Confortablement Assis Sous un Pomme-Rose À l’époque où il luttait encore sur la

Confortablement Assis Sous un Pomme-Rose À l’époque où il luttait encore sur la Voie, Gautama Bouddha se souvint un jour d’une expérience vécue alors qu’il était jeune enfant. Confortablement assis à l’ombre fraîche d’un pomme-rose, il était entré spontanément dans un état très calme et paisible de méditation profonde, libre de tout plaisir sensuel. Les enseignements et les pratiques anciennes du Bouddhisme peuvent sembler arides et ennuyants. Or, c’est le souvenir soudain de cette expérience qui l’inspira finalement à délaisser son ascétisme et, ce faisant, à s’éveiller. Qu’en est-il de nous, ici et maintenant? Vu l’état du monde actuel - est-ce la bonne chose à faire, rester assis sur notre derrière? Ne devrions-nous pas plutôt faire quelque chose? Ma réponse : Les guerres commencent dans l’esprit des hommes, et c’est ici que la paix est créée. Plusieurs religions en parlent ainsi et ce même noble sentiment est exprimé dans le préambule de la constitution de l’UNESCO. Si vous y regardez de près, vous le trouverez presque partout. Les conflits naissent dans notre propre esprit et notre propre cœur, et c’est là que l’on peut trouver et cultiver une paix véritable. Ce que nous faisons ici et maintenant n’est pas une fuite hors des problèmes du monde, ce que nous faisons ici peut engendrer une solution authentique. Très simplement, ce que le Bouddhisme nomme esprit, cœur ou soi n’est pas différent, de manière générale, de l’expérience des sens. L’esprit inclut ce que nous voyons, entendons, sentons, goûtons et touchons. Et aussi ce que nous pensons, désirons, espérons, appréhendons et détestons. En un mot, la totalité de notre expérience. Et parfois, cet esprit et toutes ses expériences vont trop vite, n’est-ce-pas? Comme si l’esprit s’était changé en une sorte de train haute vitesse, sans aucun frein. L’on regarde par la vitre pour se fixer des repères et savoir où l’on est, mais l’on ne voit qu’un paysage flou, étourdissant : ‘Je vais trop vite! Il faut que je ralentisse!’ C’est là une façon d’illustrer le mal-aise qui constitue la première noble vérité du Bouddhisme. Pas seulement les pensées superficielles qui vont et viennent, mais aussi les motivations fondamentales et les pulsions qui nous animent. Nous pouvons les contrôler jusqu’à un certain point. Mais elles nous contrôlent aussi, n’est-ce-pas? Pouvons-nous les contrôler complètement? Lorsque, par exemple, nous ralentissons, nous devenons capables de mieux examiner notre mal-aise et de mieux y réagir. Nous sommes alors certainement plus en contrôle. Mais un mal-aise au ralenti n’est-il pas toujours un mal-aise? Regardant à l’extérieur par la vitre de notre train-esprit en pleine course, toute notre expérience est comme une tache floue : Whoosh! Nous ne voyons pas clairement, ne distinguons pas les choses et n’arrivons pas à juger correctement. Certains cherchent à y échapper par l’alcool et les drogues, ou anesthésient leur esprit à l’aide d’écrans électroniques. Heureusement, de nos jours, plusieurs se tournent vers la méditation. Ce n’est pas une panacée, mais, en apprenant à méditer, nous pouvons voir ralentir la vitesse de notre esprit-locomotive. Et, lorsque nous passons de 300 kilomètres à l’heure à 10 kilomètres à l’heure, que voit-on? Quelle est alors notre expérience? Ce n’est pas un autre monde, mais, pourtant, le monde est complètement différent – nous voyons maintenant plus clairement et pouvons même détailler avec netteté la personne qui marche sur le bord de la route, allant jusqu’à remarquer la couleur de ses souliers. L’on peut voir les feuilles dans les arbres, chaque fleur, faire l’expérience de la beauté qui nous entoure. Et nous réagissons mieux aux conflits qui apparaissent en nous et hors de nous. Ralentir – devenir calme et clair – est sain. Cela peut même nous sauver la vie : sautez dans votre auto avec un esprit qui roule à haute vitesse et ce sera peut-être là votre dernière sortie. Pourtant, malgré toute la valeur de cet apaisement, est-ce que l’on ne fait pas seulement gratter la surface? En fait, ce processus de ralentissement peut parfois lui-même nous exciter et nous amener à reprendre de la vitesse. Nous restons alors toujours prisonniers d’un cycle incessant : ralentir, accélérer, ralentir, accélérer. Je vous invite à examiner votre propre expérience et à voir si cela est vrai ou non. Lorsque notre esprit agité se calme réellement, que voyons-nous clairement, quelle est alors notre expérience? Discernez-vous le désir sous-jacent ou la motivation qui est au cœur de notre mal-aise? Le désir, la seconde noble vérité : le désir d’exister, centré sur soi, le désir aussi de