Bakounine : Textes sur la question slave 2 Le présent ouvrage aurait été imposs
Bakounine : Textes sur la question slave 2 Le présent ouvrage aurait été impossible sans le travail réalisé par l’Institut international d’histoire sociale d’Amsterdam qui a rassemblé en un CDRom les œuvres de Michel Bakounine International Institute of Social History Correspondence address : P.O. Box 2169 1000 CD AMSTERDAM A propos des textes présentés Les textes de Bakounine présentés ici sont ceux publiés par l’Institut international d’histoire sociale d’Amsterdam. Cependant, nous n’avons pas agi avec les écrits de Bakounine comme s’il s’agissait de paroles d’Evangile – ce qu’il aurait condamné, nous n’en doutons pas. Nous avons appliqué – le moins possible pour conserver le style et le rythme de Bakounine – un minimum de règles typographiques de base indispensables lorsqu’un texte est publié. Bakounine écrivait la plupart du temps en français ; s’il nous paraît condamnable de corriger certaines de ses inventions liguistiques qui font partie du charme de sa lecture (blasphémie au lieu de blasphème, par exemple), nous avons évidemment corrigé les fautes d’orthographe, mais aussi éliminé certains abus dans l’usage des virgules et des divisions (traits d’union), corrigé certains mots manifestement employés à mauvais escient, etc. Enfin, nous avons cru bon, afin d’aérer le texte, de créer des paragraphes qui ne se trouvent pas dans le texte original. Certains textes suédois ont cependant présenté une réelle difficulté. Leur traduction par l’IISG restitue parfois un français extrêmement approximatif. Certaines phrases des traductions sont difficilement compréhensibles et ont une syntaxe telle qu’il n’est pas possible de publier ces passages tels quels. Il nous a souvent fallu nous reporter au texte suédois pour vérifier le sens de certains mots ou pour comprendre le sens de certaines phrases : nous avons par conséquent fait du « rewriting », mais limité à ces passages. Nous n’avons cependant pas modifié le texte de la traduction sauf là où cela s’est avéré absolument nécessaire. C’est dire que les documents traduits du suédois présentés ici le sont sous notre seule responsabilité et n’engagent pas l’IISG. Couverture : Gravure de Mathias Leoni. Coll. personnelle de l’auteur Bakounine : Textes sur la question slave 3 Michel Bakounine Textes sur la question slave et sur l’Europe du Nord (1862-1864) Présentation et notes de René Marie Berthier Introduction En 1835, Bakounine quitte l’armée et une brillante carrière d’officier d’artillerie. Il vient de découvrir Schelling, qui avait eu une influence considérable chez les intellectuels russes des années 20 et 30, et décide de se consacrer à la philosophie. En Russie, Schelling est présenté comme le Christophe Colomb du XIXe siècle, qui a dévoilé à l’homme une partie inconnue de son propre être, son âme, son esprit, pense-t-on. Les esprits cultivés de l’époque, mais dénués de toute connaissance scientifique, pensaient sincèrement qu’avec quelques maigres connaissances ils allaient pouvoir percer les secrets de l’univers. Lorsque Bakounine arrive à Moscou en 1836, il approfondit sa connaissance de Hegel ; ce dernier aura sur lui une influence majeure toute sa vie. De Schelling, il conservera de façon permanente l’idée qu’il y a une unité entre les phénomènes de la nature et l’esprit humain Avant de se passionner pour Hegel, Bakounine s’était intéressé à Fichte dont il a traduit en russe les Conférences sur la destination du savant, destinées à être publiées dans la revue Teleskop. Le jeune Russe s’enflamme pour le philosophe d’une passion toute romantique. Fichte revient constamment dans la correspondance brûlante qu’il entretient avec ses sœurs et avec les sœurs Beer, à qui il tente de faire partager Bakounine : Textes sur la question slave 4 son enthousiasme. L’amour et la béatitude sont conjugués à tous les modes. C’est l’époque où Bakounine lit et commente l’Initiation à la vie bienheureuse. En dehors de la vie spirituelle, il n’y a pas de vie véritable. Politiquement conservateur, il verse à partir de 1837 dans une sorte de mysticisme hégélo-chrétien. Pour Bakounine, la philosophie est le moyen d’étancher sa soif d’absolu, mais il ne peut se contenter d’une voie qui le conduirait vers le quiétisme. La recherche de l’Absolu, c’est bien, mais ce jeune homme, qui est décrit comme kräftig et kolossal par la police allemande 1, n’entend pas attendre que l’Absolu vienne à lui. Il va s’efforcer de le chercher, activement. Belinski 2 raconte à Stankevic 3 en octobre 1839 que, deux ans auparavant, il avait logé avec Bakounine à Moscou et que son ami avait alors « parcouru la philosophie de la religion et du droit de Hegel ». Jeux philosophiques voluptueux ou délectations intellectuelles – les expressions sont d’Annenkov 4 – Bakounine semble bien avoir été l’un de ceux qui ont introduit dans la Russie des années