1 Pythagore et l’origine de la psychologie transpersonnelle Dr Jean Dierkens Pr

1 Pythagore et l’origine de la psychologie transpersonnelle Dr Jean Dierkens Professeur à l’Université de Mons Brève définition de l’approche transpersonnelle Un domaine nouveau ne peut se définir avec précision lorsqu’il se crée. Or le domaine du " transpersonnel " tel qu’on le conçoit depuis quelque vingt ans est nouveau. Il est donc évident que de nombreuses définitions se juxtaposent se complémentarisent, voire s’opposent sur certains points. Il nous apparaît par conséquent nécessaire de décrire ce que nous estimons être le champ du transpersonnel, sans que notre " définition " (qui n’est ni meilleure ni moins bonne, ni moins ni plus transitoire que n’importe quelle autre) n’ait d’autre but que de clarifier nos positions de départ et les buts de cet article. Nous définirons ce champ par une série de " postulats ", de conventions de départ, qui proviennent de constatations personnelles, les unes faites à partir d’expérientiels dont les moments méditatifs ne sont nullement minoritaires, d’autres à partir de lectures, d’autres encore à partir d’observations aussi rigoureuses que possible ou même d’expérimentations de laboratoire ayant entraîné une série de conséquences théoriques ou dépassant le cadre expérimental prévu. Nous comprenons que pour certains lecteurs, ces propositions paraîtront sujettes à discussions. Nous les laissons toutefois à leurs considérations et n’entreront aucunement ici dans une quelconque polémique. A) A partir de certains états de conscience modifiées, il est possible d’obtenir des éléments fondamentaux de connaissance de l’homme et de l’univers. Les structures essentielles liées à la constitution de l’univers sont immédiatement accessibles à l’esprit humain, grâce à l’existence dans sa psychê d’archétypes préalables à toute expérience personnelle, dynamisant son corps et sa pensée, reflets synchroniques des lois fondamentales physico-chimiques(1). Mais pour que ces structures lui soient accessibles mentalement, il faut qu’il parvienne à se placer dans un état de conscience qui le dégage à la fois de ses problèmes personnels et des préalables issus de savoirs et d’analyse rationnelle. Le transpersonnel a le Réel pour objet de connaissance privilégié et non la réalité. Par Réel, nous entendons l’univers tel qu’il existe en dehors de toute captation signifiante d’origine humaine. La réalité est ce que l’homme perçoit en analysant et construisant des discours (scientifiques ou non) à partir des clés sensorielles dites " objectives "; cette réalité peut correspondre à un aspect très utilitaire, mais elle ne permet pas de saisir ni les causes ni les finalités des phénomènes. (2) Il s’agit donc d’un univers inévitablement " caché ", implicite, dont les lois et les principes formateurs des objets naturels ne peuvent être " connus " que d’une manière " immédiate " et intérieure,- ou au moyen d’intermédiaires symboliques qui ne peuvent jamais être que des supports de passage. B) Il existe dans l’univers une structure et un dynamisme organisateur qui ont procédé (et procèdent encore) avec " finalité " et " intelligence ". (3) La nature n’est pas le fruit du hasard ou de lois issues du hasard. Elle représente par ses manifestations des indications qui permettent d’inférer les structures et dynamismes sous-jacents. La nature est un livre déjà écrit ; (4) la seule tâche consiste à déchiffrer son langage,- ce que l’homme peut faire, car il est, lui aussi, partie issue de la nature et possède en lui ces archétypes, témoins " sacrés " enfouis en une psychê capable de conscience et de réflexion. 2 L’homme étant un élément d’une nature qui le précède et le dépasse, il a des devoirs envers elle qui est la représentation visible la plus indiscutable du " Divin ". (5) Toute approche transpersonnelle doit, elle aussi, d’une manière ou l’autre, intégrer une dimension écologique " sacrée ", c’est-à-dire un respect de la nature en tant que telle et non dans la seule perspective de la préservation de notre bien-être personnel. C) Ainsi que vraisemblablement de nombreux êtres (voire tous les êtres) ou objets naturels, l’homme est constitué d’une partie matérielle dite " grossière " et d’une partie dite " subtile ", cette dernière étant préalable à la partie matérielle et lui survivant dans une certaine mesure. De la même manière, il existe une énergie dite " subtile " qui est fondamentale à la vie et est liée au corps dit " subtil ". On peut même penser que cette énergie et cette structure " subtiles " ne sont que deux aspects de la même chose. (6) Sans qu’on puisse généraliser, face à l’évolution de cette partie " subtile " de l’être qui survit à la mort physique, plusieurs groupes appartenant à la psychologie transpersonnelle reprennent positivement l’hypothèse de la réincarnation comme la plus explicative de certains faits constatés (7) ou des vécus personnels issus d’états non ordinaires de