CONSEIL DE L’EUROPE COUNCIL OF EUROPE COUR EUROPÉENNE DES DROITS DE L’HOMME EUR

CONSEIL DE L’EUROPE COUNCIL OF EUROPE COUR EUROPÉENNE DES DROITS DE L’HOMME EUROPEAN COURT OF HUMAN RIGHTS COUR (CHAMBRE) AFFAIRE BOZANO c. FRANCE (Requête no 9990/82) ARRÊT STRASBOURG 18 décembre 1986 ARRÊT BOZANO c. FRANCE En l’affaire Bozano, La Cour européenne des Droits de l’Homme, constituée, conformément à l’article 43 (art. 43) de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales ("la Convention") et aux clauses pertinentes de son règlement, en une chambre composée des juges dont le nom suit: MM. R. RYSSDAL, président, J. CREMONA, J. PINHEIRO FARINHA, L.-E. PETTITI, Sir Vincent EVANS, MM. C. RUSSO, J. GERSING, ainsi que de MM. M.-A. EISSEN, greffier, et H. PETZOLD, greffier adjoint, Après en avoir délibéré en chambre du conseil les 28 juin et 2 décembre 1986, Rend l’arrêt que voici, adopté à cette dernière date: PROCEDURE 1. L’affaire a été déférée à la Cour par la Commission européenne des Droits de l’Homme ("la Commission") le 14 mars 1985, dans le délai de trois mois ouvert par les articles 32 par. 1 et 47 (art. 32-1, art. 47) de la Convention. A son origine se trouve une requête (no 9990/82) dirigée contre la République française et dont un ressortissant italien, M. Lorenzo Bozano, avait saisi la Commission le 30 mars 1982. 2. La demande de la Commission renvoie aux articles 44 et 48 (art. 44, art. 48) ainsi qu’à la déclaration française de reconnaissance de la juridiction obligatoire de la Cour (article 46) (art. 46). Elle a pour objet d’obtenir une décision sur le point de savoir si les faits de la cause révèlent, de la part de l’État défendeur, un manquement aux obligations qui découlent de l’article 5 par. 1 (art. 5-1). 3. En réponse à l’invitation prescrite à l’article 33 par. 3 d) du règlement, M. Bozano a exprimé le désir de participer à l’instance pendante devant la Cour et a désigné son conseil (article 30). Quant à lui, le gouvernement italien, avisé par le greffier de la possibilité d’intervenir dans la procédure (articles 48, alinéa b) (art. 48-b), de la Convention et 33 par. 3 b) du règlement), n’a pas manifesté l’intention de s’en prévaloir.  Note du greffier: L'affaire porte le n° 5/1985/91/138. Les deux premiers chiffres désignent son rang dans l'année d'introduction, les deux derniers sa place sur la liste des saisines de la Cour depuis l'origine et sur celle des requêtes initiales (à la Commission) correspondantes. 1 ARRÊT BOZANO c. FRANCE 4. La chambre de sept juges à constituer comprenait de plein droit M. L.-E. Pettiti, juge élu de nationalité française (article 43 de la Convention) (art. 43), et M. G. Wiarda, président de la Cour (article 21 par. 3 b) du règlement). Le 27 mars 1985, celui-ci en a désigné par tirage au sort les cinq autres membres, à savoir M. W. Ganshof van der Meersch, M. J. Pinheiro- Farinha, Sir Vincent Evans, M. C. Russo et M. J. Gersing, en présence du greffier (articles 43 in fine de la Convention et 21 par. 4 du règlement) (art. 43). 5. Par une lettre du 31 mai 1985 dont il a communiqué au greffier une copie, l’agent du gouvernement français ("le Gouvernement") a proposé au conseil du requérant la recherche d’un règlement amiable. Au début de novembre 1985, ledit conseil puis le ministère des Relations extérieures de la République française ont informé le greffier de l’échec des négociations qu’ils avaient menées à cette fin. 6. M. Wiarda avait assumé la présidence de la chambre en vertu de l’article 21 par. 5 du règlement, mais il l’a cédée ensuite à M. R. Ryssdal, élu entre temps président de la Cour, car son mandat de juge allait expirer le 20 janvier 1986. De son côté, M. Ganshof van der Meersch a été remplacé pour la même raison, à compter de l’entrée en fonctions de son successeur (21 février 1986), par M. J. Cremona, juge suppléant (articles 2 par. 3 et 22 par. 1). 7. M. Ryssdal a consulté par l’intermédiaire du greffier l’agent du Gouvernement, l’avocat du requérant et le délégué de la Commission au sujet de la nécessité d’une procédure écrite (article 37 par. 1). Le 10 janvier 1986, il a décidé que les deux premiers auraient chacun jusqu’au 10 février pour présenter des mémoires auxquels le troisième pourrait répondre par écrit dans les deux mois. Le mémoire du Gouvernement est arrivé le 13 février. Le conseil de M. Bozano a renoncé à en déposer un, mais il a fait parvenir le 24 mars, avec l’autorisation du président, les demandes de son client au titre de l’article 50 (art. 50) de la Convention. Quant aux observations écrites du délégué de la Commission, le greffe les a reçues le 4 avril. 