quarante la mode de Hegel. L’observateur, qui écrit dans les années quatre-vingts, donne une indication intéressante sur les raisons qui ont pu le pousser vers la philosophie de Hegel. Annenkov dit en effet que les multiples aspects, la promptitude et la souplesse de l’esprit de Bakounine « demandaient déjà une nourriture et un soutien sans cesse renouvelés », et que la philosophie hégélienne, « mer vaste et sans rivages, se présenta on ne peut plus à propos ». En somme l’hégélianisme a fourni un exutoire, un aliment, dont l’esprit vorace du jeune philosophe a pu se nourrir. En 1840, Bakounine quitte la Russie pour aller étudier la philosophie en Allemagne. Ce jeune homme passionné de philosophie allemande, épris d’absolu, a épuisé toutes les possibilités de progresser 1 Puissant et colossal. Fiche signalétique de la police lors de son incarcération à la forteresse de Königstein, en 1850. Bakounine mesurait plus de deux mètres. 2 Vissarion Gregoievic Belinski (1811-1848), célèbre critique littéraire russe de l’époque. 3 Nikolaï Vladimirovic Stankevic (1813-1840), mort prématurément, fut un ami de Bakounine. Ses lettres sont d’une grande importance pour comprendre l’histoire de la pensée russe dans les années 1830-1840. Sa mémoire reste attachée au au cercle philosophico-littéraire qui porte son nom. Bakounine fut effondré en apprenant sa mort. 4 Pavel Vassilievic Annenkov (1812-1887), philologue et publiciste libéral russe qui voyageait beaucoup en Europe. Il publia la première édition critique des œuvres de Pouchkine. Bakounine : Textes sur la question slave 5 dans son pays. À Berlin, il s’inscrit aux cours de Werder, suit ceux de Schelling. Puis il découvre Feuerbach, pour qui il s’entiche, et pour qui il conservera une réelle tendresse toute sa vie. A Berlin, Bakounine se lie d’amitié avec Ivan Tourgueniev, et les deux hommes deviennent inséparables. Celui-ci note à ce moment : « Je rencontrai Bakounine le 20 juillet 1840. Je ne désire pas garder d’autres souvenirs de ma vie. » Bakounine rencontre également Varnhagen von Ense 5, qui est au centre de la vie spirituelle de Berlin, et qui exprimera la grande sympathie que lui inspire ce « jeune homme intègre, d’esprit noble ». C’est à cette époque également que Bakounine fit la connaissance du musicien Adolf Reichel, qui écrivit plus tard : « En l’année 1842 me furent présentés par une connaissance commune trois jeunes russes qui, tous trois, m’en imposèrent par leur taille inaccoutumée. C’étaient Michel et Pavel Bakounine et Ivan Tourgueniev qui, plus tard devint si connu par ses remarquables romans. Michel sut bientôt, par la force entraînante de sa parole, s’acquérir ma sympathie et celle de ma sœur aînée, sympathie qu’il conserva, fidèle et dévouée, jusqu’à sa mort. » Mais très rapidement, Bakounine découvre que la philosophie est une impasse. Surtout la philosophie allemande. Après la publication d’une brochure, La Réaction en Allemagne, qui fit quelque bruit, et qui fut remarquée dans les cercles d’hégéliens de gauche que Bakounine fréquentait, il abandonne la philosophie. La vie qu’il cherchait dans la métaphysique ne s’y trouvait pas : il n’y trouva que la mort, l’ennui, l’immobilité. L’incapacité politique des libéraux et des radicaux allemands à combattre l’absolutisme l’avait conduit à ce choix. La philosophie n’était pas l’action. Ce jeune homme aux idées conservatrices va peu à peu se transformer en un démocrate aux idées radicales, un partisan de l’émancipation des peuples slaves assujettis par l’Autriche et la Prusse, un adversaire acharné de l’empire des tsars, un socialiste aux idées un peu confuses tout d’abord, avant sa rencontre avec Proudhon. 5 Diplomate et écrivain allemand lié au mouvement romantique. Soupçonné de sympathies démocratiques, sa carrière politique prit fin et il s’établit à Berlin au début des années 1820. Bakounine : Textes sur la question slave 6 Lorsque la révolution de 1848 éclate à Paris, il est à Bruxelles et se rend à pied dans la capitale française. Puis il tente de se rendre en Pologne. Il participera à l’insurrection de Prague, jouera un rôle déterminant dans l’insurrection de Dresde. Ce Russe sera finalement arrêté, livré à la police saxonne, condamné à mort, livré à la police autrichienne, condamné de nouveau à mort, et enfin livré aux autorités russes. Condamné à perpétuité, il passera huit années terribles en forteresse. En Occident, ses amis le croient mort. Pendant la guerre de Crimée, les autorités craignent des troubles, une évasion, et Bakounine est transféré à la forteresse de Schlüsselbourg. En 1857, Alexandre II, le successeur de Nicolas Ier, commue sa uploads/Philosophie/ textes-sur-la-question-slave-et-sur-l-x27-europe-du-nord-1862-1864-michel-bakounine.pdf
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- Publié le Jui 11, 2021
- Catégorie Philosophy / Philo...
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