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Tous droits réservés © Protée, 2006 This document is protected by copyright law. Use of the services of Érudit (including reproduction) is subject to its terms and conditions, which can be viewed online. https://apropos.erudit.org/en/users/policy-on-use/ This article is disseminated and preserved by Érudit. Érudit is a non-profit inter-university consortium of the Université de Montréal, Université Laval, and the Université du Québec à Montréal. Its mission is to promote and disseminate research. https://www.erudit.org/en/ Document generated on 05/08/2019 12:27 p.m. Protée Quand la Bible s’ouvre à la lecture sémiotique Jean-Yves Thériault Fortune et actualité de Du sens Volume 34, Number 1, printemps 2006 URI: https://id.erudit.org/iderudit/013311ar DOI : https://doi.org/10.7202/013311ar See table of contents Publisher(s) Département des arts et lettres - Université du Québec à Chicoutimi ISSN 0300-3523 (print) 1708-2307 (digital) Explore this journal Cite this article Thériault, J. (2006). Quand la Bible s’ouvre à la lecture sémiotique. Protée, 34, (1), 67–75. https://doi.org/10.7202/013311ar Article abstract It is when the work Du sens was published that the biblical exegesis and Greimas’ semiotic came together. Beyond an initial shock and after having overcome difficulties stemmed from a radical change of epistemology, those disciplines learned to gain from each other. In the seventies, the biblical studies reached a turning point : they shifted towards synchronic approaches. They profited particularly from the Greimas’ semiotic. On the other hand, perusing of the Bible contributed to the semiotic : a refining of the analysis of relations between the subjects and a development of the theory of the figurativity. PROTÉE • volume 34 numéro 1 67 QUAND LA BIBLE S’OUVRE À LA LECTURE SÉMIOTIQUE JEAN-YVES THÉRIAULT Mais l’écriture sémiotique n’est pas seulement cette manifestation noble de l’histoire conçue comme une métamorphose des formes. Étant une praxis historique, elle ne peut faire autrement que manifester des contenus axiologiques et idéologiques, elle se dit même transformatrice de ces contenus, considérant leurs transformations comme le sens ultime de son faire. L’histoire jugera de l’efficacité de ces procédures. (Greimas, 1970: 15) AU COMMENCEMENT! Le début de l’aventure biblique de la sémiotique greimassienne coïncide avec la publication du recueil d’articles intitulé Du sens (1970). Se manifestait alors une crise des problématiques historiques dans les études bibliques. Se faisait sentir le besoin d’une réflexion fondamentale sur l’exégèse et ses méthodes dans le contexte du développement des études littéraires et des sciences du langage. Ce n’est cependant pas la parution elle-même du livre qui a instauré la rencontre des disciplines. Comme amorce des rapports entre la sémiotique et les études bibliques, on doit rappeler l’importance d’une session de trois jours au Grand Séminaire de Versailles en septembre 1968: une trentaine de spécialistes de la Bible s’étaient réunis autour d’A.J. Greimas, reçu en tant que sémanticien susceptible d’intéresser les exégètes. Les exposés de quelques membres du séminaire de Greimas sur les textes bibliques étonnèrent les exégètes par leur manière d’aborder le texte «tel qu’en lui-même il se donne à lire dans la matérialité de son écriture»1. Le choc d’une théorie et d’une procédure d’analyse qui faisaient abstraction de la dimension historique et des conditions anciennes de production du texte bousculait des conceptions bien ancrées de la recherche biblique. D’autres rencontres eurent lieu2 et de nombreux biblistes furent ainsi sensibilisés à cette nouvelle approche critique des textes qu’on appelait encore «analyse structurale». Après la sortie de Du sens de Greimas, le contact se poursuivit au gré de petits groupes de biblistes intéressés. Mettant en commun connaissances théoriques et tâtonnements sur les textes, l’analyse structurale entrait lentement dans le champ des volume 34 numéro 1 • PROTÉE 68 études bibliques. On fit d’abord de l’analyse du récit. Trois courants étaient représentés: Bremond, Barthes et Greimas. Ce dernier paraissait plus difficile. Il demandait aux exégètes habitués aux méthodes historiques (recherche des sources et histoire de la formation des textes) une conversion radicale dans la manière de lire les textes et d’appréhender le sens: passer d’une approche diachronique à une lecture immanente et synchronique. L’influence de la sémiotique greimassienne sur l’exégèse biblique fut toutefois la plus stimulante du fait de son intérêt pour la sémantique. À partir de 1973, le séminaire de Greimas à Paris devint la principale source d’inspiration des biblistes intéressés par la sémiotique3. LE CHOC L’exégète adepte de l’approche historique disposait déjà d’un vaste ensemble de méthodes servant à reconstituer les milieux d’origine des textes, à retracer l’histoire de leur composition, à vérifier le sens des mots et la valeur historique des événements relatés dans la Bible. Plus que l’ajout de quelques techniques et procédés complexes à un arsenal interprétatif déjà impressionnant, la