Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Anomalies du contrôle respiratoir
Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Anomalies du contrôle respiratoire en pédiatrie Abnormal control of breathing in pediatrics S. Dauger*, N. Ramanantsoa Service de Réanimation et Surveillance Continue Pédiatriques, Pôle de Pédiatrie Aiguë et Médecine Interne, Hôpital Robert-Debré, Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, 48, boulevard Sérurier, 75019 Paris, France Table ronde Mots clés : ventilation, nouveau-né, hypoxie, hypercapnie, apnées 617 * Auteur correspondant. e-mail : stephane.dauger@rdb.aphp.fr Systèmes de régulation cardio-vasculaire et respiratoire en pédiatrie L a ventilation est une fonction métabolique vitale qui tend à maintenir constantes les pressions artérielles partielles en oxygène (PaO2) et en dioxyde de carbone (PaCO2). Le contrôle de cette fonction autonome est assuré par un ensemble de structures du tronc cérébral recevant des afférences périphé- riques (corpuscules carotidiens, mécanorécepteurs pulmonai- res…), centrales (chémorécepteurs centraux) et suprapontiques (température, état de vigilance…), et qui régulent l’activité des principaux muscles respiratoires (diaphragme, intercostaux) [1]. Les pathologies du contrôle de la ventilation s’exprimant dès l’enfance sont peu nombreuses en comparaison des affections de l’effecteur pulmonaire qui occupent beaucoup plus les pédia- tres (asthme, pneumopathies, pathologies ORL). Néanmoins, elles peuvent avoir des conséquences sévères tant en termes de mortalité (malaises graves et mort subite) que de morbidité (développement cérébral). Comme toutes les pathologies rares, il est souvent diffi cile de les diagnostiquer et donc de les prendre en charge. Après un bref rappel des structures et des caractéristiques déve- loppementales du contrôle de la ventilation, nous présenterons ses principales pathologies auxquelles peut être confronté le pédiatre tant en période néonatale qu’au-delà. Nous laisserons délibérément de côté les anomalies pédiatriques du contrôle des voies aériennes supérieures et des interactions cardio-respiratoires qui seront présentées lors d’un autre exposé de cette session. Physiologie du contrôle de la ventilation chez le nourrisson et l’enfant Rythme respiratoire La génération du rythme respiratoire a lieu au niveau de plusieurs groupes cellulaires situés à la partie ventro-latérale du bulbe [2]. Ces groupes neuronaux se mettent en place entre la 10e et la 20e semaine de gestation, et sont responsables des mouvements respiratoires fœtaux qui sont alors indépendants du métabolisme [1]. Un grand nombre de neuromédiateurs excitateurs (glutamate) ou inhibiteurs (GABA) modulent cette activité rythmique basale, pour passer d’un état inhibiteur in-utero à un état excitateur au moment de la naissance, essentiellement sous l’effet fortement stimulant des affl uences suprapontiques [3]. L’instabilité du rythme respiratoire est une des principales caracté- ristiques du contrôle ventilatoire du nouveau-né et du nourrisson. Elle se manifeste par la survenue d’apnées et de phase de respira- tion périodique associant apnées et hyperventilation [1]. Sensibilité à l’oxygène Les variations de PaO2 sont essentiellement détectées par les chémorécepteurs périphériques, principalement localisés dans les corpuscules carotidiens et aortiques [1]. Ces chémorécepteurs participent à la réponse ventilatoire à l’hypoxie, et leur activité est momentanément sidérée par la stimulation hyperoxique. Ils contribuent aussi à la réponse d’éveil à l’hypoxie. Ces chémorécepteurs ne deviennent sensibles aux variations de PaO2 que dans les 24 à 48 heures suivant la naissance, temps nécessaire à leur adaptation entre l’état d’hypoxémie fœtale et la relative hyperoxie post-natale [3]. Alors que l’enfant et l’adulte augmentent leur ventilation de manière soutenue en cas d’hy- poxie, le nourrisson présente durant les premières semaines de vie une réponse ventilatoire biphasique à l’hypoxie, marquée par une hyperventilation de quelques minutes suivie d’une hypoven- tilation en dessous de sa ventilation de base [3]. Ce phénomène qui peut parfois perdurer jusqu’à l’âge adulte [3] serait le refl et de l’adaptation du métabolisme du nourrisson à son environnement. Tout ceci participe aussi à l’instabilité périnatale du contrôle de la ventilation. Sensibilité à l’hypercapnie Les chémorécepteurs centraux, sensibles à la PaCO2 et au pH du liquide céphalo-rachidien, ne sont pas encore complètement identifi és, mais semblent localisés de manière très étendue dans le tronc cérébral, au niveau de la surface ventrale du bulbe. Ce système est mature dès la naissance et entraîne une augmen- tation de la ventilation en cas d’hypercapnie. Afférences suprapontiques Enfi n, l’activité des réseaux respiratoires bulbopontiques dépend aussi de nombreuses infl uences supra-pontiques (cortex, hypotha- lamus, structures limbiques) qui permettent le contrôle volontaire de la ventilation et sa modulation selon les émotions, la vigilance, les stades de sommeil, les rythmes circadiens et la température. Le contrôle de la ventilation fait preuve d’une grande plasticité et semble présenter une grande redondance de ses différentes composantes. © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Archives de Pédiatrie 2008;15:p617-p619 618 S. Dauger et al. Pathologies