Les math´ ematiques dans le prisme de l’histoire (par Andr´ e Joyal) Ces notes

Les math´ ematiques dans le prisme de l’histoire (par Andr´ e Joyal) Ces notes ont ´ et´ e pr´ epar´ ees ` a l’intention des jeunes stagiaires en math´ ematiques ` a l’UQAM en juin-juillet 2003. Il est fascinant de retracer l’histoire des math´ ematiques jusqu’au l’origine des civilisations. Elle est ins´ eparable de l’histoire du progr` es humain en g´ en´ eral. Synopsis: §0 Pr´ ehistoire §1 M´ esopotamie §2 La civilisation Egyptienne §3 La civilisation Chinoise §4 La civilisation Indienne §5 La civilisation Grecque §6 La civilisation Romaine §7 La civilisation Musulmane §8 La Renaissance §9 L’Europe de 1600 ` a 1900 §10 ´ Epilogue §11 Notes sur les calendriers §12 Bibliographie Histoire des math´ ematiques sur Internet: The MacTutor History of Mathematics archive: http://www-groups.dcs.st-and.ac.uk/~history/ 1 § 0 Pr´ ehistoire L’histoire ne repr´ esente qu’une infime fraction de la pr´ ehistoire. De la pr´ ehistoire humaine nous savons peu de choses sinon ce que l’on peut deviner par l’examen des sites arch´ eologiques. Des recherches r´ ecentes bas´ ees sur l’analyse de l’ADN des populations actuelles ont toutefois donn´ ees des r´ esultats nouveaux. L’humanit´ e actuelle serait constitu´ e d’une seule esp` ece, l’Homo sapiens sapiens. Cette esp` ece aurait atteint sa maturit´ e sur le continent Africain il y a environ 150,000 ans, pour se r´ epandre ensuite sur le continent Asiatique et la p´ eninsule Europ´ eenne. Le continent Am´ ericain aurait ´ et´ e envahit par migration successive ` a partir de 40,000 ans, et le continent Australien par une seule migration vers la mˆ eme ´ epoque. L’humanit´ e a colonis´ e la terre enti` ere (sauf l’Antartique) au temps de la pr´ ehistoire. Ce qui prouve que l’homme poss` ede une capacit´ e d’adaptation exceptionelle qui le distingue des autres esp` eces animales. C’est est un animal social dou´ e de parole. Il poss` ede un esprit inventif qui lui permet de s’adapter ` a toute sorte d’environnement hostile (comme l’hiver Canadien!). La maˆ ıtrise du feu, la fabrication d’outils de pierre taill´ ee, la domestication du chien et le tir ` a l’arc sont ses premi` ere conqu` etes technologiques. Elles sont suivies de l’invention de l’´ elevage, de l’agriculture, du tissage, de la fabrication de la poterie et de la c´ eramique. Un des probl` emes fondamentaux de l’agriculture est celui de la r´ eg´ en´ eration des sols cultiv´ es. Car il suffit de quelques ann´ ees de culture pour ´ epuiser un sol. Pour le reg´ en´ erer il faut le laisser en jach` ere durant une dizaines d’ann´ ees. Il suffit ensuite de couper les pousses d’arbres pour les bruler car la cendre est un excellent fertilisant. Avec cette m´ ethode un agriculteur poss´ edant dix lots peut en cultiver un chaque ann´ ee. On peut acc´ el´ erer le processus en engraissant les terres avec les excr´ ements du b´ etail au lieu d’attendre une dizaine d’ann´ ees, mais cette technique ne fut d´ ecouverte que progressivement. Dans certaines plaines fluviales l’´ epuisement des sols par les cultures peut ˆ etre compens´ e par le fleuve qui d´ epose du limon. C’est le cas par exemple des plaines du Nil, du Tigre et de l’Euphrate. La construction de digues et de canaux pour l’irrigation des terres favorise l’organisation du travail collectif et l’´ etablissement d’une administration pour veiller ` a la r´ epartition des tˆ aches. Il faut construire des batiments pour entreposer les fruits du travail collectif. Il faut d´ evelopper une ´ ecriture pour enregistrer la contribution de chacun en vue d’une r´ etribution future. Il faut d´ evelopper un syst` eme de lois et une religion commune. Tout cela favorise le d´ eveloppement d’une classes d’administrateurs et de prˆ etres qui tirent leur subsistance d’une taxe impos´ ee aux autres travailleurs. Les premi` eres grandes civilisations doivent leur existence aux travaux collectifs que n´ ecessitait un certain type d’agriculture. C’est le cas de la M´ esopotamie avec le Tigre et l’Euphrate, de l’´ Egypte avec le Nil, de l’Inde avec l’Indus et le Gange, et aussi de la Chine avec le fleuve Bleu et le le fleuve Jaune. La division des terres, la r´ epartition des h´ eritages, la constitution des calendriers, la