Droit du mariage dans la tradition musulmane Le mariage (arabe : zawaj) est l'a
Droit du mariage dans la tradition musulmane Le mariage (arabe : zawaj) est l'alliance d'un homme et d'une femme, dans le but de former une famille[1] et, sur le plan juridique, d'établir les alliances et les filiations lé- gitimes. Comme les autres religions monothéistes, l'islam réglemente cette institution, aussi bien dans les pra- tiques rituelles que dans le vécu au niveau des indivi- dus. De ce fait, une forte tradition existe aujourd'hui dans les aires culturelles où cette religion a étendu son in- fluence, ainsi qu'un droit spécifique, qui diverge cepen- dant selon les régions en fonction des coutumes locales et de la jurisprudence spécifique développée au cours du temps, qui diffère en particulier selon les écoles juri- diques (madhhab) et selon le rapport adopté vis-à-vis du droit musulman traditionnel (le Code du statut personnel tunisien de 1956 s’écarte par exemple de façon impor- tante de la tradition). 1 Histoire du mariage musul- man (Zawaj) et obligations des conjoints Suivant la tradition inventée au IIe siècle de l'hégire par des persans, la condition féminine en période préisla- mique (dite jahiliya en arabe), dominée par le patriarcat, était déplorable. Les nikâh nurfi, nikâh mut'a, nikah ijti- mah (polygamie) auraient été courants (bien que la po- lygamie aurait été, en réalité, rare, selon certains his- toriens [2]). Ces coutumes étaient liées à la propension voyageuse des Arabes de l'époque qui considéraient les besoins sexuels comme nécessaires et légitimes pour un homme. Dans la période pré-islamique, au décès de son mari, la femme passait à son héritier le plus proche, qui pouvait se marier avec elle ou la marier avec un autre (Co- ran, IV-19) [3] (voir Mariage arabe avant Mahomet). Les prescriptions du Coran ont alors rééquilibré les rapports hommes-femmes, en accordant notamment à la femme mariée une personnalité juridique distincte et séparée, et la dotant d'un patrimoine propre qu'elle est libre d'administrer (il n'y a pas de communauté de biens, mêmes meubles, dans le mariage musulman) [3]. Le Coran fixe des normes sur le mariage pour protéger la femme de toutes les « perversions » antérieures, no- tamment en interdisant certains mariages[4] consanguins ou non ; rend obligatoire la dot qui entre dans le patri- moine personnel de la femme (dans la période préis- lamique, la dot était attribuée aux parents [5]), recom- mande le douaire[4] ; reconnait la polygamie, toutefois li- mitée à quatre épouses ; mais donne un statut différent à l'homme[6], par exemple pour le divorce. Enfin, l'héritage, influencé par le régime patriarcal, favorise les proches masculins sur les proches féminins, tout en répondant à des règles complexes (Voir Droit musulman des succes- sions). La femme est libre de travailler si son mari l'y autorise et peut utiliser son pécule comme bon lui semble ; son mari n'a aucun droit sur son patrimoine personnel[3]. La femme peut, par contre, exiger du mari qu'il subvienne à l'entretien du ménage [3]. Quelle que soit la fortune de la femme, ces charges reposent sur le mari [3]. Seul le rite malékite prévoit une exception à cette règle, interdisant la femme de donner à autrui plus d'un tiers de ses biens sans l'autorisation de son mari [3]. L'homme a six obligations principales envers son épouse[7] : • le devoir de cohabitation ; • le devoir conjugal ; • le partage des nuits (en cas de polygamie, le maxi- mum étant de quatre femmes) ; • le devoir d'entretien (nafaka) ; • l’abstention de tous sévices ; • le maintien des relations de l'épouse avec sa famille. La femme a cinq obligations[7] : • l’obéissance envers son mari ; • l’habitation au domicile conjugal ; • la fidélité (ce principe n'a pas été codifié dans le droit positif contemporain des États musulmans, mis à part pour la Moudawana marocaine, qui faisait de la fidélité le premier des droits du mari. Toutefois, depuis la réforme du Code de la famille marocain de 2004, celui-ci prescrit une « fidélité mutuelle » [7]) ; • les soins du ménage (peuvent être également parta- gés avec l'homme, à l'instar de Mahomet qui aidait pour les corvées incluant les tâches ménagères, la couture, etc.) ; • l’autorisation maritale pour disposer par contrat (cette obligation ne résulte que du droit malékite classique, lorsque la femme veut donner plus d'un 1 2 5 TAHLIL, AL-TAYS AL-MUSTA’AR tiers de ses biens à un autre ; ces dispositions n'ont pas été reproduites dans le droit positif contempo- rain, et tous les codes d'Afrique du Nord posent a contrario le principe de pleine capacité de la femme mariée [7]). 