Jean-Michel KUMBU ki NGIMBI & Yves-J. MANZANZA LUMINGU DROIT DES ASSURANCES Not
Jean-Michel KUMBU ki NGIMBI & Yves-J. MANZANZA LUMINGU DROIT DES ASSURANCES Notes de cours destinées aux étudiants de Master 2 en Droit – Université Catholique du Congo – Kinshasa, Avril 2021 2 INTRODUCTION La présente introduction portera sur l’identification du cours, ses objectifs et son contenu minimum. I. IDENTIFICATION DU COURS Identifier le cours de Droit des assurances consiste d’abord à rappeler le lien intrinsèque qui existe entre la vie humaine et le besoin de sécurité ressenti par tout individu, avant de définir le principal mécanisme de satisfaction de ce besoin et de déterminer les règles de droit destinées à l’organiser et à assurer l’efficacité des mesures qui en résultent. 1. La sécurité : un besoin inhérent à l’existence humaine L’existence humaine, de la naissance à la mort, constitue un parcours au cours duquel tout individu fait face à plusieurs évènements, heureux et malheureux1. La probabilité de réalisation de ces évènements suscite ainsi le besoin de sécurité et surtout la nécessité de mettre en œuvre des mécanismes efficaces en vue de juguler leurs conséquences éventuelles ou de les réduire à un niveau humainement et surtout économiquement acceptable. Les mécanismes les plus connus pour ce faire sont l’assistance, l’épargne et l’assurance. Fondée sur les principes de charité et de solidarité, l’assistance est un mécanisme qui dépend de la volonté et de la disponibilité des membres d’une communauté à porter secours à l’un d’eux qui aurait subi ou causé un dommage à la suite de la réalisation d’un risque quelconque. Or cette dépendance à une solidarité non contraignante ne saurait pas garantir de manière fiable et continue la répartition ou l’étalement des risques éventuels entre les différents membres de la communauté. Le refus d’accorder une telle assistance ou encore la rupture de la solidarité, qui pourrait être justifié notamment par le manque ou l’insuffisance des revenus nécessaires, aurait des conséquences fâcheuses pour l’individu qui est dans le besoin. S’agissant de l’épargne, elle est calculée sur base de la formule « revenu moins consommation » (E = R-C) et permet à un individu de faire des réserves qui pourront servir à la réalisation de certains projets ou à la prise en charge de certains évènements aléatoires. Or, il est possible qu’un sinistre survienne pendant 1 Voy. aussi F. Lukau Nkodi, Gestion des assurances. Manuel à l’usage des étudiants de licence en gestion de la RD Congo, Paris, L’Harmattan, 2014, p. 17. 3 que l’individu concerné n’a pas encore pu réunir les moyens nécessaires pour y faire face2. En outre, l’utilisation inattendue et non planifiée des réserves accumulées pendant un laps de temps peut vite conduire au dénuement économique. Ainsi, l’épargne semble ne pas garantir efficacement les nombreux risques de vie quotidienne à cause de sa dépendance aux revenus de l’épargnant. Enfin, l’assurance est un mécanisme basé sur le principe de prévision ou mieux de prévoyance. Elle consiste en des précautions que prend un individu en vue de contenir ou de maîtriser les conséquences de survenance éventuelle de différents risques auxquels il est ou peut être exposé. Contrairement à l’assistance sociale, le recours à l’assurance se fait a priori ou en amont, c’est-à-dire avant la réalisation des risques qu’on redoute. En outre, les garanties qu’elle offre ne dépendent ni de la simple solidarité volontaire des autres sujets rentrant dans la masse, ni des ressources disponibles de l’individu concerné ; mais elles sont soumises aux règles et méthodes de répartition de risques suivant le principe de mutualisation ou « la loi des grands nombres »3. C’est que plusieurs personnes acceptent de couvrir ensemble leurs risques moyennant paiement d’une prime par chacune, pour qu’en cas de survenance d’un dommage chez l’une d’elles, cela soit pris en charge grâce aux primes collectées ou au fonds constitué. Il résulte de l’analyse minutieuse de ces différents mécanismes que seule l’assurance paraît plus efficace et susceptible de satisfaire le besoin de sécurité, même s’il est évident que tous les risques de l’existence ne sont pas assurables. Fondée sur le principe mutualiste de constitution d’épargne collective et de division de risques, elle combine les notions d’assistance et d’épargne. 2. Essai de compréhension du concept « assurance » Examen de la notion et des fonctions de l’assurance. A. La notion d’assurance La définition de l’assurance dépend le plus souvent de la perspective avec laquelle on essaie de l’appréhender. Ce concept peut en effet revêtir plusieurs sens selon qu’il est employé dans une acception économique, juridique ou technique. Ainsi, il peut désigner tantôt un produit commercial ou une opération 2 Voir aussi en ce sens Kande Buloba Kasumpata, Droit congolais des assurances, Kinshasa, Editions Droit et Société, 2016, p. 16. 