L es exemples de mise en commun de moyens d’entreprises industrielles, ou «join

L es exemples de mise en commun de moyens d’entreprises industrielles, ou «joint-ventures», sont de plus en plus nombreux dans le paysage économique, notamment lorsque le cadre de l’action est international. La raison en est, pour l’essentiel, et à côté des aspects purement politiques, que les projets d’envergure, à moyen ou long terme, visant un progrès technique significatif et un avantage concurrentiel notable, ne peuvent plus être envisagés dans l’isole- ment. Sauf cas exceptionnel, les frais de recherche- développement, auxquels s’ajoutent immédiatement après les frais de protection (en particulier prise de brevets), ne peuvent plus être supportés par un seul opérateur. Que le regroupement soit définitif, et c’est le domaine des fusions, ou ponctuel, c’est celui de la «joint-venture», il est généralement incontournable. Dans ce cadre, des questions concrètes sont à poser: Pourquoi faut-il réaliser un audit de propriété indus- trielle au départ? Pourquoi des contrats réglant le sort des innovations à venir sont-ils nécessaires ? Toutes les réponses possibles démontrent le rôle vital de la propriété industrielle. Cet article présente les contours de ces différentes notions en tentant d’en révéler tout l’intérêt pratique pour les acteurs de l’industrie. L ’ ouverture des marchés vers l’international, ainsi qu’un souci permanent d’innovation technologique dont la mise au point présente un coût très élevé, oblige de plus en plus les entreprises à s’associer entre elles TERTIAIRE N° 110/JANVIER 2004 17 Valorisation du patrimoine incorporel Le patrimoine incorporel, principale richesse de la firme innovante, est le support essentiel des stratégies de coopération entre entreprises. Son intégration dans le montage de projets de partenariats nécessite au préalable l’identification et la valorisation des droits de propriété intellectuelle. La mise en œuvre d’une stratégie de développement repose donc sur un audit et le choix d’un cadre juridique : groupements ou contrats. Cet article expose simplement cinq méthodes d’évaluation de l’actif immatériel et présente les différentes solutions juridiques à envisager pour mener des « opérations conjointes » : l’apport en société, la société en participation, la filiale commune, la licence, la cession des droits d’auteurs et les contrats innommés. Exemple de dissertation juridique, ce document, d’accès facile, n’est pas réservé aux seuls candidats aux concours, son orientation pratique et la présence de nombreux exemples en fait un document de référence utilisable par le professeur de droit, d’économie ou de mercatique. G É R E R L’ I M M AT É R I E L TERTIAIRE DOSSIER Article de Dominique BRETAGNE-JAEGER, avocat, et Stéphane LYNDE, conseil en propriété industrielle, publié dans Les Petites Affiches du 18 juillet 2003, n° 143, sous le titre «L’intégration de la propriété intellectuelle au sein d’une joint-venture». Mots-clés: Droit des sociétés – Stratégie offensive – Joint-venture pour la réalisation de projets communs. Mais, dans la plupart des cas, avant de pouvoir mener à bien de tels projets, il paraît indispensable pour l’entreprise concernée d’avoir une connaissance très exacte de la consistance de son patrimoine intellectuel. Identifier la créativité de l’entreprise et les droits de propriété intel- lectuelle concernés, étudier l’ensemble des paramètres constituant le réseau de l’entreprise deviennent les préoccupations majeures des entreprises désireuses d’optimiser leur gestion grâce à une stratégie offensive. Pour tous ces motifs, la propriété intellectuelle et la joint-venture sont deux domaines en plein essor. L’expression de «joint-venture» est utilisée pour désigner le projet commun que les partenaires sont convenus de réaliser ensemble. Mais, selon certains auteurs, cette expression n’a pas de signification technique particu- lière et doit être entendue comme une entité commune avec participation égalitaire ou non. La joint-venture désigne une grande variété de struc- tures pouvant aller d’une association à n’importe quelle forme de société en passant par un GIE. Pour la traduction de ce terme, un arrêté ministériel du 11 octobre 1990 a imposé l’emploi de l’une des trois expressions suivantes: «entreprise commune», «opération conjointe» ou «coen- treprise», termes qui restent parfaitement vagues. Les parties sont d’ailleurs libres de décider de la forme qu’elles souhaitent donner à leur entité commune et d’adopter le régime qui semble convenir le mieux à leurs besoins. L’audit de propriété intellectuelle, un instrument du développement de l’entreprise La valorisation est une mission extrêmement difficile puisqu’elle dépend intégralement des droits concernés et de la situation ou du projet qui l’a suscitée. Un brevet et un savoir-faire, par exemple, ne seront bien évidem- ment pas valorisés de la même manière. Un portefeuille « propriété intellectuelle » ne sera pas appréhendé ni évalué de la même manière s’il s’agit de restructurer globalement un groupe en redistribuant les actifs, céder ou concéder un droit isolé particulièrement profitable, céder une branche d’activité en perte de vitesse