pédiatriques du contrôle de la ventilation Les apnées Les apnées du prématuré sont défi nies comme des pauses respi- ratoires de plus de 10 s. Les infections, les variations thermiques, le refl ux gastro-œsophagien, les anomalies métaboliques peuvent augmenter le nombre et la durée des apnées. On s’accorde sur le fait que les apnées ont pour origine l’immaturité du contrôle respiratoire. Cette instabilité est d’autant plus marquée que le nouveau-né est prématuré [1] mais demeure tolérable tant qu’elle n’est pas associée à des désaturations en oxygène voire à des bra- dycardies [4]. La sensibilité au CO2 atténuée des prématurés par rapport aux nouveau-nés à terme, accentuée par la part impor- tante de sommeil agité à cet âge, pourrait jouer un rôle dans cette pathogénie [3]. Le néonatologue a ainsi l’habitude de traiter les apnées cliniquement signifi catives bien que l’évaluation précise de ces traitements reste encore à faire [4]. D’autres nourrissons, nés à terme et sans problème néonatal par- ticulier, peuvent eux aussi présenter une ventilation périodique avec des désaturations profondes en oxygène lors des phases apnéiques. Une évaluation complète de leur contrôle ventilatoire est alors nécessaire. La majorité de ces nourrissons bénéfi cie d’un traitement analeptique respiratoire dont ils peuvent être sevrés au bout de quelques semaines, après une nouvelle évaluation polysomnographique. On évoque là aussi une immaturité transi- toire du contrôle de la ventilation. Enfi n, les apnées obstructives, comme par exemple lors d’une obésité ou d’une hypertrophie amygdalienne, peuvent entraîner une morbidité très importante chez les enfants plus grands, par modifi cation de l’architecture du sommeil et altération des capa- cités d’apprentissage [5]. Il semblerait que l’obstruction des voies aériennes supérieures ne soit pas le seul déterminant de cette morbidité et que l’environnement et la prédisposition génétique jouent aussi un rôle important. Syndrome d’hypoventilation alvéolaire centrale congénitale Le Syndrome d’Ondine ou Syndrome d’Hypoventilation Alvéolaire Centrale Congénitale (SHACC) est l’exemple le plus typique d’un défaut persistant de maturation du contrôle chimique de la ventilation [6]. Le SHACC est caractérisé par une hypoventilation alvéolaire sévère au cours du sommeil (persistante pendant l’état de veille dans les cas les plus graves) associée à une absence de réponse ventilatoire à l’hypercapnie et à l’hypoxie. L’hypothèse étiopathogénique actuelle est une anomalie de l’intégration des messages des chémorécepteurs périphériques au niveau du noyau du tractus solitaire. Le diagnostic peut être évoqué dès les premiers jours de vie devant un tableau typique d’hypercapnie sans réponse ventilatoire adaptée, parfois associé à des profondes désaturations en oxygène. La très grande majorité des patients (95 %) présente une expansion d’alanines plus ou moins importante de l’exon 3 du gène PHOX-2B, un facteur de transcription des neu- rones noradrénergiques [7]. Cette anomalie fait désormais partie de la défi nition du SHACC selon le registre européen en cours de constitution. Un bilan complet de l’ensemble des dysautonomies habituellement associées est fondamental afi n d’adapter la prise en charge, qui nécessite au minimum une assistance ventilatoire au cours du sommeil. La mort subite du nourrisson La mort subite du nourrisson (MSN) est défi nie depuis 1969 comme la survenue d’un décès subit chez un enfant de moins d’un an et dont la cause n’est pas déterminée après un examen complet com- prenant une autopsie et une analyse des conditions de survenue de la mort. La MSN demeure la première cause de mortalité postnatale dans les pays développés, malgré la baisse de l’incidence de 38 % obtenue grâce à des campagnes de réduction du risque préconisant le sommeil sur le dos [8]. Un modèle de triple risque a été proposé pour expliquer la survenue d’un malaise grave ou d’une mort subite : (i) un nourrisson vulnérable ; (ii) une période critique de développement du contrôle des fonctions homéostatiques ; (iii) un facteur extérieur d’agression (une infection, la fi èvre, l’hyperthermie ambiante, et le sommeil en position ventrale) [8]. Les marqueurs de vulnérabilité retrouvés sont notamment une fréquence élevée d’apnées, des épisodes de respiration périodique, des défauts de chémosensibilité, une altération de la réaction d’éveil aux stimuli chimiques et des anomalies de la fréquence et du rythme cardia- ques. L’origine de cette vulnérabilité n’est pas connue, mais les recherches s’orientent vers les anomalies de neurotransmetteurs, et plus particulièrement la sérotonine, impliquant plusieurs récepteurs dans le noyau arqué et le raphé caudal. Anomalies du tronc cérébral et syndrome d’Arnold-Chiari Devant un tableau d’hypoventilation alvéolaire centrale, l’image- rie cérébrale au mieux réalisée par une IRM, est fondamentale afi n d’éliminer une atteinte anatomique du tronc cérébral. L’exemple le plus caricatural est le syndrome d’Arnold-Chiari dont le traitement chirurgical pourra défi nitivement supprimer l’hypo- ventilation. D’autres nouveau-nés peuvent présenter des atteintes malformatives du uploads/Management/ 2008-anomalies-du-controle-respiratoire-en-pediatrie.pdf
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- Publié le Apv 20, 2022
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