8. Le même jour, le président a fixé au 21 avril la date d’ouverture de la procédure orale après avoir consulté agent du Gouvernement, délégué de la Commission et avocat du requérant par l’intermédiaire du greffier (article 38 du règlement). 9. Les débats se sont déroulés en public le jour dit, au Palais des Droits de l’Homme à Strasbourg. La Cour avait tenu immédiatement auparavant une réunion préparatoire. Ont comparu: - pour le Gouvernement M. G. GUILLAUME, directeur des affaires juridiques au ministère des Affaires étrangères, agent et conseil, Mlle C. CHANET et 2 ARRÊT BOZANO c. FRANCE M. R. ABRAHAM, de la direction des affaires juridiques du même ministère, conseillers, M. B. GENEVOIS, directeur des libertés publiques et des affaires juridiques au ministère de l’Intérieur, conseil, M. F. LOLOUM, de la direction des libertés publiques et des affaires juridiques du même ministère, conseiller; - pour la Commission M. G. TENEKIDES, délégué; - pour le requérant Me D. COHEN, Me J. VANSCHOOMBEEK, Me T. LÉVY, avocats. La Cour a entendu en leurs déclarations, ainsi qu’en leurs réponses à ses questions, M. Guillaume pour le Gouvernement, M. Tenekides pour la Commission, Mes Cohen et Lévy pour le requérant. 10. Les 10 et 21 avril 1986, le Gouvernement, la Commission et le requérant, selon le cas, ont produit plusieurs pièces tantôt à la demande du président, tantôt spontanément. EN FAIT 11. Le requérant, ressortissant italien né en 1945, se trouve actuellement incarcéré à la maison d’arrêt de Porto Azzurro, dans l’île d’Elbe (Italie). I. LES POURSUITES PÉNALES EN ITALIE 12. Arrêté par la police italienne le 9 mai 1971, relâché le 12 mais appréhendé derechef le 20, il fut accusé d’avoir enlevé à Gênes, le 6, une adolescente âgée de treize ans et de nationalité suisse, Milena Sutter, de l’avoir assassinée, d’en avoir dissimulé le cadavre et d’avoir essayé d’extorquer au père de la victime, un industriel, une rançon de 50.000.000 lires. On lui reprochait en outre de s’être livré à des actes obscènes et attentats à la pudeur avec violence sur la personne de quatre femmes. 13. Le 15 juin 1973, après plusieurs mois d’audiences marquées notamment par l’audition de 180 témoins, la cour d’assises de Gênes lui infligea, pour les faits concernant l’une des quatre femmes, une peine - couverte par la détention provisoire - de deux ans et quinze jours de réclusion. Elle l’acquitta en revanche des autres crimes, en particulier du rapt de Milena Sutter et de ses suites, au bénéfice du doute; il recouvra donc sa liberté. 14. Le parquet attaqua le jugement - long de 166 pages - devant la cour d’assises d’appel de Gênes. Les débats devaient commencer le 20 novembre 1974; il fallut pourtant les ajourner car la défense récusa le président qui, 3 ARRÊT BOZANO c. FRANCE d’après elle, avait manifesté en public sa conviction de la culpabilité de M. Bozano. Ils s’ouvrirent le 18 avril 1975, après le rejet de cette demande par la Cour de cassation, mais l’accusé en sollicita le renvoi: certificat médical à l’appui, il alléguait qu’une hospitalisation motivée par des coliques néphrétiques l’empêchait de comparaître. La cour passa outre et le déclara contumax. Là-dessus, la défense introduisit contre le président une nouvelle demande en récusation et, contre la cour d’assises d’appel, une requête en suspicion légitime; la Cour de cassation les repoussa le 28 avril. Le procès reprit alors devant la cour d’assises d’appel qui refusa d’entendre certains témoins à décharge. Estimant ne plus pouvoir remplir leur tâche dans de telles conditions, les principaux conseils de l’intéressé y renoncèrent et la défense ne fut plus assurée que par un seul avocat, constitué peu de temps auparavant. Le 22 mai 1975, la cour d’assises d’appel, statuant par contumace, condamna M. Bozano à la réclusion à vie (ergastolo) pour les crimes concernant Milena Sutter et à quatre ans de réclusion pour les autres; elle ne lui reconnut aucune circonstance atténuante. 15. Le 25 mars 1976, la Cour de cassation débouta le requérant du pourvoi formé par lui contre cet arrêt, sur quoi le parquet général de Gênes établit, le 30, un ordre d’incarcération et la police italienne diffusa, le surlendemain, un mandat d’arrêt international. II. LA PROCÉDURE D’EXTRADITION SUIVIE EN FRANCE 16. En effet, M. Bozano s’était réfugié en France; il séjourna uploads/S4/ affaire-bozano-c-france.pdf

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  • Publié le Mar 15, 2022
  • Catégorie Law / Droit
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