pour se recentrer sur un métier, ou transférer la totalité des actifs d’une entreprise, en position de force ou en phase difficile. Préalable à toute décision stratégique, les audits vont permettre de plus en plus, et avec une efficacité redoutable, la mise en place d’une arme offensive, d’un bouclier défensif, d’un accélérateur de développement au sein des entreprises. L’audit, dans sa méthode et son contenu comme dans son objectif, pourra être extrêmement varié et complet selon les secteurs, la créativité, l’innovation technolo- gique, le titre de propriété intellectuelle concerné ou la durée de protection. L’audit permet bien souvent de prendre conscience que des richesses insoupçonnées existent dans l’entreprise et qu’elles méritent une meilleure prise en compte. C’est souvent, en particulier dans les PME, cette prise de conscience que des richesses existent en interne qui est le point de départ d’une politique enthousiaste et profitable de valorisa- tion de la propriété intellectuelle. L’audit est une analyse de l’entreprise et de son patri- moine incorporel aboutissant à l’établissement d’un catalogue de richesses propres et débouchant sur une valorisation permettant elle-même l’élaboration d’une stratégie d’entreprise. Elle a lieu en plusieurs étapes. Les droits existants et les droits concernés selon les domaines En premier lieu, il convient de procéder à l’analyse des droits existants, c’est-à-dire identifier la créativité de l’entreprise, pas toujours apparente, et les droits concernés selon les secteurs. Un brevet dont la durée de protection est de vingt ans ne saurait être valorisé comme une marque indéfi- niment protégée à condition d’être renouvelée tous les dix ans. Chaque droit a ses particularités et l’auditeur devra en tenir compte. Il faudra vérifier le portefeuille des dépôts et enregistrements et s’assurer de leur vali- dité au regard des lois nationales concernées. Au plan formel, cette partie de l’audit permet de vérifier que «le dossier est en ordre». Certains droits ne résultent cependant pas d’un dépôt, ce qui les rend plus difficiles à apprécier. Ainsi en va-t-il des dessins et modèles non déposés pourtant protégés par le droit d’auteur, mais aussi et surtout du savoir-faire. Ce dernier, s’il ne dépend à proprement 18 TERTIAIRE N° 110/JANVIER 2004 La propriété intellectuelle est un terme qui désigne traditionnellement deux grandes catégories de droits : d’une part, les droits issus des «créations nouvelles», qui sont les droits patrimoniaux et moraux détenus par le créateur sur son œuvre ou le titulaire d’un brevet sur une invention, et, d’autre part, les droits sur les « signes distinctifs », essentiellement le droit de propriété sur la marque. Au sens large, le domaine de la propriété intellectuelle recouvre quantité de richesses différentes: inventions brevetées, marques, know-how, dessins et modèles, logiciels, nouvelles technologies… qui met en œuvre des techniques de protection en amont (le secret pour le know-how, l’obtention d’un titre officiel de propriété pour les brevets et marques), des moyens d’exploitation contractuels d’une haute technicité juridique, ainsi que des moyens de défense adaptés à chaque cas (action en contrefaçon ou concurrence déloyale, responsabilité contractuelle). Elle génère une véritable richesse qui représente aujourd’hui l’essentiel du patrimoine des entreprises et qui peut et doit être optimisée. Elle nécessite, dès lors, la mise en place d’une vraie stratégie de déve- loppement. La souplesse de la joint-venture conviendra particu- lièrement bien aux différents domaines de la propriété intellectuelle. Il est clair, en effet, que la tendance actuelle des entreprises est de plus en plus non seulement de proté- ger sa richesse incorporelle, mais aussi de l’optimiser à travers une stratégie offensive. Ainsi l’Institut national de la propriété industrielle, qui diffusait l’an dernier, sur les ondes, le message sui- vant: «La propriété intellectuelle, une arme stratégique», a aujourd’hui adopté le slogan suivant: «Grandir avec la propriété intellectuelle». Ce slogan prône ainsi le partenariat d’entreprise et l’exploitation de la richesse immatérielle que constitue la propriété intellectuelle. S’il existe un nombre quasi infini de richesses intel- lectuelles dans les entreprises, il existe aussi un nombre quasi infini de stratégies et de joint-ventures qui peuvent y répondre. L’internationalisation imposera aussi souvent le partenariat. C’est le cas pour les médi- caments, objets de brevets détenus par des laboratoires pharmaceutiques et dont la mise en œuvre est à ce point coûteuse qu’elle nécessite un partenariat. Dans d’autres cas, l’internationalisation ne pourra se faire qu’au prix de l’implantation d’une entreprise commune dans l’état bénéficiaire. Parfois encore, le coût financier du développement de certains produits imposera la création de partenariat. Avant de s’engager et avant même d’être en mesure de déterminer la forme uploads/S4/ valorisation-du-patrimoine-intellectuel.pdf

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  • Publié le Sep 22, 2021
  • Catégorie Law / Droit
  • Langue French
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