1 1 DROIT INTERNATIONAL PRIVE LECON INTRODUCTIVE I / L’OBJET DU DROIT INTERNATI
1 1 DROIT INTERNATIONAL PRIVE LECON INTRODUCTIVE I / L’OBJET DU DROIT INTERNATIONAL PRIVE : LA DIVERSITE DES ORDRES JURIDIQUES Un ordre juridique est l’ensemble des normes, des principes et des notions juridiques applicables à l’intérieur d’une société ou d’une communauté humaine (par exemple, l’’ordre juridique français est le droit de l’Etat français). Il peut y avoir des ordres juridiques supranationaux, comme dans le cadre de l’Union Européenne. De même, au sein d’un Etat, il peut y avoir plusieurs ordres juridiques, comme dans le cas des Etats Unis et de l’Allemagne. La lex mercatoria constitue aussi dans un sens un ordre juridique. Les ordres juridiques sont eux même organisés en Systèmes juridiques. Le premier est romano- juridique, le deuxième est celui de la common law, mais on trouve aussi les systèmes orientaux, les systèmes scandinaves et les systèmes coutumiers. Ces ordres juridiques ne peuvent pas être envisagés de façon indépendante : il va y avoir des interactions entre eux. L’objet du DIP est d’étudier comment vont être articulées les relations entre les différents ordres juridiques. Par exemple, il va s’agir d’étudier les relations entre deux acteurs issus de systèmes juridiques différents. Le DIP répond à des questions se regroupant autour de 4 grands blocs : -le conflit de lois : quelle est la loi applicable ? -le conflit de juridictions : quelle est la juridiction compétente ? On rattache à cette notion le problème de la reconnaissance des jugements étrangers. -le droit de la nationalité -la condition des étrangers en France. Dans ce cours, seul le conflit de lois sera étudié. Les arrêts les plus célèbres en matière de DIP sont les arrêts du 15 mai 1963 de la Cour de Cassation, Epoux Patino. Cette affaire relève des quatre blocs. Dans cette espèce, un diplomate bolivien, M. Patino en poste à Madrid, a épousé une femme de nationalité espagnole. Le mariage a été célébré à Madrid. En vertu du droit bolivien, l’épouse acquiert de par le mariage la nationalité bolivienne, et les époux sont soumis au régime de la séparation de biens bolivien. Ils s’installent ensuite successivement à Paris, puis à New-York, ou Madame reste alors que son mari part en poste à Londres. Elle demande le divorce à New-York, mais se désiste. Le mari, qui a depuis été muté à Paris, vexé, demande à Paris la séparation de corps, puis se désiste, car il réalise que le droit français n’est pas suffisamment protecteur de ses intérêts. Finalement, les époux obtiennent le divorce au Mexique. Le divorce est prononcé aux torts exclusifs de Madame. Madame saisit la juridiction française postérieurement en vue de l’annulation du contrat de mariage, et estimant la décision mexicaine nulle et non avenue, en vue de la prononciation de la séparation de corps. Le juge français saisi est-il compétent ? S’il l’est, quelle loi va-t-il appliquer ? La demande de l’épouse en séparation de corps est-elle recevable alors que le jugement mexicain a prononcé le divorce ? Quel est l’effet en France du jugement mexicain ? Mme Patino étant devenue bolivienne par le mariage, quelle est l’impact de cette nationalité étrangère sur la procédure ? Peut-elle saisir un tribunal français en étant bolivienne ? On va aboutir à la solution selon laquelle un juge français peut être amené à trancher un litige en vertu d’une loi étrangère. Le DIP est un droit spécial, applicable aux personnes privées, impliquées dans des relations juridiques internationales. C’est un droit spécial car il ne traite 2 2 DROIT INTERNATIONAL PRIVE que de l’aspect international du litige. Le droit international privé n’est-il qu’une matière de droit privé, ou s’agit-il d’une matière hybride ? Il ne faut pas omettre le droit public, qui a tout de même sa place dans la matière. Pour utiliser un droit étranger, il faut à priori que la relation entre les particuliers présente des éléments d’extranéité. On ne pourrait donc appliquer le DIP que si la relation est internationale. Le problème est qu’en pratique la qualification de la relation en relation internationale n’est pas toujours aisée. En effet, il y a deux façons classiques d’apprécier le caractère international : une appréciation subjective ou une appréciation objective. Une relation est objectivement internationale lorsqu’elle présente des points de contacts avec plusieurs ordres juridiques de par ses éléments intrinsèques. Elle sera subjectivement internationale lorsqu’elle sera devenue internationale à travers l’un de ses éléments secondaires (c'est-à-dire qu’elle sera nationale aux yeux d’un juge, et internationale aux yeux d’un autre). C’est par exemple le cas lorsque deux époux italiens domiciliés à Lyon demandent le divorce au juge français : cette relation est subjectivement internationale. En