2 La filiation et l'héritage Le mariage, pierre angulaire de la société selon la concep- tion du droit musulman, détermine la filiation légitime, ainsi que le droit des successions. Tout enfant né de rela- tion extra-maritale n'est ainsi pas reconnu, conduisant à des situations difficiles (certains pays, comme la Tunisie, ont rompu avec cette tradition : voir filiation en Tunisie). De même, l'adoption n'est pas reconnue, le régime de la kafala la remplaçant (l'adopté ne reçoit pas le nom de son adoptant). Selon les écoles juridiques, la durée présumée de la gros- sesse peut être plus ou moins longue : cette fiction juri- dique, dite de l'« enfant endormi, » permet de contour- ner l'institution d'enfants naturels dans des conditions li- mites (père en voyage durable, après un divorce, etc.). Ainsi, les hanafites considèrent que la grossesse peut du- rer deux ans ; les chaféites et les hanbalites quatre ans, et les malékites de quatre à cinq ans [8]. 3 Cérémonie du mariage Les traditions peuvent varier d'un pays à l'autre. Par exemple, l'homme et la femme qui vont se marier ex- priment, devant les parents des mariés et au moins deux témoins, leur vœu de vivre comme mari et femme. Si les parents de l'un des mariés sont décédés, un représentant sera choisi par l'époux ou l'épouse. L'imam, ou n'importe quel homme choisi pour sa piété, sera rencontré un mois avant la cérémonie, mais cette rencontre n'est pas une né- cessité. Le mariage peut être célébré à la mosquée appe- lée “fâtiha”, dans une mairie (mariage civil) ou au domi- cile de l'un des futurs mariés, ou de leurs parents ce qui est le cas le plus fréquent. Ces deux personnes se seront également, au préalable, mises d'accord sur un montant précis (douaire, « mahr »), que le mari devra donner à sa femme. L'usage veut que le douaire soit évoqué oralement lors de la prononciation des vœux de mariage entre les deux personnes. Par le douaire, l'homme témoigne de son affection pour la femme avec qui il se marie (c'est un présent) ; il témoigne aussi de son engagement dans cette relation (qui n'est pas temporaire mais perpétuelle) ; enfin il montre, en donnant ce présent, qu'il va, conformément, continuer à dépenser de ses biens pour subvenir aux besoins de la femme qu'il épouse. Le responsable de la femme marie l'homme et la femme en leur demandant à chacun s’ils sont d'accord pour vivre ensemble comme mari et femme, rappelle les éventuelles conditions du contrat, conclu avec toutes les parties vou- lues, etc. Ou bien les deux personnes elles-mêmes font verbalement vœux d'accepter de vivre ensemble comme mari et femme, avec l'accord du responsable. 4 Mariages spécifiques Outre le mariage classique, certaines écoles juridiques admettent d'autres formes, spécifiques, de mariage. En outre, le contrat de mariage peut stipuler un ensemble de clauses spécifiques (l'homme peut, par exemple, aban- donner le droit de répudier sa femme, et accorder à sa femme celui de se répudier elle-même, mettant ainsi fin au mariage sans passer devant un juge, etc.). 5 Tahlil, al-tays al-musta’ar Ce type de mariage signifie mariage visant à rendre licite une femme divorcée car le Coran interdit au mari de re- prendre sa femme répudiée avant qu'elle n'ait été mariée avec un autre et que ce dernier mariage n'ait été dissout (2 :230). Ceci vise à le faire réfléchir avant de répudier. Les pays arabes ont adopté dans leurs lois cette norme, à l'exception de la Tunisie. En Égypte, le code de Qadri Pacha dit : “Le mari qui aura répudié définitivement ou trois fois sa femme libre ne pourra la reprendre qu'après qu'elle aura été légitimement mariée et que le second mari l'aura répudiée à son tour ou sera décédé après la consom- mation du mariage, et qu'elle aura laissé écouler le délai prescrit pour la retraite” (article 28). Une norme similaire se retrouve dans les codes de la famille du monde arabe. Pour qu'une femme répudiée soit licite à son mari, il faut qu’il y ait mariage et des relations sexuelles, sans néces- sairement y avoir d'éjaculation. Un coïtus interruptus suf- firait et le mariage doit être fait avec un musulman, même si la femme ne l’est pas. Ainsi, si un musulman répudie une chrétienne, et que cette dernière épouse un chrétien qui divorce à son tour, la femme ne devient pas pour autant licite au premier. D'autre part, le deuxième mariage doit être valide pour que le mariage suivant uploads/S4/ droit-du-mariage-dans-la-tradition-musulmane.pdf
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- Publié le Nov 30, 2022
- Catégorie Law / Droit
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