Introduction Jacques Grégoire C H A P I T R E ÉVALUER LES APPRENTISSAGES Docume

Introduction Jacques Grégoire C H A P I T R E ÉVALUER LES APPRENTISSAGES Document téléchargé depuis www.cairn.info - CNRST Rabat - - 196.200.131.104 - 04/02/2018 11h15. © De Boeck Supérieur Document téléchargé depuis www.cairn.info - CNRST Rabat - - 196.200.131.104 - 04/02/2018 11h15. © De Boeck Supérieur Évaluer les apprentissages 14 L’évaluation des apprentissages scolaires reste fortement influencée par un point de vue behavioriste. En effet, l’attention des enseignants et des psychologues scolaires se concentre souvent sur une réalité observable de ma- nière directe et objective : la performance de l’élève. Ce point de vue peut être justifié lorsque le but de l’évaluation est de sélectionner, de classer ou de cer- tifier. Par exemple, lors d’un examen d’admission, la quantification des perfor- mances et leur comparaison à un seuil minimum procure généralement des informations suffisantes pour pouvoir prendre des décisions adéquates. La place de plus en plus grande accordée aujourd’hui à l’évaluation for- mative et à l’évaluation diagnostique modifie en profondeur les besoins des pra- ticiens. Dans ce cadre, l’important est moins d’enregistrer la réussite ou l’échec que de comprendre ce qui est sous-jacent aux performances observées. Quelle démarche l’élève a-t-il suivi pour arriver à la réponse qu’il nous propose ? A-t- il compris le sens de la procédure utilisée ? Où a-t-il rencontré des difficultés ? Comment a-t-il fait face à ces difficultés ? Répondre à ces questions est essen- tiel pour pouvoir intervenir de manière efficiente. En fait, dans une perspective formative ou remédiative, la performance observée doit être prise comme un symptôme de l’apprentissage ou de la difficulté d’apprentissage. Le travail de l’évaluateur est de décoder ce symptôme, de découvrir sa véritable significa- tion. Ici, l’erreur n’est plus vue comme une faute mais comme un indicateur du dysfonctionnement d’un apprentissage. Son analyse est le point de départ obli- gé de toute démarche d’aide. Comprendre ce qui se passe dans la tête de l’élève implique que le pra- ticien réalise, sur base de ses observations, des inférences à propos d’une réa- lité qu’il ne peut directement observer. Pour pouvoir réaliser ces inférences, il a besoin d’une théorie du fonctionnement mental et de l’apprentissage. De ce point de vue, la théorie piagétienne a constitué, et constitue encore, une réfé- rence importante pour de nombreux enseignants et psychologues scolaires. Elle offre en effet un cadre conceptuel pour comprendre la construction pro- gressive du raisonnement de l’enfant. Elle permet en particulier d’expliquer certaines difficultés d’apprentissage par la non acquisition d’opérations menta- les relativement générales. Malheureusement, la théorie piagétienne reste sou- vent insuffisante pour comprendre de manière plus précise les apprentissages en situation scolaire. En effet, elle ne prend guère en compte les facteurs con- textuels et proprement psychologiques qui, inévitablement, interviennent dans tout apprentissage. La psychologie cognitive apparaît aujourd’hui comme une référence théorique importante pour le praticien soucieux de comprendre le sujet appre- nant. Elle lui procure de nouveaux concepts qui viennent combler les lacunes de la théorie piagétienne. Toutefois, à l’inverse de la théorie piagétienne, la psy- chologie cognitive ne constitue pas une théorie unifiée. Il serait donc plus cor- rect de parler des théories cognitives, au pluriel. Bien que la transition entre le behaviorisme et le cognitivisme se soit faite progressivement, on peut situer le démarrage du courant cognitiviste autour de 1960. Avec le recul, la conférence donnée par Allen Newell et Her- Document téléchargé depuis www.cairn.info - CNRST Rabat - - 196.200.131.104 - 04/02/2018 11h15. © De Boeck Supérieur Document téléchargé depuis www.cairn.info - CNRST Rabat - - 196.200.131.104 - 04/02/2018 11h15. © De Boeck Supérieur Introduction 15 bert Simon en 1958 (Lachman et al., 1979) semble avoir joué le rôle d’un dé- clencheur. Newell et Simon proposèrent alors une analogie entre le traitement de l’information par l’ordinateur et par l’être humain. La nouveauté ne prove- nait pas seulement du rapprochement entre la pensée humaine et le fonction- nement de l’ordinateur. Elle venait surtout de l’affirmation d’un point de vue radicalement différent de celui du behaviorisme. En effet, les chercheurs por- taient leur attention sur ce qui se passait entre le stimulus et la réponse et pré- tendaient étudier les processus internes de manière scientifique. L’affirmation que les processus mentaux existent et peuvent être étu- diés rigoureusement constitue le premier postulat sur lequel s’accordent les chercheurs qui s’inscrivent dans le courant cognitiviste. Un second postulat est que l’être humain traite de manière active l’information reçue : il sélectionne, met en relation, calcule... Enfin un troisième postulat sur lequel se rejoignent les cognitivistes est qu’il est possible d’évaluer ce traitement sur la base du temps de réponse et de la précision de la réponse. En