QUE SAIS-JE? Histoire de l'impôt ANDRÉ NEURRISSE , \ , put' INTRODUCTION De nos
QUE SAIS-JE? Histoire de l'impôt ANDRÉ NEURRISSE , \ , put' INTRODUCTION De nos jours, la notion d'impôt se révèle dans le transfert sans contrepartie d'avoirs sous forme moné- taire au bénéfice de la puissance publique. Dans le passé, la monnaie avait moins de place et la puis- sance publique était de tout autre nature : cepen- dant, sans en revêtir les mêmes formes, l'impôt était de même essence, à savoir la traduction comptable de la mise en commun de richesses et de forces en vue d'une action collective dans le cadre d'une ins- titution publique. Ainsi en est-il, par exemple, de la construction et de l'armement de bateaux par des peuplades iliennes, en vue de la conquête de terri- toires ou simplement de la protection de l'île. Dans une optique opposée on pourrait considérer que les exigences du vainqueur pouvaient entraîner pour le peuple vaincu une répartition des charges de telle sorte que le tribut est essentiellement lié à l'impôt - au point d'en être synonyme. On peut considérer aussi que la part des récoltes donnée par l'exploitant au propriétaire ou au protecteur, contrepartie du droit ou de la possibilité d'exploiter, est devenue impôt lorsque le propriétaire ou le pro- tecteur a assumé une autorité publique ou religieuse. Une autre source pourrait résider dans l'institution- nalisation d'actes illégitimes en péages, tonlieux 3 DU M~ME AUTEUR Précis de droit budgétaire, Librairie générale de Droit et Jurispru- dence, 1961.- La comptabilité économique française (Comptabilité nationale). Li- brairiegénérale de Droit et Jurisprudence, 1963 (ouvrage couronné par l'Académie des Sciences Morales et Politiques). Les jeux de casino, Presses Universitaires de France, « Que sais-je? >, no 985, 3' édition, 1977 (traduction en langue espagnole, 1978). Histoire du franc, Presses Universitaires de France, «Que sais-je? _, no 1082, 3' édition, 1974 (traduction en langue japonaise, 1971), Les règlements internaUonaux, Presses Universitaires de France. , Que sais-je? " n° 1495, 1972. El;:';- 2 130357350 Wpôt légal. - 1,e édition : 3' trimestre 19,8 © 1978, Pre.lses Universitaires de France 'rous droits de traduction, de reproduction et d'adaptation réservé, pour tous pays atteint leur maturité avec une précocité déconcer- tante, se sont maintenues pratiquement inchangées. Certes on ne connaît plus l'impôt en nature, l'impôt de quotité élimine l'impôt de répartition, la fisca- lité est devenue instrument de politique écono- mique, mais depuis cinq mille ans la facilité et la productivité appartiennent aux taxes indirectes, la difficulté et l'équité (tout au moins sa recherche) à l'impôt direct; ainsi, les techniques fiscales, tout en se perfectionnant, n'ont-elles évolué que modérément. Sans doute l'impôt a-t-il varié dans son poids global, dans sa répartition, entraînant des consé- quences économiques et provoquant des réactions sociales et politiques. Il fait partie intégrante de la vie publique, au niveau de l'individu, surtout en tant que phénomène de société. Mais, pour être appréciées à leur juste mesure, ces incidences doivent être rapportées à d'autres données essentielles, no- tamment la dépense publique, le revenu national et sa distribution, qui débordent du cadre de cette histoire, étroitement sectorielle, de l'impôt en tant que technique administrative et instrument de l'Etat. 5 et droits de douane dont l'essence profonde tient peut-être plus du vol de grand chemin que de l'au- torisation d'utiliser un ouvrage (pont, route) ou de l'assurance de bonne fin acquise par une fraction des marchandises transportées. L'impôt est un phénomène à multiples facettes dont il est impossible de saisir l'instant - et, par- tant, le lieu - de sa naissance. Même dans l'hypo- thèse où l'on ne considère l'impôt que sous sa forme monétaire, il est difficile de cerner l'instant où est apparue la monnaie - d'autant qu'il n'est pas impossible qu'en Egypte la monnaie scripturale ait précédé les espèces. Au reste l'impôt ne se mani- feste pas que sous la forme monétaire. L'impôt peut être en nature, qu'il s'agisse soit d'une prestation ou d'une corvée, soit d'une fourniture de marchan- dises (blé à l'origine, cuivre en 1943). A la vérité il est d'évidence que l'impôt est né avec l'érection de la vie collective en formation étatique, avec, du reste, toute l'imprécision qu'une telle évolution peut comporter. Aussi bien convient-il de remonter très avant dans le cours de l'Histoire pour avoir une di- mension perspective qui replace la fiscalité contem- poraine dans l'évolution de la société. Cependant c'est l'administration romaine, laquelle a marqué d'une empreinte indélébile la vie publique en Occi- dent, qui constitue le premier pôle de l'évolution de la fiscalité; le second pôle se situe à la période qui a suivi la Révolution de 