208 Le rêve et la psychanalyse : Une étude del’enfant de sable De Tahar Ben Jel
208 Le rêve et la psychanalyse : Une étude del’enfant de sable De Tahar Ben Jelloun Cecile Chinyere Noah et Marinus Samoh Yong University of Nigeria, Nsukka « On jugerait bien plus sûrement un homme d’après ce qu’il rêve que d’après ce qu’il pense ». Victor Hugo Le résumé : En décidant de donner la parole à des conteurs fictifs qui, tour à tour, content ‘l’aventure ambiguë’ d’Ahmed-Zahra, suivant la technique narrative de Schéhérazade, la conteuse du conte arabe Mille et une nuits, le romancier, Tahar Ben Jelloun, fait un examen « psychologique »afin de mettre à nu l’échec d’une masculinité africaine. Le titre de cette œuvre atemporelle, L’enfant de sable, est déjà révélateur des images de matière changeante, de l’inconstance et de la précarité de la personnalité de cette « enfant ». À travers L’enfant de sable, ce philosophe désabusé nous plonge inexorablement dans un dédale inextricable de ruelles s’ouvrant sur un univers onirique qui révèle le désarroi de l’homme dans un univers qui lui paraît absurde. C’est en pratiquant la psychothérapie que Tahar Ben Jelloun réussit à déceler « le trouble du nom et le trouble du corps » chez son personnage central, Ahmed Bey alias « zahra « AmiratLhob » princesse d’amour ». Cette femme, déguisée en homme par son père, est en proie à des souffrances iatrogènes : elle cherche à reconquérir sa féminité « usurpée». Notre but est d’exposer l’échec du concept phallocentrique dans une société africaine en employant les procédés de l’analyse psychanalytique basés sur les modèles de la répartition du psychisme humain, par Sigmund Freud, Carl Gustav Jung, Northrop Frye, et Jacques Lacan. Tahar Ben Jelloun, en psychanalyste qu’il est, a su explorer l’inconscient d’Ahmed-Zahra pour enfin arrivé à dépeindre les complexités de la condition de la femme africaine, en particulier de celle de la société musulmane marocaine et l’ambigüité existentielle dont l’issue est toujours l’anéantissement de l’homme et de la conscience individuelle. Mots-clés : rêve, mémoire, rêverie, inconscient, souvenir, psychanalyse. Abstract By providing a platform for fictional storytellers who took turns to recount Ahmed-Zahra’s ‘ambiguous adventure’, with the narrative technique of the Arabian storyteller and author of Thousand and One Nights, Scheherazade, the novelist, Tahar Ben Jelloun, makes a "psychological" examination to expose the failure of African masculinity. The title of this timeless work, L'enfant de sable, is already revealing images of changing matter, inconsistency and the precarious nature of this child’s personality. Throughout L’enfant de sable, this disillusioned philosopher plunges us inexorably in an inextricable maze of alleys opening onto a dreamlike universe that reveals man’s disarray in a universe that seems difficult for him to understand. It is in practicing psychotherapy that Tahar Ben Jelloun manages to detect his protagonist’s “name and bodily disorder", Ahmed Bey alias "zahra" Amirat Lhob "princess of love". This woman, disguised as a man by her father, is plagued brought to you by CORE View metadata, citation and similar papers at core.ac.uk provided by ZENODO 209 by iatrogenic suffering: she seeks to reclaim her "usurped" femininity. Our goal in this paper is to expose the failure of the phallocentric concept in the African society by applying psychoanalysis founded on the models of distribution of the human psyche by Sigmund Freud, Carl Gustav Jung, Northrop Frye, and Jacques Lacan. As a psychoanalyst, Tahar Ben Jelloun has been able to explore Ahmed-Zahra's unconsciousness to finally portray not only the complexities of the condition of the African woman in general, and that of the Moroccan Muslim society in particular, but also the existential ambiguity whose outcome is always the annihilation of man and the individual conscience. Keywords: Dream, Memory, Unconscious, Reverie, Psychoanalysis Introduction Selon le philosophe, Paul Valery, « le rêve est une hypothèse puisque nous ne le connaissons jamais que par le souvenir, mais ce souvenir est nécessairement une fabrication ». Pourtant, en songeant aux expressions telles que:vie de rêve, abandonner un rêve, briser un rêve, l’on n’est plus tenter de prendre à la légère un rêve aussi anodin qu’il puisse apparaître. À l’évidence, le terme « rêver», nonobstant son explication du Larousse synonymes & contraires (980) : « laisser aller ses pensées; méditer; s’évader; songer », nous insuffle à plus d’attention quant à son sens étymologique. A cet effet, en grammairien, Deschamps, de prime abord, attire notre attention sur la nuance qui existe entre le rêve et le songe. D’une part, le songeest un terme qui remonte de la plus haute antiquité et qui a toujours revêtu