effet, les traitements mentaux prennent du temps. Par conséquent, il est possible d’estimer quels processus mentaux sont mis en oeuvre, en comparant le temps mis pour répon- dre à différents stimuli. Dans le présent ouvrage, le chapitre de Fischer propo- se une intéressante illustration de l’usage du temps de réponse pour l’étude des processus mentaux. La précision de la réponse est également un bon indica- teur des traitements mentaux réalisés par un sujet. Pour pouvoir répondre cor- rectement à certains stimuli, le sujet peut en effet être contraint d’utiliser une procédure déterminée. Les erreurs qu’il va éventuellement commettre seront alors la manifestation de l’usage de procédures alternatives, moins adéquates. Il est évident que les théories cognitives offrent un cadre conceptuel nous permettant de mieux comprendre les apprentissages des élèves. Mais le passage de la théorie à la pratique ne va malheureusement pas de soi. La majo- rité des chercheurs en psychologie cognitive ne se sont pas intéressés aux ap- plications de leurs découvertes. Il existe donc un important décalage temporel entre le développement des modèles théoriques et leur traduction dans les pra- tiques d’évaluation. Les colloques et les publications sur cette question com- mencent seulement à apparaître. Et de nombreuses questions théoriques et méthodologiques restent posées. C’est dans ce contexte que, dans le cadre des rencontres du Réseau Education et Formation (REF) de Louvain-la-Neuve (septembre 1994), nous avons choisi de consacrer un symposium à la question des apports de la psy- chologie cognitive à l’évaluation des apprentissages scolaires. Durant deux jours, des spécialistes de la psychologie cognitive et de l’évaluation des appren- tissages se sont rencontrés pour échanger sur cette question. Le présent ouvrage est le fruit de ces rencontres particulièrement stimulantes pour la ré- flexion. Nous espérons que le lecteur y trouvera une source d’inspiration et un ferment pour le développement de ses propres pratiques. Pour faciliter la consultation de cet ouvrage, nous avons regroupé les communications selon quatre grands thèmes : (1) l’évaluation des apprentis- sages mathématiques; (2) l’évaluation de la lecture; (3) la place de la métaco- Document téléchargé depuis www.cairn.info - CNRST Rabat - - 196.200.131.104 - 04/02/2018 11h15. © De Boeck Supérieur Document téléchargé depuis www.cairn.info - CNRST Rabat - - 196.200.131.104 - 04/02/2018 11h15. © De Boeck Supérieur Évaluer les apprentissages 16 gnition dans l’évaluation et (4) les implications psychométriques des nouveaux modèles d’évaluation. La première partie, consacrée à la mathématique, comprend quatre ar- ticles. Dans le premier de ceux-ci, Jacques Grégoire réfléchit sur les modèles utilisés pour l’évaluation diagnostique des troubles des apprentissages mathé- matiques. Il confronte en particulier le modèle piagétien et différents modèles cognitivistes. Jacqueline Bideaud aborde ensuite la question de l’évaluation des capacités “mathématiques” que possèdent déjà les jeunes enfants avant d’aborder l’apprentissage de la mathématique élémentaire. Elle brosse par la même occasion un tableau des théories piagétiennes et néopiagétiennes de l’acquisition de la notion de nombre. Jean Retschitzki présente, dans une per- pective historique, les apports de la psychologie cognitive pour la compréhen- sion de la résolution de problèmes. Il en souligne certaines limites et note l’émergence de modèles explicatifs concurrents. Enfin, Jean-Paul Fischer dé- crit la mise en place en situation scolaire d’une évaluation du temps de réponse à des calculs élémentaires. Les possibilités diagnostiques de cette méthode d’évaluation sont illustrées et discutées. La seconde partie de l’ouvrage est centrée sur le thème de la lecture. Le texte de Christine Jourdain, Daniel Zagar et Bernard Lété est consacré à l’évaluation diagnostique des difficultés de lecture chez les adultes. Un cadre théorique est proposé et un ensemble d’épreuves est présenté, permettant une évaluation pas à pas des processus en jeu dans l’acte de lecture. Bernard Lété présente l’usage que l’on peut faire de l’ordinateur pour améliorer les capacités en lecture. Au travers d’une analyse minutieuse de la littérature sur cette ques- tion, il nous montre comment, en s’appuyant sur un modèle de la lecture, l’or- dinateur peut devenir un outil d’évaluation formative particulièrement efficace. La troisième partie de l’ouvrage concerne l’utilisation du concept de métacognition dans le cadre de l’évaluation formative. Gérard Scallon nous re- trace l’évolution des pratiques d’évaluation formative et analyse les difficultés rencontrées. Il nous montre comment la psychologie cognitive, particulière- ment grâce au concept de métacognition, a permis à l’évaluation formative de sortir des ornières dans lesquelles elle risquait de s’enliser. José-Luis Wolfs dé- veloppe plus spécifiquement l’usage de la métacognition comme moyen de fai- re participer l’apprenant uploads/Philosophie/ e-valuer-les-apprentissages-les-apports-de-la-psychologie-cognitive 1 .pdf

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