1789, trouvant ses sources dans l'impôt monarchique et son épanouissement dans la fiscalité contemporaine. Entre les deux se situe la plage de la féodalité où l'éclatement de l'Etat s'est traduit par la provincialisation de la fiscalité. Au cours des siècles et des millénaires les lignes de force des institutions fiscales, lesquelles avaient 4 CHAPITRE PREMIER LES PREMIERS SYSTÈMES FISCAUX Quelque perfectionnement qu'elles aient atteint, les institutions fiscales romaines n'étaient pas pour autant originales : elles avaient pris modèle dans celles, très évoluées, qu'avaient eues auparavant l'Egypte, puis la Grèce; elles n'ont pas pu ne pas tenir compte par ailleurs du système que les Lagides avaient perfectionné ni, pour ce qui est de l'appli- cation en Gaule, de ce qui existait avant l'invasion de César. I. - L'impôt de l'Ancien Empire d'Egypte (3500-2200) Dès l'unification de l'Egypte par le roi Ménès, chef de la Ire dynastie (3300), l'administration ra- mifie l'autorité du roi jusqu'au sujet et recueille, en sens inverse, la contribution de chacun aux charges de l'Etat naissant. Il y avait à l'origine deux organismes spécialisés dans la fiscalité : la Maison Blanche dans le Sud et la Maison Rouge spécialisées d'abord géographiquement (Sud et Nord) puis très vite fonctionnellement, la Maison Rouge gérant les biens affectés au culte, la Maison Blanche 7 ayant à sa the le « DireclelU' des caravanes » était chargée d'enregistrer tout ce qui entrait ou sortait du royaume. Les sanctions étaient sévères, allant de la bas- tonnade ou la torsion des pieds et des mains jus- qu'aux travaux forcés dans les régions frontières, à temps ou à perpétuité. Parallèlement existait un système d'offrandes, codifié, au bénéfice des temples. L'impôt était payable en métaux précieux ou toute autre denrée mais principalement en nature et il existait de vastes greniers publics, de grandes caves et de grandes resserres pour l'entrepôt du grain, du vin ou de l'huile - et peut-être existait-il aussi des étables publiques. Tel était dans l'Egypte du Ille millénaire le système fiscal simple dans ses principes, efficace dans son application qui permit à la civilisation nilote de prospérer pendant si longtemps. II. - La fiscalité athénienne du temps de Périclès Au début du ve siècle Sparte dominait la terre (Ligue du Péloponnèse), mais Athènes exerçait son hégémonie sur les 200 cités des îles et des côtes, alliées dans le cadre de la Ligue de Délos organisée en 478 av. J.-C. Cette hégémonie n'était pas gra- tuite car la ressource la plus importante de la Cité athénienne était la contribution des participants de la Ligue. A l'origine Aristide l'avait fixée modérément à 460 talents et l'&vait répartie entre les cités suivant les richesses foncières; cette contl"Ïbution, pharos, d'impôt de répartition devint en 413 av. J.-C. un impôt de quotité : elle fut en effet remplacée par une taxe de 5 % sur les transactions effectuées dans 9 demeurant le département des Financcs. Ce dCll11Cr se scinde vers 2500 en l'administration des greniers (Shenout) et celle du Trésor (par Hedj) centralisant les métaux précieux et les denrées non périssables. Les charges publiques étaient principalement assu- rées par l'impôt direct, accessoirement par les droÎts d'enregistrement et de douane. L'impôt direct était calculé sur la base d'un cadastre établi par des géo- mètres (harpédonaptes) et des commissions d'ar- pentage. Ces commissions étaient dirigées par un scribe du cadastre et comprenaient deux scribes agricoles, un porteur de cordeau et un tendeur de cordeau. Les récoltes encore sur pied faisaient l'objet de mensuration, puis, une fois entassé, le grain était strictement décompté en boisseaux, le tout sous le contrôle de géomètres et de scribes. Le cadastre était fait tous les deux ans et chaque chef de famille devait déclarer les personnes, femmes et enfants, appartenant au groupe familial - et signaler les femmes enceintes. Vers l'an 3000 s'ajoute au cadastre un recensement (tenout) bientôt appelé « compte de l'or et des champs» car il inventoriait tous les biens meubles et les évaluait en or selon une monnaie de compte: le deben, subdivisé en 12 shats (le shat valait 7,5 grammes d'or sous l'Ancien Empire). L'impôt direct (oudjeb) portait aussi à la fois sur le revenu et sur le capital, l'évaluation de l'un contrôlant l'évolution de l'autre et réciproque- ment. Le recensement était contrôlé - et servait de moyen de contrôle - par l'enregistrement obli- gatoire de toute mutation, lequel donnait lieu à expédition authentique (a nisout). TI ne semble pas qu'il y ait eu de droits sur les ventes; par contre, il est très vraisemblable qu'il y ait uploads/Litterature/ andre-neurrisse-histoire-de-l-x27-impot-que-sais-je-1978.pdf
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- Publié le Fev 28, 2022
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