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© 2014 Pearson France – Stratégique 10e édition Stratégique 10e édition G. Johnson, R. Whittington, K. Scholes, D. Angwin, P. Regnér F. Fréry Chapitre 2 – L’environnement Étude de cas Une nouvelle page pour la publicité Le 28 juillet 2013, le directeur général d’Omnicom, John Wren, et le président de Publicis, Maurice Lévy, annoncèrent la fusion de leurs deux entreprises, respectivement numéro deux et trois mondiales de la publicité. Avec un chiffre d’affaires cumulé de 17,7 milliards d’euros en 2012 et près de 40 % du marché publicitaire aux États-Unis, la nouvelle entité ainsi créée, baptisée Publicis Omnicom Group, deviendrait le plus gros groupe de publicité mondial, devant le Britannique WPP. L’opération fut autorisée par les autorités de la concurrence américaines et européennes dans les mois qui suivirent, ce qui laissait entrevoir une réalisation effective pour mi-2014. Cette fusion n’était qu’un nouvel épisode du bouleversement que connaissait l’industrie de la publicité au milieu des années 2010. Les agences de publicité étaient en effet confrontées à une série de défis inédits. Les marchés historiques et les méthodes établies, développés pour la plupart en Amérique du Nord et en Europe de l’Ouest suite à l’émergence de la société de consommation au XXe siècle, étaient radicalement remis en cause. L’industrie devait faire face à deux évolutions qui bouleversaient sa dynamique et ses structures. La première était l’irruption de nouveaux acteurs tels que Google et Yahoo!, qui captaient une part croissante des budgets publicitaires. La seconde était un basculement des marchés vers de nouvelles zones géographiques. Tout cela réduisait les budgets publicitaires alloués par les clients aux agences historiques, ce qui attisait leur rivalité concurrentielle. La fusion entre Omnicom et Publicis résultait notamment de ces tendances. Le modèle économique de la publicité Traditionnellement, la tâche des agences de publicité consistait, au nom de leurs clients (les annonceurs), à cibler une audience spécifique afin de la convaincre de consommer un produit ou un service. Pour cela, les agences communiquaient sur les marques de leurs clients au travers de toute une série de supports. La marque permettait aux consommateurs de différencier les offres, et c’était aux agences de publicité de la positionner de telle manière qu’elle soit associée avec les attributs et les fonctions valorisées par la cible. Il pouvait s’agir de marques grand public (par exemple L’Oréal, Coca-Cola ou Toyota) ou de marques ciblant des entreprises (par exemple Airbus, IBM ou KPMG). Certaines marques s’adressaient à la fois aux consommateurs et aux entreprises (par exemple Apple ou Microsoft). Outre les entreprises privées, la clientèle des agences de publicité comprenait aussi les pouvoirs publics, qui allouaient d’importants budgets pour accompagner leurs politiques de santé, d’éducation ou de sécurité routière (« Boire ou conduire, il faut choisir »). Le gouvernement britannique avait ainsi dépensé 285 millions de livres en publicité en 2012. Les associations, les partis politiques, les syndicats, voire les églises utilisaient également la publicité pour attirer des donateurs, recruter des © 2014 Pearson France – Stratégique 10e édition 2 adhérents ou véhiculer divers messages. Ces différents clients représentaient environ 3 % des dépenses publicitaires mondiales. Les agences se comportaient effectivement comme des « agents » : c’est au nom de leurs clients qu’elles plaçaient les publicités dans les médias (télévision, presse, radio, Internet, etc.). Les annonceurs faisaient appel aux agences pour bénéficier de leur savoir-faire, de leurs compétences, de leur créativité et de leur expérience. Les agences se rémunéraient généralement au travers d’honoraires proportionnels au temps passé à concevoir les campagnes de publicité, plus une commission sur les services et les médias achetés au nom des clients. Cependant, depuis quelques années, de grands annonceurs tels que Coca-Cola ou Procter & Gamble instauraient un nouveau modèle, dans lequel la rémunération de l’agence était fonction du résultat de la campagne, mesuré par toute une série d’indicateurs (croissance des ventes, part de marché, etc.). Afin d’éviter d’éventuels conflits d’intérêts, la fusion entre Publicis et Omnicom laissait entrevoir une recomposition de leur portefeuille de clients. Omnicom s’occupait en effet des campagnes de Pepsi, alors que Publicis travaillait pour Coca-Cola. De même, Omnicom gérait le budget d’Apple et de Microsoft, et Publicis celui de Samsung et de Google. La croissance de l’industrie Au cours des deux précédentes décennies, le montant global investi en publicité avait très fortement augmenté. Pour l’année 2012, il était estimé à plus de 165 milliards de dollars rien qu’aux États-Unis et à 483 milliards au niveau mondial. Même si la crise avait provoqué un recul temporaire, notamment en Europe, on estimait que le marché dépasserait les 560 milliards en 2015. En 2013, l’indice Dow Jones spécialisé dans les agences de médias (qui comptait notamment