3 La loi des grands nombres est un théorème mathématique fondamental des probabilités et statistiques qui, appliqué au domaine des assurances, consiste pour l’assureur à garantir un nombre élevé des risques, c’est-à-dire à collecter des primes auprès d’un grand nombre d’assurés, afin de lui permettre de mieux prendre en charge les sinistres éventuels, sans que cela n’entraîne sa propre faillite. 4 de mutualisation des risques, tantôt le sous-bassement ou l’instrument par lequel se réalise cette opération. a) L’acception économique L’assurance est comprise du point de vue économique comme un produit commercialisé par les entreprises d’assurances sous la forme d’un paquet de garantie. Il s’agit donc d’un produit destiné à procurer aux clients qui l’achètent une certaine sécurité et un sentiment de sûreté, en ce qu’il tend à les mettre à l’abri de certains risques désormais transférés à l’assureur. b) L’acception juridique En droit, la même notion est définie comme le contrat par lequel une partie se fait promettre par une autre partie une prestation en cas de réalisation d’un risque moyennant le paiement d’un prix appelé prime. En effet, l’article 4 de la loi n° 15/005 du 17 mars 2015 portant code des assurances définit le contrat d’assurance comme « une convention en vertu de laquelle, moyennant paiement d’une rémunération appelée prime ou cotisation, une partie, l’assureur, s’engage envers une autre, le preneur d’assurance, à fournir une prestation stipulée dans le contrat au cas où surviendrait un événement incertain que, selon le cas, l’assuré ou le bénéficiaire a intérêt à ne pas voir se réaliser ». Cette définition paraît cependant très étroite parce qu’elle se limite à un pari entre deux personnes et occulte l’aspect technique qui constitue toute une opération de mutualité. c) L’acception technique Sur le plan technique, l’assurance désigne « l’opération par laquelle une partie, l’assuré, se fait promettre, moyennant une rémunération, la prime ou cotisation, pour lui ou pour un tiers, en cas de réalisation d’un risque, une prestation (pécuniaire) par une autre partie, l’assureur […], qui, prenant en charge un ensemble de risques, les compense conformément aux lois de la statistique »4. Il s’agit, pour l’exprimer en des termes plus simples, d’une opération par laquelle un assureur organise en mutualité une multitude d’assurés exposés à la réalisation des risques déterminés et indemnise ceux d’entre eux qui subissent un sinistre grâce à la masse commune des primes collectées. 4 G. Cornu (dir.), Vocabulaire juridique, 12ème éd., PUF, Paris, 2018, p. 96. 5 La démarcation entre l’acception juridique et l’appréhension technique du concept « assurance » réside dans la mutation du terme contrat vers celui d’opération. En effet, en appréhendant l’assurance comme une opération plutôt qu’un simple contrat, on quitte l’aspect bilatéral de la relation « assureur-assuré » vers un aspect plus technique de mutualité. Dès lors que le règlement des sinistres éventuels par l’assureur se fait grâce à la masse commune des primes qu’il aura collectées auprès de tous les assurés, il est évident qu’il faille prendre en compte, outre le lien juridique, la communauté d’intérêts dont l’assureur est considéré comme le représentant5. B. Les fonctions de l’assurance Les principales fonctions de l’assurance sont d’une part d’ordre social, et d’autre part d’ordre économique. Sur le plan social, l’assurance a une fonction essentiellement réparatrice, qui consiste à indemniser ou à prendre en charge les préjudices subis ou causés par un individu. Ainsi, elle contribue à résoudre des conflits et elle procure la paix. Du point de vue économique, l’assurance a plusieurs fonctions. Elle constitue d’abord un instrument de sécurité et de prévoyance qui protège le patrimoine national sous toutes ses formes (sécurité des entreprises, sécurité des familles et sécurité des individus). Elle est aussi un instrument de crédit, parce qu’elle garantit notamment les industriels et les commerçants contre les pertes occasionnées par l’insolvabilité de leurs clients. Enfin, en permettant l’accumulation de l’épargne grâce aux primes collectées par l’assureur auprès des assurés, elle contribue au financement de la croissance économique6 et au maintien de la balance des paiements à travers le mécanisme de redistribution financière sous forme des prestations dues aux sinistrés et aux autres bénéficiaires des contrats. Compte tenu de son importance et de sa complexité, l’assurance fait l’objet d’une réglementation particulière qui constitue le droit des assurances. 3. La réglementation des assurances Qu’est-ce qui justifie l’intervention des pouvoirs publics en matière d’assurances ? Qu’entendre par droit des assurances ? Et quelles en sont les sources ? 5 Voy. également uploads/S4/ yvesmanzanza-droit-des-assurances-m2-ucc-2020-2021.pdf
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- Publié le Apv 25, 2022
- Catégorie Law / Droit
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