sémiotique exigeait un changement radical de point de vue sur les textes. L’entrée de la sémiotique en exégèse biblique a marqué une rupture d’isotopie. Tradition-, Form- et Redaktionsgeschichte découlaient logiquement les unes des autres à l’intérieur du même paradigme. La méthode sémiotique relève d’un horizon épistémologique complètement étranger et importe dans le champ des études bibliques une attitude différente à l’égard du texte et une instrumentation sans lien avec celle de l’historico-critique. (Genest, 1992: 11-21) Habitués aux dissections en petites unités littéraires, aux strates de composition et à la recherche des sources, beaucoup de biblistes résistaient – et résistent encore – à cette approche qui s’intéresse au texte simplement comme il se donne à lire. En effet, la visée originale de la sémiotique littéraire repose sur le croisement de deux axiomes structuraux: le principe d’immanence qui affirme l’existence d’un sens immanent à l’objet textuel étudié, ce sens devant être construit à partir des structures propres de cet objet; et le principe de la différence qui affirme que le sens est saisi dans l’appréhension des différences internes à l’objet. Ces deux principes vont à l’encontre des pratiques de la démarche historique alors dominante en exégèse: le recours explicatif par le contexte historique, l’histoire de la composition orientée vers l’intention de l’auteur et l’étude du vocabulaire par l’étymologie et l’intertextualité. Il y eut aussi malentendu. On attendait de la sémiotique des résultats comparables à ceux des pratiques traditionnelles de l’exégèse, vérifiables et critiquables des points de vue habituels de la recherche biblique. On n’avait pas suffisamment saisi que la sémiotique n’était pas simplement une méthode à côté des autres pour l’interprétation des textes, mais qu’elle touchait à des questions plus fondamentales en recherche biblique, les «conditions premières de la saisie du sens – si l’on veut, de la production ou de la génération du sens –» (Greimas, 1970: 10); il fallait donc apprendre «à mieux connaître où il se manifeste et comment il se transforme» (ibid.: 17). Il fallait passer du sens conçu comme «fond», transmis par un auteur et interprété à partir de la «forme littéraire» lue en contexte de production historique, à la signification comme forme du contenu, un sens construit et articulé dans l’immanence du texte. Plus concrètement, on reprochait à la sémiotique ses procédures d’analyse trop formelles, utilisant un vocabulaire bien compliqué. On trouvait l’investissement trop laborieux pour une récolte cognitive bien mince et une pâture théologique assez maigre. De fait, c’est la manière nouvelle de concevoir le texte et le sens qui faisait difficulté. Depuis un siècle, la Bible était considérée comme document historique source de révélation, réservoir de savoir et de message à interpréter et à transmettre fidèlement. On était maintenant appelé à la visiter comme monument littéraire, pour lire et entendre dans cette cathédrale langagière ce qui se dit du sujet humain comme être de langage et sujet de parole. PROTÉE • volume 34 numéro 1 69 L’ANALYSE NARRATIVE L’introduction de la sémiotique dans le champ des études bibliques ouvrit cependant la lecture de la Bible aux nouvelles perspectives fournies par les sciences du langage et des systèmes signifiants. Au cours de la première décennie de pratique sémiotique pour la lecture des livres bibliques, c’est la grammaire narrative dans toute son extension qui fut mise à contribution. La syntaxe narrative fut présentée progressivement dans la revue Sémiotique et Bible, puis reprise plus systématiquement dans le manuel du Groupe d’Entrevernes (1979)4. Elle s’exerçait principalement sur la multitude des récits bibliques, en particulier les mini-récits des évangiles. On peut retenir comme ses meilleurs fruits les études de ce Groupe parues dans Signes et Paraboles (1977)5. Les récits courts fournissaient un terrain privilégié d’apprentissage pour la mise en œuvre de la dimension narrative et de la dimension discursive alors organisée autour des rôles thématiques. Il était plus facile pour les exégètes, habitués à interpréter des mots et des phrases, de modifier leur pratique sur des récits, car ceux-ci étaient plus aisément reconnaissables comme unités construites selon des règles qui dépassent la structure de la phrase. Les schémas d’organisation narrative élaborés par Greimas se prêtaient bien à l’analyse des courts récits bibliques: on s’exerçait à identifier les programmes narratifs selon les quatre grandes phases et la triple épreuve, en essayant de préciser les rôles des actants et d’enregistrer l’inversion des contenus. Au cours des années 1970, la pratique biblique de la sémiotique greimassienne reposait ainsi sur «Les jeux des contraintes sémiotiques», les «Éléments d’une grammaire narrative» et «La structure des actants du récit». Mais elle utilisait aussi uploads/Litterature/ quand-la-bible-s-x27-ouvre-a-la-lecture-semiotique.pdf
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- Publié le Aoû 21, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
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