conscience (8) voire même comme système logique lié à la survivance d’un support " subtil " de conscience. La valorisation des enseignements orientaux dans les diverses écoles transpersonnelles a augmenté l’impact de l’hypothèse réincarnationiste. D) Le Moi de l’Homme, son " Ego ", ne peut être limité " à sa seule peau " et ne peut faire l’objet du seul souci existentiel. Sa constitution est nécessaire à la formation de l’homme conscient et équilibré; son dépassement est nécessaire à l’accès aux structures fondamentales de l’homme et de l’univers. Le corps et le psychisme de l’homme recèlent en leurs structures propres un analogue de l’univers. La seule analyse rationnelle (par exemple, par la description scientifique minutieuse, par l’analyse du discours ou par l’approche réductrice psychanalytique), bien qu’elle aussi soit nécessaire, est toujours insuffisante. E) Les informations provenant du monde sont accessibles, dans certaines circonstances, à des modes " extrasensoriels " qu’il y a lieu d’aborder d’une manière positive et rationnelle. F) La science, dans une perspective transpersonnelle, doit pouvoir s’appuyer sur l’intuition et la méditation préalables et essentielles à toute approche rationnelle analytique. Les deux phases, méditative et analytique rigoureuse sont nécessaires à la pensée transpersonnelle. G) Étant donné la conception du monde et de l’homme, celui-ci doit, dans toute recherche d’harmonie et de plénitude, intégrer la dimension " sacrée ", transcendantale, transpersonnelle. Les expériences décrites par les grands mystiques des diverses religions sont considérées avec ouverture et intérêt non réducteurs. Enseignement pythagoricien : (9) I1 ne nous semble pas valable de donner un exposé systématique de tout l’enseignement pythagoricien car tel n’est pas notre but ici. Nous insisterons sur les seuls aspects qui témoignent de l’originalité transpersonnelle de notre philosophe, faisant référence à la tentative de définition du transpersonnel, ainsi que nous l’avons fait en tête de cet article. Sachant toutefois l’ignorance dans laquelle de nombreux lecteurs se trouveront quant aux aspects plus historiques du pythagorisme, nous faisons suivre cette approche comparative d’un aperçu résumant la vie de Pythagore et certains autres aspects de l’école pythagoricienne. 3 Nécessité des approches méditatives en liaison avec l’approche scientifique. L’enseignement pythagoricien est exposé dans des " écoles " où le disciple doit se développer spirituellement préalablement à toute approche ou quête de savoir valable. Ainsi que Porphyre le dit clairement (VP ;46-47), l’enseignement se faisait de la manière suivante. 1. Choisir les disciples à partir de nombreux indices, dont la capacité de surmonter ses passions, de maîtriser son corps d’utiliser son intellect. Les " signes " corporels étaient également analysés par le Maître lui-même (10) qui allait au stade observer les attitudes physiques et morales des jeunes (respect du corps harmonieux et refus des excès habituels des sportifs de compétition). 2. Montrer à ces futurs disciples, par le raisonnement et l’analyse intellectuelle les erreurs de jugement qu’ils font en basant leurs opinions à partir de leurs organes sensoriels. Cette approche critique devait être progressive et sans brusquerie afin de ne pas les bloquer sur la voie de la connaissance " intérieure ". 3. Les amener à se concentrer sur des thèmes liés à la fois aux choses (naturelles) existantes (et donc sujettes à variations continuelles) et aux concepts et aspects permanents. Vraisemblablement la respiration était un de ces thèmes de méditation. 4. Les amener à recueillir ainsi les vérités essentielles les archétypes, les Idées (11) à trouver la " nourriture " dont l’âme a besoin pour vivre réellement.(12) 5. Utiliser ensuite (13) le raisonnement sur ces objets du Réel (14) entrevus lors des méditations afin de mieux comprendre l’ordonnance universelle et la place de l’homme. Tout enseignement pythagoricien doit intégrer ces divers aspects. Cette approche double, où les états de conscience modifiée jouent un rôle fondamental en servant de base à des approches scientifiques fondamentales au développement de l’intelligence humaine, est également essentielle dans les réflexions transpersonnelles. Organisation sacrée de l’univers et situation de l’homme par rapport à la nature. Pour Pythagore, la nature de l’homme est semblable à la nature divine (15) qui a organisé l’univers. Son but de vie était donc de faire émerger de la manière la plus pure possible cette nature divine en nous. (16) Le but de la méditation était de s’écarter de toute vision subjective et sensorielle du monde afin de s’ouvrir aux structures fondamentales de notre psychê (aux archétypes, dirait-on aujourd’hui). On dépassait ainsi la subjectivité toujours exprimé en termes de notre époque) uploads/Philosophie/ pythagore-par-jean-dierkens.pdf

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