INTRODUCTION (p.2-3) 1 - La perception : de la définition classique à l’incroya
INTRODUCTION (p.2-3) 1 - La perception : de la définition classique à l’incroyable phénomène de la synesthésie. (p.4-14) a - un mécanisme cognitif sensible et infini (p.4-7) b - l’imagerie interne selon Oliver Sacks (p.7-11) c - « la théorie de tout » ou l’intelligence des sens : la synesthésie (p.11-14) TRANSITION #1 : la littérature synesthésique (p.15-16) 2 - Le designer graphique, maître de l’image et donc des sens ? (p.17-29) a - couleurs-formes, leurs pouvoirs d’influence sur notre perception et sensibilité (p.17-22) b - le graphiste: inventeur d’outils perturbant la perception du public (p.22-26) c - un travail de retranscription sensoriel se heurtant aux limites du design graphique ? (p.26-29) TRANSITION #2 : la synergie entres arts et sciences (p.30-31) 3 - Le phénomène neurologique comme processus créatif, un tremplin vers l’expérience totale (p.32-41) a - les avancées technologiques et les processus de (re)créations sensorielles (p.32-35) b - l’expérience immersive, du musée au magasin (p.35-39) c - vers une écriture graphique totale (p.39-41) CONCLUSION (p.42) BIBLIOGRAPHIE/SOURCES (p.43-44) ANNEXE (p.45-52) Laura Vincent DSAAD design graphique - Ésaab, Nevers. 2 Sommes-nous maître à bord de notre perception ? Il va sans dire que cette inter- rogation introspective ne peut prétendre à une réponse univoque. Tenter d’y apporter une définition dogmatique reviendrait à fermer les yeux sur les travaux de nombreux penseurs depuis des siècles et s’en tenir à la science, pour croire en une théorie universelle, mènerait la susdite réflexion à une catégorisation peu fructueuse, voire périlleuse. L’humanité ne peut être disséquée en tant qu’un tout percevant mais bien en tant que d’innombrables indi- vidus cultivant leur manière d’être au monde. Pourtant il n’est pas seulement, voire aucu- nement question d’une corrélation culturelle mais bien naturelle, la perception étant innée à l’individu. Détournons la connaissance scientifique pour amorcer cette réflexion selon les recherches de la biophysique, en entendant la perception comme la relation de l’action du vivant à son environnement. Pour fuir les carcans scientifiques, dirigeons notre pensée vers la perception sen- sorielle, celle de l’immédiateté, d’abord restituée par les sens, ensuite jugée et imprimée par l’œil de l’esprit. Alors se pose la question essentielle-existentielle de savoir ce que nous délivrent nos sens. Quel circuit ou court-circuit emprunte l’input perçu ? De cette interrogation, gardons l’idée d’un « court-circuitage » des sens, mais de quel type ? Tel que Arthur Rimbaud le conte par sa plume synesthésique1 ? Ou bien à l’instar de Maurice Mer- leau-Ponty qui l’entend comme une contingence fondamentale, affirmant par ailleurs que « La synesthésie est la règle »2 ? Poétique ou philosophique, les tentatives d’esquisses de réponses au problème énoncent un autre concept, cette fois neurologique : la synesthésie. Si cette notion semble être étrangère pour beaucoup, c’est qu’elle est intrinsèque à la manière de percevoir d’un faible pourcentage d’individus et aussi par sa nature de sujet actuel de recherches en neurosciences. Ce phénomène d’associations incroyables des sens demeure encore peu connu pour le grand public, notons que ceux qui en sont les vision- naires en sont souvent eux-mêmes inconscients. En effet, c’est souvent en lisant un article que des sujets à la synesthésie, appelés synesthètes, se rendent compte de l’unicité inouïe de leur mode de perception. Bien que non-synesthète, j’ai moi-même été initiée à l’appréhen- sion de ce phénomène à la suite d’un article paru dans le magazine NÉON3 l’an passé. Lire que l’on pouvait avoir un goût en bouche par le toucher de telle matière m’a interloqué ; ou encore comment est-il possible d’associer une couleur précise à un graphème et de lui administrer en plus de cela un caractère humain ? Si aujourd’hui on parle des synesthètes comme des cyborgs ou encore comme des individus dotés de super-pouvoirs, comment est- il envisageable de communiquer et de dévoiler ces différents types de correspondances hors du commun à un public de non-initiés ? Lever le voile sur cette incroyable imagerie interne semble être plus convenu à un discours théorisant, les mots étant moins risqués qu’une illustration arbitraire, souvent très abstraite. Alors si parler du phénomène à notre raison semble être un exercice délicat, s’adresser directement à nos sens en leur faisant vivre une expérience extraordinaire se présente comme une issue directe, intelligible par tous. Créer une zone d’expériementation multisensorielle où l’individu serait immergé a déjà été amorcé par de nombreux artistes contemporains qui œuvrent à troubler pour mieux interroger la perception première du spectateur. Si certains artistes du sensible ne se basent pas sur les mécanismes de la synes- thésie, ils en font malgré tout la juste métaphore. Aussi ceux pour qui le phénomène neu- rologique dicte le processus créatif, aspirent à faire vivre à l’individu une expérience dite 1. RIMBAUD, Arthur , Une saison en enfer - Illuminations, Éditions du Livre, 1999. 