construction des bˆ atiments, les ´ echanges commerciaux ou la simple curiosit´ e suscit` erent des probl` emes d’ordre math´ ematique; leurs solutions ont ´ et´ e transmises d’une g´ en´ eration ` a l’autre sous forme de recettes ou de r` egles de l’art. Il n’y a pas de civilisations sans math´ ematiques. § 1 M´ esopotamie La M´ esopotamie est une r´ egion d’Asie ant´ erieure comprenant les vall´ ees du Tigre et l’Euphrate. Ces fleuves se rejoignent dans une r´ egion mar´ ecageuse avant de se jeter dans le golfe Persique. La maˆ ıtrise de ce mar´ ecage par la construction de digues fut l’oeuvre collective des sum´ eriens vers ∼5000. La r´ egion se divisa naturellement en cit´ e-´ etats ind´ ependantes jusqu’` a leur extension maximale vers ∼2500. Les cit´ es commenc` erent alors ` a se livrer ` a des guerres f´ eroces pour le contrˆ ole des territoires et des canaux d’irrigation. Le roi Lougalzaggi conquit l’ensemble des cit´ es vers ∼2350. Mais l’empire qu’il avait forg´ e fut arrach´ e par Sargon, un officier qui parlait l’akkadien. On croit que les Akkadiens, les Canan´ enens, les Amorites, les H´ ebreux et les Chald´ eens sont venus d’Arabie car ils parlent des langues similaires dites s´ emites. La langue akkadienne s’imposa dans l’empire qui devint progressivement bilingue avec le sum´ erien comme langue seconde. Quoique peupl´ ee de S´ emites, Babylone se r´ evolta contre la dynastie d’Akkad. ` A partir de ∼1830 elle fut gouvern´ ee par celle des Amorites. Elle atteignit son apog´ e vers ∼1730 sous le reigne du roi Hammurabi qui imposa sa domination ` a l’Assyrie et ` a l’ensemble du pays de Sumer. Elle fut pil´ ee en ∼1530 par un peuple parlant une langue indo-europ´ eenne, les Hittites. Elle retrouva son ind´ ependance sous Nabuchodonosor en ∼1137. Elle tomba sous la domination des Assyriens vers ∼800. L’empire n´ eo-babylonien fond´ e par Nabopolosar se lib´ era de l’Assyrie avec l’aide des M` edes en ∼625. Babylone retrouva alors sa splendeur d’antant avec des jardins suspendus consid´ er´ es par les Anciens comme l’une des Sept Merveilles du monde. 2 En ∼587 Nabopolosar conquit la Syrie, la Palestine et J´ erusalem. Il amena des juifs en captivit´ e ` a Babylone. L’empire de Babylone d´ eclina apr` es sa conqu` ete par le roi perse Cyrus II en ∼539. Celui-ci permit aux juifs de retourner ` a J´ erusalem. Le roi perse Darius et surtout Xerx` es en ∼482 pr´ ecipit` erent le d´ eclin de la ville en r´ eprimant des r´ evoltes. La Perse fut conquie par Alexandre le Grand en ∼332. Celui-ci fit de Babylone la capitale de son empire mais il mourut en ∼331. L’histoire de Babylone nous est connue par l’historien Grec H´ erodote. Mais aussi par des centaines de milliers de tablettes d’argiles d’´ ecriture cun´ eiforme. Les babyloniens du temps du roi Hammurabi savaient r´ esoudre de nombreux probl` emes alg´ ebriques dont certains comportent une ´ equation du second degr´ e. Par exemple, une tablette d’´ ecriture cun´ eiforme discute du probl` eme suivant: La somme de l’aire de deux carr´ es est ´ egale ` a 1000. Le cot´ e de l’un est de 2/3 celui de l’autre, diminu´ e de 10. Que valent les cot´ es des carr´ es ? Si on traduit le probl` eme en notation alg´ ebrique moderne on obtient deux ´ equations ` a deux inconnues: x2 + y2 = 1000 et y = (2/3)x −10. La solution s’obtient en r´ esolvant l’´ equation du second degr´ e: 13 9 x2 = 40 3 x + 900. On trouve x = 30 et y = 10. L’alg` ebre babylonienne est r´ ethorique. Les probl` emes et leurs solutions sont exprim´ es avec des mots du langage courant. Les tablettes contiennent des solutions ` a des probl` emes particuliers mais laissent deviner une m´ ethode g´ en´ erale. La formule x = p (p/2)2 + q −p/2 qui permet de r´ esoudre l’´ equation x2 + px = q est exprim´ ee sous forme de recette. Une tablette indique que les babyloniens savaient additionner la s´ erie g´ eom´ etrique 1 + 2 + 22 + · · · + 29 = 210 −1 et qu’ils savaient calculer la somme des carr´ es 1 + 22 + 32 + · · · + 102 = 10 · (1 + 10) · (1 + 2 · 10) 2 · 3 = 385. Ils savaient obtenir des approximations de plus en plus pr´ ecises d’une racine carr´ ee x = √ b en prenant successivement xn+1 = 1 2  xn + b xn  ` uploads/Litterature/ hist02.pdf

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