation au CSC avec notamment Alvise Vidolin puis ses relations notamment avec McAdams et Wessel à l'Ircam. La psychoacoustique relève d'un véritable traité d'orchestration pour Marco Stroppa. Les étapes de la composition et leurs implications Rappelons qu'au début des années 1980, Stroppa est un jeune compositeur avec une solide formation en piano, composition, traitement du signal, acoustique, psychoacoustique et informatique musicale. Traiettoria est pensée initialement comme une œuvre destinée à l'univers unique des sons de piano : les traces pré-compositionnelles disponibles auprès du compositeur indiquent qu'à l'origine de Traiettoria, Stroppa avait en chantier trois études pour un projet (Tre studi per un progetto). Le projet cherchait non pas l'exploration d'improbables modes de jeu ou de formules pianistiques extrêmes, mais l'exploration du son dans sa dimension microscopique par le biais des sons du piano, mais à partir du piano seul, sans l'adjonction de sons de synthèse. Une telle problématique s'avérait difficile à résoudre par les seules ressources du piano. L'œuvre pour piano solo est abandonnée. C'est ainsi que les sons de synthèses sont convoqués pour résoudre cette insuffisance, et accroître les densités de résonances du piano, ses clusters, etc. A ce titre, Traiettoria s'inscrit d'emblée dans la continuité des grandes pièces mixtes du répertoire, à commencer par Kontakte (/works/work/12127/) de Stockhausen (/karlheinz-stockhausen). Marco Stroppa réalisera plus tard le projet initial (de Traiettoria) d'une exploration intime des sons via la seule ressource instrumentale, avec Miniature Estrose (1° livre (/works/work/12290/), 1991-2001 / 2° livre (/works/work/12294/), 2005) pour piano solo. Cela se traduira notamment par l'écriture d'un mini traité sur le contrôle de la résonance, prochainement publié (2010) par les éditions Ricordi. Les trois pièces sont composées à peu près chronologiquement dans des lieux spécifiques (Vérone, Paris, Cambridge), même si le tuilage dans la composition des 3 pièces est plus prononcé entre Dialoghi et Contrasti. En revanche, la partie de piano préexiste toujours à la partie électronique, davantage pour des raisons de contraintes techniques (réalisation informatique au CSC de Padoue, dans un temps limité) que pour des considérations spécifiquement compositionnelles et esthétiques. D'ailleurs, la réalisation des sons de synthèse par Music V et le mixage par le logiciel ICMS au CSC de l'université de Padoue a lieu dans les quelques semaines ou jours qui précèdent la création de chacune des 3 pièces. L'unité de Traiettoria est donnée par l'usage des sons de synthèse par un logiciel d'une unique famille (Music V, Music 360), et la progression dans la complexité des relations piano/sons de synthèse, au fur et à mesure que l'on avance dans les trois pièces. Description globale Les documents de genèse, les textes d'auto-analyse du compositeur (écrits sous l'impulsion notamment du "Groupe de réflexion de compositeurs" à l'Ircam à cette époque) et les textes plus théoriques écrits à l'issue de la création de la version révisée de Traiettoria (Stroppa 1989a, 1991) font émerger plusieurs grands axes et processus de composition, comme l'Intégration des concepts électroniques dans l'univers instrumental, la composition d'enveloppes artificielles, la pédale comme filtre, le continuum hauteur/harmonie/spectre, les organismes d'Information Musicale. Sur ces différentes bases, la présente analyse vise à retracer la pensée et les techniques utilisées par Marco Stroppa selon deux grands volets : 1. la mutation des matériaux induit de nouvelles formes : l'observation de l'approche exigeante de la synthèse sonore permettra de déterminer comment Stroppa adopte des techniques d'écriture communes articulées sur le principe des OIM. Ces uploads/s3/ stroppa.pdf

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