2. MERLEAU-PONTY, Maurice, Phénoménologie de la perception, p.265, Paris, Éditions Gallimard,1945. 3. LINDENBERG, Hugo, « J’entends des couleurs », in NÉON, n°7, avril-mai 2013. 3 totale. De la perception synesthésique à la contemplation d’une œuvre d’art, d’un produit issu d’une démarche conceptuelle de design, nos sens peuvent être invités à expérimenter ces mécanismes sensoriels, stimulant notre appréciation esthétique. En effet le spectateur n’est pas un simple observateur passif mais bien actif : il réveille en lui les zones cérébrales de son système sensoriel, active sa motricité. Rappelons que l’étymologie d’émotion signi- fie mouvement, laissons ici la littérature substituer une explication rationnelle pour tirer profit de ce postulat. De la peinture synesthésique de Kandinsky, Rothko ou encore Klee du début XXe, aux nombreux supports du design d’aujourd’hui, notre posture contemplative n’est pas ad- jointe à un caractère immobile. Les stimuli perçus par la contemplation de l’œuvre en ques- tion peuvent nous inviter à entendre différents paradigmes d’amorçages selon le faire de l’artiste. Si nous confrontons notre regard à une œuvre de Kandinsky, nous nous mettrons à sa place, imaginant ses gestes, sa précision voire sa puissance et ainsi nous établirons une relation nouvelle entre simulations d’actions et impact esthétique. Si nous ne sommes pas réceptifs ou informés des synesthésies de l’artiste, nous serons malgré tout sensibles à l’illustration de ses correspondances par ses systèmes géométriques réfléchis. Opérer cette simulation, l’encourager même si le premier jugement est le désintérêt, nous pousserait à développer cette relation entre l’œuvre et le public, ce qui demeure le plus important dans l’expérience de la contemplation, les autres éléments n’étant que supplémentaires. L’avène- ment du corps de l’artiste, puis du rôle du spectateur dans l’œuvre a ouvert les portes à une expérience performative, co-participative, à une relation incarnée. L’expérience que fait le spectateur de l’œuvre est alimentée par ce qui est appelé le système biographique, liant corps et esprit. Au-delà de l’étude entre perception et réception de l’œuvre, il se dessine un enjeu incontournable, celui de transposer cette relation sensible au design graphique. À l’image éternelle des artistes comme praticiens de la perception, pouvons-nous apposer celle d’un graphiste ingénieur des sens ? Sa qualité propre de concepteur d’image lui confère t-il une possible maîtrise des autres modalités sensorielles ? Par la construction d’une réflexion ouverte basée sur les mécanismes de la perception, en endossant différents points de vue, scientifique, phéménologique à synesthésique, la question du rôle du designer graphique s’impose. Il est essentiel d’interroger la question d’expérience totale en design et plus parti- culièrement en graphisme. Si elle existe ou peut exister, quelles en sont ses démonstrations et ses limites ? Est-il légitime de penser qu’en sortant ou non de ses supports traditionnels, le designer peut aspirer à faire vivre une expérience graphique totale ? Peut-il expérimenter et sublimer la force visuelle de son sujet par une mise en scène plurisensorielle ? Pour en revenir à la synesthésie, le phénomène neurologique, en s’ancrant dans le processus créatif du designer semble être le tremplin idéal vers l’expérience totale escomptée. Seulement, comment parvenir à immerger le regardeur ? La notion d’écriture graphique totale peut-elle trouver sa place dans un contexte où le métier même se réinvente continuellement, mue pour être en accord avec les avancées technologiques fulgurantes de notre époque ? 4 Pour prétendre à la conceptualisation et ainsi à la création d’une expérience totale, montée de toutes pièces selon les faires du graphiste, il est indispensable de maîtriser ce qui en est la cible : la perception de l’individu. Troubler voire fausser celle-ci figure être chose délicate car il nécessite de prendre en considération les différents facteurs environnemen- taux, physiologiques et psychologiques régissant la sélection consciente ou inconsciente de l’objet perçu. Cette étude préliminaire mais Ô combien fondamentale ouvre le champ de la perception à différents postulats scientifiques, particulièrement neuroscientifiques mais aussi à la discorde de maîtres penseurs sur le sujet. De l’entendement scientifique à la connaissance philosophique, l’introduction du phénomène neurologique de la synesthésie apportera une nouvelle définition de l’acte perceptif, qui ne peut s’ancrer dans un schéma pré-établi tant ses mécanismes sont atypiques et variables selon les synesthètes. Comment percevons-nous ? est certes une question essentielle, mais sa réponse peut-elle être applicable à tous ? L’expérience totale solliciterait-elle le sixième sens qui sommeille en chacun ? #A uploads/Philosophie/ memoire-laura-vincent.pdf
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- Publié le Jan 16, 2022
- Catégorie Philosophy / Philo...
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