une résonnance positive ou emphatique. Émanant du sommeil, le songe tire son sens étymologique du latin somnium et du grec upnos (pour swopnos) proche du sanskrit svapnah, de la racine indo-européenne swep. En passant, il est intéressant de rappeler que, dans la mythologie grecque, les songes incarnaient des divinités, fils du sommeil, qui s’éclipsaient des Enfers par la porte de corne (à la différence des rêves qui passaient par celle d’ivoire) afin de s’infiltrer au domicile des hommes. Grosso modo, les songes sont qualifiés de « les visions de la nuit » et ce passage biblique du « Cantique des cantiques » des propos recueillis par la bien-aimée est un parfait exemple : « J’étais endormie mais mon cœur veillait » (chapitre 5 verset 2). Dans son effort à faire une distinction entre les rêves, Freud Sigmund « oppose le rêve diurne, Tagtraum au rêve nocturne Nachtraum : on devrait distinguer clairement le rêve éveillé » (le cas des personnages dans L’enfant de sable de Tahar Ben Jelloun), « le rêve endormi et la rêverie. La distinction se fait dans le verbe rêver, par des particules : rêver à, n’est pas rêver de. Rêver à [l’avenir] se fait éveillé en principe dans la journée, alors que rêver de [sa mort] a lieu dans le sommeil, en principe la nuit (par 1). » Puisque le rêve relève de l’inconscient qui, à son tour est indissociable de la mémoire, il nous incombe également de noter sa particularité dans cette tache discursive. Pour ce qui est du sens polysémique de ce mot, Victor O. Aire nous en éclaire en précisant la signification qui nous concerne dans cet article: « …s’agit Ŕil […] de la faculté de conserver et de rappeler des états de consciences passées et ce qui s’y trouve associé » (la mémoire) » (40). Cette définition sied au contexte de l’inconscient relatif au rêve. Le Petit Robert vient compléter cette panoplie d’explication « la mémoire comme l’esprit, en tant qu’il garde le souvenir du passé » (1569). Loin de nous être éloignés du thème qui a donné naissance à cet essai: la fonction 210 du rêve dansL’enfant de sable de Tahar Ben Jelloun, et qui sera traité dans la perspective théorique de Sigmund Freud, chef de file de la psychanalyse, précisons que notre thématique est présentée autour de cinq lignes de réflexion: l’introduction, une brève présentation du contexte littéraire de l’œuvre, un survol de la théorie psychanalytique de Sigmund Freud, son approche dans ladite œuvre, et la conclusion. Tahar Ben Jelloun, son actif littéraire et le corpus Écrivain de la 2e génération de la littérature maghrébine, Tahar Ben Jelloun est né à Fès (Maroc) en 1944 au sein d’une société traditionnelle érigée sur un système islamique qui cohabite mal avec le système colonial de l’époque. C’est dans cette atmosphère chargée, selon un article de YunusaOlaitanAremu, d’une situation de double domination [...] Dans un premier cas, il s’agirait de domination coloniale marquée par la violence institutionnelle et le mépris plus ou moins explicite à l’égard des cultures autochtones. Dans le second cas, cette domination se manifesterait par la subjugation de la femme du continent selon le concept patriarcal ou selon l’héritage culturel des peuples africains (168), Jelloun apprend vite à s’identifier « comme le poète du déracinement et des cicatrices de la méditerranée arabe » (436) ajouterait Jean Louis Roy. Au sujet de son itinéraire littéraire, celle-ci se fraie des chemins dans trois villes significatives à savoir : Fès (sa ville natale), Casablanca et Tanger où Charles Bonn relève que « Tahar Ben Jelloun transpose dans une écriture éminemment poétique les tensions politiques et l’histoire récente du Maroc […] une charge féroce contre un pouvoir corrompu […] et [d’une] répression féroce sous Hassan II » (569). Ainsi il poursuit son œuvre de sociocritique contre « une société fermée sur elle- même, débordant de tabous et d’interdits qui amputent l’affirmation de l’identité, de mettre en lumière un réseau complexe de victimes du monde, de la société et du soi » (34) écrit AlinaGageatu-ionicoscu dans sa thèse de doctorat. En tant que figure de proue dans le cadre de la littérature maghrébine de langue française, non seulement que Tahar Ben Jelloun est le plus représentatif et le plus lu des écrivains maghrébins, mais il s’active aussi à la promotion de celle-ci. En sa qualité de psychiatre et philosophe, il s’occupe tout autant des problèmes psychologiques des travailleurs immigrés en France et des correspondances avec le journal Le Monde et d’autres journaux à travers le monde. Sans jamais caché une aversion âpre vis-à-vis du uploads/Litterature/ l-x27-enfant-sable.pdf
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- Publié le Dec 13, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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