s’affirmer en tant que soi. Quitte à dominer l’autre. Ce désir n’est-il pas intimement lié aux guerres qui commencent et se terminent dans l’esprit humain? Découvrez-le pour vous-même. Faites vraiment ralentir le train-esprit que vous êtes. Je vous invite même à compléter le processus : à laisser le mouvement de l’esprit lui-même, l’expérience du soi, s’arrêter complètement. Alors, vous verrez ce qui est réellement ici. Qu’est-ce qui est ici – avant même que la première pensée ne surgisse? Avant de considérer que ceci (pointant vers le plancher) est bleu, avant d’en avoir jugé ainsi, qu’est-ce que c’est? Un tapis? L’univers complet? Rien? Quelle est votre expérience actuelle – avant que le soi s’en mêle? Vous voyez comment le soi est coincé : aussitôt, les rouages du mental se mettent en branle. Le soi ne peut pas lui-même en venir à s’arrêter complètement, car l’expérience même du soi est l’instabilité, le mal-aise. Regardez et voyez par vous-même. Donc, une pratique soutenue de la méditation. Un zazen authentique discerne ce mal-aise sous-jacent qu’est le soi – et révèle l’instabilité qui se trouve à sa racine. Permettez à toute votre énergie de simplement se rassembler, de se focaliser, de s’unifier. Sans juger, anticiper ou attendre, sans comparer. Seulement être pleinement présent – avec la douleur dans les genoux, si c’est là ce qui est. Laissez être ce qui est. En deux mots, la méditation Bouddhiste, c’est : arrêter, voir. Certains pourront penser : ‘Je ne peux même pas imaginer ce que ça pourrait être d’arrêter vraiment. Non, c’est impossible!’ Peut-être l’est-ce pour eux. D’autres penseront plutôt : ‘Devrais-je arrêter?’ Ce mal-aise doit-il disparaître? Je vous invite, par votre expérience même, à le confirmer : qu’est-ce qui doit ou ne doit pas être fait? Alors, la voie est claire. Ce mal-aise peut-il vraiment être stoppé? Tant que vous ne l’avez pas vous- même confirmé dans votre propre expérience, comment ne pas en douter? Arrêtez complètement et voyez-le : est-ce là que vous avez commencé, ou non? Lorsque l’expérience du soi arrive vraiment à sa fin, que se passe-t-il? Rien de nouveau n’apparaît. Et l’on n’entre pas dans un nouveau monde d’illumination. Non. Pour la première fois, vous revenez à ceci (il regarde sa main) : ‘J’ai cinq doigts!’ Confortablement assis sous le pommier-rose, où que vous soyez. Nous n’avons pas besoin d’une nouvelle expérience ou d’un nouveau monde. Voyez vraiment ce qui est devant vous – voyez vraiment le visage de l’autre devant vous- et vous cesserez de courir partout et de chercher autre chose. La pratique est-elle difficile? Si c’est le cas, qu’est-ce donc qui la rend difficile? Les conflits ne sont-ils pas créés dans l’esprit humain? Trouvez ce qui ne va pas avec votre pratique et corrigez-le. Par expérience, vous savez déjà que vous pouvez ralentir le train-esprit, renoncer à l’alcool, à la cigarette, à la colère, laisser aller des désirs pénibles et des illusions dangereuses. Oui, tout cela est vrai et bénéfique – n’hésitez pas à le faire. Mais comment le soi peut-il renoncer à lui-même? Comment le soi - qui fait tout ceci – peut-il se laisser aller lui-même? Pouvons-nous nous affranchir de notre propre désir d’exister et dire que nous le sommes? Ne vous y trompez pas; cela demande beaucoup de travail. C’est la voie, la quatrième noble vérité. Voilà pourquoi nous sommes en retraite, pour nous y consacrer pleinement et le vérifier par nous-mêmes. C’est là la raison d’être même de la méditation soutenue : être capable de maintenir cet effort. Non seulement lorsque nous sommes assis sur nos coussins, mais aussi quand nous nous levons et faisons ce qui doit être fait dans le monde. Non pas à partir de mon point de vue en conflit avec le vôtre, mais à partir d’ici, à partir de ce qui est. Peut-être commencez-vous à voir à quel point il est essentiel que les guerres cessent dans notre esprit? De renoncer à cette envie fondamentale de voir les choses se dérouler à ma façon. Avec de la salade, des cornichons? Les commandes spéciales ne nous dérangent pas! Tout ce que nous souhaitons, c’est que vous nous laissiez faire les choses comme vous le souhaitez. Une vieille publicité de Burger King. Dans toute pratique religieuse authentique, vous ne décidez pas du chemin à suivre. Si vous vous entêtez à le faire, vous ne pratiquez pas. La première chose à faire, c’est de renoncer à ce que les choses se passent à ma façon. La laitue et les cornichons ne sont pas le problème; si vous uploads/Histoire/ assis-confortablement-sous-un-pommier-en-fleurs.pdf

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  • Publié le Jui 09, 2022
  • Catégorie History / Histoire
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