effet, elle sera internationale aux yeux du juge français qui aura à trancher le divorce de deux époux soumis à la loi italienne. En revanche, aux yeux d’un juge italien, la situation ne sera pas internationale. Le fait que les deux époux soient domiciliés à Lyon n’aura aucun impact pour lui. En matière de relation subjectivement internationale, est-on réellement face à un problème de conflit ? Le DIP est-il un droit international ? Il y a deux écoles. L’école des universalistes aimerait que le DIP soit un véritable droit international et recherche des solutions spécifiques dégagées par la communauté internationale de juristes. A l’inverse, les particularistes, dont le plus célèbre est le juriste français Bartin, pensent que « le DIP n’a aucune dimension internationale puisque pour eux il ne s’agit que de la projection du droit interne sur la scène internationale ». II / LA FINALITE DU DROIT INTERNATIONAL PRIVE : LA GESTION DE LA DIVERSITE DES ORDRES JURIDIQUES Selon Phocion Francescakis (1910-1992), le DIP est un instrument de gestion de la diversité des droits. Tout l’enjeu du débat est de déterminer la méthode pour gérer cette diversité. Théoriquement, trois méthodes sont envisageables ; deux sont indirectes, et une directe. -La méthode directe n’est pas propre au DIP. Elle est commune à l’ensemble des disciplines du droit. Il ne s’agit pas de choisir une règle, mais de créer des règles substantielles. Ainsi, dès lors qu’un juge sera confronté à un problème de divorce qui présentera un caractère international, il ne choisira pas entre lois étatiques en présence mais appliquera des règles substantielles créées pour trancher ce type de litige. En pratique, ces règles substantielles seraient supranationales, contenues dans les conventions internationales par exemple. Cette méthode est pratique, et évite de trancher un conflit. Toutefois, la méthode ne peut pas être exclusive, elle est conditionnée à l’existence de règles substantielles. On parle de méthode directe car les règles substantielles permettent de trancher le litige dans son intégralité ; on nie l’existence du conflit de lois. A l’inverse, la méthode indirecte n’est là que pour aider à la détermination de la loi applicable au litige, c’est ensuite la loi déterminée par ce biais qui prend le relai. La méthode indirecte se subdivise entre deux méthodes possibles. 3 3 DROIT INTERNATIONAL PRIVE -La première sous-méthode est dite « territoriale », car elle utilise le principe de territorialité. Cette méthode nie l’aspect international et considère le litige comme purement interne. Cette méthode est ancienne : elle était appliquée en France à l’époque féodale et aboutissait systématiquement à l’application du droit français. Celle-ci n’est pas aujourd’hui totalement abandonnée. On en trouve trace notamment en droit de la nationalité, mais aussi dans le cadre des lois de police. -La deuxième méthode indirecte est la plus souvent appliquée : on parle de méthode conflictuelle. On utilise des règles de conflits. Contrairement à la méthode territoriale, on part ici du principe qu’un juge français confronté à un litige présentant un caractère international ne peut pas décider qu’il va se fier à son propre droit (lex fori ou loi du for = droit du juge). Il va devoir faire un choix, au niveau de la juridiction, mais aussi de la loi applicable. a/ LA PRESENTATION DE LA REGLE CONFLICTUELLE : LE CHOIX D’UNE NORME ETATIQUE La méthode conflictuelle permet de résoudre un problème de compétence, au niveau des juridictions, des lois applicables… Elle ne constitue pas une norme matérielle, elle ne traite pas de la substance du litige. Ce système ne sert qu’à désigner la norme qui sera appliquée par la juridiction compétente. Parfois, cette méthode peut poser problème. En effet, chaque Etat a son propre système de conflit de lois. Le juge doit-il alors choisir le système de conflit de lois qu’il va appliquer ? Pour éviter cette situation, on a posé le principe selon lequel le juge saisi d’un litige va toujours appliquer son propre système de conflit de lois, sauf en cas particuliers. Les cas particuliers sont au nombre de deux : c’est l’hypothèse du conflit négatif et la théorie du renvoi. En matière de contrats internationaux, les parties peuvent choisir la loi applicable à leur contrat. Cette notion pose une question d’ordre politique : la méthode conflictuelle favorise-t-elle une concurrence (au sens commercial) entre les ordres juridiques ? Aujourd’hui, on se rend compte que les normes juridiques sont des marchandises comme les autres… Les acteurs choisissent la plus efficace, la plus simple…N’aboutit-on uploads/S4/ droit-international-prive 17 .pdf
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- Publié le Sep 05, 2022
- Catégorie Law / Droit
- Langue French
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