les grandes agences de publicité) avait augmenté 20 % plus vite que la moyenne de la Bourse de New York. Le marché mondial de la publicité avait ainsi connu une croissance de 3,5 % en 2012 et de 3,9 % en 2013, mais on s’attendait à une croissance de 5,6 % en 2015. Au sein de cette croissance générale, l’équilibre du marché publicitaire connaissait cependant de fortes évolutions. Des régions négligeables en termes d’investissement publicitaire à la fin du XXe siècle prenaient une importance croissante, notamment les BRICS, mais aussi le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord. On avait ainsi vu apparaître des agences spécialisées dans le marketing islamique, qui veillaient à véhiculer des messages respectueux des convictions des consommateurs musulmans. L’analyse des tendances futures montrait l’émergence de marques de grande consommation dans des régions du monde où les investissements publicitaires étaient encore embryonnaires (voir le tableau 1). On estimait au total que les marchés émergents contribueraient à 63 % de la croissance des investissements publicitaires entre 2012 et 2015, ce qui ferait passer leur poids de 34 à 38 % du total. En 2013, la Chine et le Brésil faisaient déjà partie des six premiers marchés mondiaux, et il était prévu que la Russie les rejoigne dans les dix premiers avant 2015. En termes d’industries, sept des vingt plus gros annonceurs mondiaux étaient des constructeurs automobiles. Cependant, les deux entreprises dont les budgets publicitaires étaient les plus élevés étaient Procter & Gamble et Nestlé, suivis par Samsung. L’automobile, l’agroalimentaire, la santé, les cosmétiques, la distribution, les télécommunications et le divertissement figuraient parmi les vingt principaux clients de la publicité. Les marques globales étaient celles qui dépensaient le plus : les 100 plus gros annonceurs représentaient environ 50 % des dépenses publicitaires mondiales. La concurrence Il existait toutes sortes d’agences publicitaires, depuis de minuscules boutiques d’une ou deux personnes (qui sous-traitaient l’essentiel de leur activité à des créatifs indépendants), jusqu’à des groupes mondiaux rassemblant plus de 150 000 salariés. L’industrie avait connu une phase de concentration qui avait donné naissance à des réseaux d’agences globaux (voir le tableau 2), dont les plus gros avaient leur siège à New York, Londres ou Paris. Ces réseaux multi-agences s’appuyaient sur la créativité de leurs équipes (mesurée par de nombreux classements et trophées), leur pouvoir de négociation dans l’achat d’espaces dans les médias, leur connaissance des marchés et leur présence internationale. © 2014 Pearson France – Stratégique 10e édition 3 Tableau 1 Dépenses publicitaires par région sur les principaux supports : journaux, magazines, télévision, radio, cinéma, affichage, Internet (en millions de dollars US, conversions au taux moyen de 2009) Tableau 2 Les cinq plus gros réseaux d’agences publicitaires mondiaux en 2011 Certains groupes s’étaient intégrés verticalement pour proposer toute une gamme de services à leurs clients. Omnicom avait ainsi fait l’acquisition d’imprimeurs et de centres d’appel. Derrière les géants mondiaux, les concurrents de taille moyenne s’appuyaient sur leur connaissance approfondie de certains marchés, se spécialisaient dans certains services comme le numérique, ou construisaient une réputation d’innovation et de créativité grâce à des campagnes particulièrement remarquées. Cependant, elles utilisaient plus souvent des créatifs indépendants que les grands réseaux. Beaucoup de petites agences apparaissaient et beaucoup disparaissaient. La plupart étaient fondées par d’anciens salariés des grandes agences, à l’image de Adam+Eve, issue de Young & Rubicam. Réciproquement, les grands réseaux rachetaient fréquemment des petites agences spécialisées afin d’acquérir leurs compétences, de parfaire leurs gammes de services ou de s’adresser à de nouvelles cibles. Publicis avait ainsi acquis Razorfish pour 530 millions de dollars en 2009, alors que WPP avait mis la main sur AKQA pour 540 millions de dollars en 2012. Dans les deux cas, il s’agissait pour ces réseaux historiques d’accompagner le basculement vers la publicité en ligne. © 2014 Pearson France – Stratégique 10e édition 4 Le marché de la publicité était en effet fortement bouleversé par l’irruption des géants d’Internet tels que Google, Yahoo! ou Bing, qui utilisaient les données qu’ils récoltaient sur leurs utilisateurs pour les monétiser auprès des annonceurs. Sir Martin Sorrell, le directeur général de WPP, soulignait que les interactions de son groupe avec Google prenaient une importance croissante, au point de concurrencer les relations historiques avec les chaînes de télévision ou la presse, voire de mettre en cause le partenariat avec certains annonceurs. WPP groupe avait ainsi dépensé plus de 2 milliards de dollars avec Google en 2012 (soit un doublement en uploads/Marketing/ strategique-10-e-edition-chapitre-2-lenv.pdf

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  • Publié le Fev 15, 2021
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