littérature, une langue universelle, où se perd la spécificité de la littératur
littérature, une langue universelle, où se perd la spécificité de la littérature, où disparaissent les problèmes de traduction, le fait même de la traduction. On y baigne déjà naturelle ment dans cette langue universelle. On recon naît la poétique science structuraliste d’il y a dix ans, qui s’est justement tournée vers une poétique de la « prose » — une taxinomie des formes du contenu, qu’elle s’appelle analyse structurale ou sémiotique du récit. De même que Saussure a écrit qu’ « étudier une langue conduit inévitablement à étudier le langage » (lettre à Meillet du 4 janvier 1894), on peut poser qu’étudier la poésie conduit inévitablement à une théorie, et à une théorie historique du langage. Exemple : on a décrit la poésie comme une ambiguïté, comme la polysémie. On présupposait que la monosémie était première, fondamentale. En effet, si le langage est fait de mots, qui soient des noms donnés (depuis Adam) aux choses, à un mot doit correspondre un sens. Mais la polysémie est empiriquement le fait le plus courant — fonctionnellement premier. Comme l’ambiguïté. Une logique (celle de Husserl), et non la linguistique, fait de la monosémie le point de départ et la norme. Logique théologique. Ainsi décrire la poésie implique une théorie de l’ambiguïté, de la polysémie, donc du langage. Autre exemple : le rapport entre la poésie et le dictionnaire. Le dictionnaire, comme Rimbaud, Mallarmé, Ponge, surtout, entre autres, l’utilisent, pro duit un étalement de nomenclature qu’on fait jouer comme une polysémie. C’est le « mon tage lexical » moderne dont tu parles (.Re liefs, p. 51). En passant, je note que le montage ne permet plus, au moins, le psy chologisme de l’expression, où reste une part importante des idées communes sur la littéra ture, et surtout sur la poésie. Décalage qui fait, en partie, la fameuse difficulté des mo dernes. Et si le « dérèglement de tous les sens » est un dérèglement (volontaire) de l’emploi des mots, il est mis fin à l’analogie universelle. Autre effet de la modernité. Deux autres conséquences : la théorie n’est pas séparable de l’évolution de la poésie, la poésie n’est pas séparable de l’évolution de la théorie. En rapport avec une poésie de la poésie (qui dit l’impossibilité de la poésie), un roman qui dit l’impossibilité du roman, une philosophie qui dit la fin de la philoso phie, — l’intérêt pour la théorie peut aller jusqu’à cette limite que la théorie de l’écri ture absorbe toute l’écriture, que la théorie intériorise toute la pratique, — extrême opposé à l’autre intériorisation, celle de la théorie par la pratique. Tu écris : « L’arti culation entre le document poétique mené à cette raréfaction susdécrite et sa reconnais sance critique par la prose de type ‘ Théorie de la littérature ' n’est pas accidentelle, su perfétatoire » (Reliefs, p. 89). Il me semble que cette inflation théorique, cette (pseudo) involution de la poésie ou de l’écriture sub jective sur sa propre théorie ne se comprend pas sinon comme une pratique de la philo sophie du langage qui mène à la poétique du dictionnaire : la philosophie du travail « de » la langue, où convergent les heideg- gérianismes, les lacanismes d’une vulgate, d’une lacantonade présente. Travail de la langue, sans discours. Pris pour le discours. D’où une dissociation entre poésie et dis cours. Suit une raréfaction de la lecture. Peut-être aussi la répugnance des poètes, en France, à lire à voix haute, et publique. Parce qu’il n’ y a de lecture que d’un dis cours. Il n’y a pas de lecture d’une langue, ni de la langue. Il y aurait à analyser un goût contemporain pour le Littré : présaus- surien. Pendant que la vulgate structuraliste, par oppositions-couplages-complexité struc turelle, fait la caution « scientifique » des pra tiques littéraires : une écriture non avec mais par le savoir. Que la poésie n’est pas séparable de l’évo lution de la théorie, la place de la parodie, aujourd’hui, le montre, la notion d’inter textualité comme effet de la connaissance de Lautréamont. Denis Roche. L’ « autocriti que » de la poésie dans Eros énergumène est voulue-reconnue telle : « théorie ‘ cure aiguë’ » (TXT 6/7, hiver 1974, p. 117), et « Dé-figurer la convention écrite c’est, en écrivant, témoigner de façon continue que la poésie est une convention (de genre) à l’intérieur d’une convention (de communi cation) ». On ne peut pas dire que le poème renvoie au monde. Monde est un terme phénoméno logique, et la poésie ni la poétique ne peu vent être phénoménologiques, parce que la 86 © ÉDITIONS BELIN / HUMENSIS. TOUS DROITS RÉSERVÉS POUR TOUS PAYS - PAGE TÉLÉCHARGÉE SUR LE SITE PO-ET-SIE.FR - VOIR LES « CONDITIONS GÉNÉRALES D’UTILISATION » DE CE SITE. uploads/Litterature/ 1-1977-p75-102-pdf-page-12.pdf
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- Publié le Sep 11, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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