CONSEIL D’ETAT statuant au contentieux Nos 450893, 451038 __________ ASSOCIATIO
CONSEIL D’ETAT statuant au contentieux Nos 450893, 451038 __________ ASSOCIATION CIVITAS ASSOCIATION VIA LA VOIE DU PEUPLE __________ Ordonnance du 29 mars 2021 RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS LE JUGE DES RÉFÉRÉS Vu la procédure suivante : I. Sous le n° 450893, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 21 et 26 mars 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, l’association Civitas demande au juge des référés du Conseil d’Etat, statuant sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative : Nos 450893, 451038 2 1°) d’ordonner toutes mesures utiles afin de faire cesser l’atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d’exercice du culte ; 2°) d’ordonner au Premier ministre de rajouter le motif « se rendre dans un lieu de culte » dans les exceptions prévues à l’article 51 du décret n° 2020-1262 du 16 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire ; 3°) d’ordonner de permettre aux catholiques de se rendre dans un lieu de culte après 19 heures pendant la semaine sainte ; 4°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - sa requête est recevable ; - la condition d’urgence est remplie dès lors que le décret instaurant la mesure de couvre-feu contestée est entré en vigueur fin janvier et ce, pour une durée indéterminée ; - il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté de culte qui a pour composante essentielle le droit de participer collectivement à des cérémonies, en particulier dans les lieux de cultes ; - la mesure de couvre-feu contestée porte une atteinte grave à la liberté de culte en empêchant toute personne de se rendre à la messe après sa journée de travail, ce qui prive certains catholiques travaillant le week-end d’avoir accès à la messe et aux catholiques d’assister aux offices organisés en soirée lors de la semaine sainte, notamment les offices du jeudi, du vendredi saint et de la veillée pascale ; - la mesure de couvre-feu contestée n’est ni adaptée, ni nécessaire, ni proportionnée dès lors, d’une part, qu’un protocole sanitaire strict a été mis en œuvre, qu’il n’est pas démontré que l’interdiction des cérémonies religieuses après 19 heures aurait un impact sur la propagation de l’épidémie et que les églises seraient des potentiels clusters. Par un mémoire en défense, enregistré le 25 mars 2021, le ministre de l’intérieur conclut au rejet de la requête. Il soutient que la condition d’urgence n’est pas satisfaite et qu’il n’est porté aucune atteinte grave et manifestement illégale aux liberté fondamentales invoquées. La requête a été communiquée au Premier ministre et au ministre des solidarités et de la santé qui n’ont pas produit d’observations. II. Sous le n° 451038, par une requête, enregistrée le 24 mars 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, l’association VIA La Voie du Peuple demande au juge des référés du Conseil d’Etat, statuant sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative : Nos 450893, 451038 3 1°) d’ordonner la suspension de l’exécution du II du 6° de l’article 4 du décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020, modifié par le décret n° 2021-296 du 19 mars 2021, prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire en ce qu’il ne permet pas aux fidèles de se rendre aux cérémonies de la fête de Pâques après le couvre-feu ; 2°) d’ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde de la liberté fondamentale de culte ; 3°) d’ordonner, à titre subsidiaire, au gouvernement d’adopter sous 24 heures les dispositions et mesures provisoires proportionnées éventuellement nécessaires pour permettre aux fidèles de se rendre aux cérémonies de Pâques après le couvre-feu dans le respect des recommandations et normes sanitaires nécessaires à la santé publique et mises en œuvre sous la seule responsabilité des propriétaires et affectataires des édifices culturels ; 4°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - elle justifie d’un intérêt pour agir ; - la condition d’urgence est remplie dès lors que le décret contesté produit des effets pour une durée maximale d’un mois et que ces mesures ont un caractère exceptionnel et irréversible et ont été prises sans consultation du Parlement ; - il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté de culte qui est une liberté fondamentale ; - le décret contesté porte une atteinte grave à la liberté de culte en empêchant les fidèles de se rendre aux offices de la semaine sainte après le couvre-feu, empêchant les personnes qui travaillent de se rendre aux offices du jeudi saint et du vendredi saint et en empêchant la veillée pascale qui ne peut être célébrée que le soir ; - le décret contesté porte une atteinte disproportionnée à la liberté de culte dès lors, d’une part, qu’il n’est pas établi que les fidèles sont plus exposés à un risque de contagion à la Covid-19 après 19 heures et, d’autre part, que des dérogations avaient été accordées pour la messe de minuit le 24 décembre 2020 n’ayant donné lieu à aucun cluster. Par un mémoire en défense, enregistré le 25 mars 2021, le ministre de l’intérieur conclut au rejet de la requête. Il soutient que la condition d’urgence n’est pas satisfaite et qu’il n’est porté aucune atteinte grave et manifestement illégale aux liberté fondamentales invoquées. La requête a été communiquée au Premier ministre et au ministre des solidarités et de la santé qui n’ont pas produit d’observations. Nos 450893, 451038 4 Vu les autres pièces des dossiers ; Vu : - la Constitution, notamment son Préambule ; - la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; - la loi du 18 germinal an X relative à l’organisation des cultes ; - la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l’Etat ; - la loi du 2 janvier 1907 concernant l’exercice public des cultes ; - la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ; - l’ordonnance du 15 septembre 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ; - le code de la santé publique ; - la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ; - la loi n°°2021-160 du 15 février 2021 ; - le décret n° 2020-1257 du 14 octobre 2020 ; - le code de justice administrative ; Après avoir convoqué à une audience publique, d’une part, l’association Civitas et l’association VIA La Voie du Peuple, et, d’autre part, le Premier ministre et le ministre de l’intérieur ; Ont été entendus à l’audience publique du 26 mars 2021, à 15 heures : - Me de La Burgade, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, avocat de l’association VIA La Voie du Peuple ; - le représentant de l’association VIA La Voie du Peuple ; - le représentant de l’association Civitas ; - les représentantes du ministre de l’intérieur ; à l’issue de laquelle le juge des référés a clos l’instruction. Vu la note en délibéré, présentée le 26 mars 2021, par l’association Civitas ; Nos 450893, 451038 5 Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l’article L. 521-2 du code de justice administrative : « Saisi d’une demande en ce sens justifiée par l’urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public aurait porté, dans l’exercice d’un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures ». 2. Les requêtes visées ci-dessus, qui sont présentées en application de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, doivent être regardées comme dirigées contre les dispositions de l’article 4 du décret n° 2020-1230 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire. La requête présentée par l’association Civitas demande, à titre principal, au juge des référés du Conseil d’ordonner qu’une dérogation permanente au couvre-feu instauré de 19 heures à 6 heures du matin soit prévue pour se rendre dans un lieu de culte et, à titre subsidiaire, d’ordonner cette dérogation à titre temporaire pendant la semaine de Pâques. La requête présentée par l’association VIA La Voie du Peuple demande au juge des référés du Conseil d’Etat de suspendre l’exécution de l’article 4 du décret du 16 octobre 2020 en tant uploads/S4/ ordonnance-du-conseil-d-x27-etat.pdf
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- Publié le Aoû 23, 2022
- Catégorie Law / Droit
- Langue French
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