Remerciez-le!

Remerciez @Admin pour avoir partagé cet document gratuitement, de la manière la plus simple, en partageant sur les réseaux sociaux.

Louis Gernet Jeux et Droit (remarques sur le XXIIIe chant de l'Iliade) In: Comp

Louis Gernet Jeux et Droit (remarques sur le XXIIIe chant de l'Iliade) In: Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 91e année, N. 4, 1947. pp. 572- 574. Citer ce document / Cite this document : Gernet Louis. Jeux et Droit (remarques sur le XXIIIe chant de l'Iliade). In: Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 91e année, N. 4, 1947. pp. 572-574. http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/crai_0065-0536_1947_num_91_4_78178 572 COMPTES RENDUS DE L'ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS M. Gintas communique une note sur les fouilles puniques à Carthage. MM. William Marçais et Albert Grenier soulignent l'intérêt et la précision des méthodes de M. Cintas ainsi que les résul tats obtenus. M. Jérôme Carcopino se déclare d'accord avec M. Gintas pour ses conclusions chronologiques. COMMUNICATION JEUX ET DROIT (remarques sur le xxine chant de l' Iliade). M. de Visscher a observé (Et. dedr. rom.: 3o3 sq.) quer dans un épisode des Jeux funèbres en l'honneur d'Anchiser au livre V de Y Enéide (v. 360 sq.), Virgile emploie un vocabulaire juridique d'ailleurs parfaitement adapté à la scène : car la scène est comparable à un moment de la pro cédure, celui où. l'objet revendiqué, en l'absence de contes tation in iure, est adjugé au plaideur par le magistrat (d'uctio iussu praetoris). En prolongeant cette observation, on peut se demander si les jeux, d'une manière générale, ne comportent pas des situations et des attitudes qui pourraient les faire rappro cher du droit. L'homonymie du grec àywv (à la fois compétition dans les jeux et contestation en justice) invite à cette recherche qui se limitera ici aux procédés d'acqui sition et de revendication. Il convient de faire porter l'étude dans le texte le plus ancien, le XXIIIe chant de Ylliade qui contient les Jeux funèbres en l'honneur de Patrocle. On y remarque tout de suite que l'appropriation des récompenses donne lieu à des actes et gestes auxquels, à en juger par l'insistance avec laquelle ils sont relatés, une signification particulière doit s'attacher. Les prix sont JEUX ET DROIT 573 « emmenés » ou « emportés » avec une publicité qui paraît enconsacrer l'acquisition. Etils sontd'abord saisis, appréhen dés par le vainqueur qui les « ramasse » (àstpeiv) — car ils ont été déposés dans le cercle intérieur de l'àyaiv — et dont il est dit plusieurs fois, expressément, qu'il « met la main dessus ». La fonction de ce g-este se définit par opposition à un autre qui apparaît aussi à maintes reprises dans le même contexte, mais dans d'autres conditions : le geste de recevoir et, corrélativement, celui de « mettre dans la main ». Il n'est point question de celui-ci pour un vainqueur qual ifié par sa victoire (et qui saisit l'objet par un acte per sonnel), mais seulement pour un donataire (qui peut être un concurrent malchanceux que le président des jeux entend dédommager par une générosité gratuite). Le geste de la mainmise comme signifiant l'acquisition est bien connu dans les droits archaïques. Un cas ostensif est celui de la mancipatio romaine où la formule pronon cée par l'acquéreur manu tenens indique seulement la prise de possession : ce qui suppose que la chose est considérée comme res nullius et, en tant que telle, susceptible d'« occu pation ». La même notion de la propriété apparaît dans les jeux où elle est symbolisée par la saisie des prix « dépo sés » — res nullius par excellence. Mais il y a un autre élément à considérer. Dans la cou tume de la distribution du butin, on voit qu'il y a conces sion expresse du groupe — l'acquisition s'opérant d'ailleurs aussi sur des biens qui ont été « déposés » in médium. Dans les jeux, où l'intervention active de la société n'a pas lieu de se produire normalement, on constate du moins qu'il y a confirmation, homologation : par sa présence même, l'assemblée confère une vertu aux actes quasi formalistes d'appréhension. Les deux éléments qu'on observe ici, ce sont ceux qu'on observe sous des formes similaires dans les actes juridiques les plus anciens, comme constitutifs du droit. 574 COMPTES RENDUS DE L'ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS L'affinité entre les jeux et le droit s'atteste directement par les contestations proprement judiciaires dont les jeux peuvent être l'occasion. La double scène judiciaire du XXIIIe chant n'a pas à être analysée ici ; mais elle nous fait voir — par exemple dans le rituel du serment que dicte Ménélas à son adversaire — une continuité entre la coutume agonistique et la coutume procédurale. Au terme, il n'est pas interdit de poser à nouveau le problème des origines de la procédure : si, comme on le reconnaît aujourd'hui, la procédure n'est pas issue de la «justice privée », c'est-à-dire delà violence anarchique, on est amené à en rechercher les antécédents dans des acti vités sociales encore étrangères au droit proprement dit, et notamment dans celles qui s'ordonnent à des moments privilégiés de vie collective : les jeux peuvent être un des milieux où se sont définies le plus anciennement les notions relatives à l'acquisition et à la défense du droit individuel. LIVRES OFFERTS M. Alfred Merlin a la parole pour un hommage : « J'ai l'honneur d'offrir à l'Académie, de la part de l'auteur M. Gil bert Picard, deux brochures : « L'une, extraite des Mélanges de V École française de Rome, 1941- 1946, est consacrée à une mosaïque trouvée à Elles, dans la Tunisie centrale ; le tableau principal montre le couronnement de Vénus par deux Ce'ntauresses affrontées. M. Picard fait une élude détaillée de ce pavement au point de vue artistique et met en relief son carac tère prophylactique. « L'autre, tirée des Mémoires de la Société archéologique du Midi de la France, XXI, traite des trophées de Saint-Bertrand de Commin- ges. L'auteur en présente la reconstitution minutieuse, montre qu'ils ont dû être érigés en 25 av. J.-C. en souvenir d'Actiumetpour com mémorer une double victoire sur l'Aquitaine et les Cantabres ; en terminant, il en fait ressortir l'importance dans l'évolution de l'art triomphal. » uploads/S4/ gernet-l-jeux-et-droits-remarques-sur-le-chant-xxiiie-de-l-x27-iliade 2 .pdf