311793 Mme Kanziga Veuve Habyarimana 10è et 9è sous-sections réunies Séance du
311793 Mme Kanziga Veuve Habyarimana 10è et 9è sous-sections réunies Séance du 23 septembre 2009 Lecture du 16 octobre 2009 Conclusions de Julie Burguburu Mme Agathe Habyarimana, née Kanziga en 1942 à Giciye au Rwanda, est la veuve du président rwandais Juvénal Habyarimana, avec lequel elle s’était mariée en 1963. L’attentat qui a couté la vie à ce dernier, le 6 avril 1994, est considéré comme le facteur déclenchant des massacres qui l’ont suivi dès le lendemain et, par suite, du génocide perpétré principalement à l’encontre de la population tutsie du Rwanda d’avril à juillet 1994. Mme Habyarimana n’a toutefois pas assisté à ces événements car elle a pu avec l’aide des militaires français être exfiltrée vers la République centrafricaine dès le 9 avril 1994, puis vers la France le 17 avril 1994. Quelques mois plus tard, elle repart en Afrique, séjournant dans plusieurs pays (Gabon, Zaïre, Kenya) avant de retourner en France fin 1998, munie d’un passeport gabonais et d’une identité d’emprunt. Précisons ici que six de ses sept enfants encore vivants résident en France, certains bénéficiant du statut de réfugié, d’autres ayant en outre obtenu la nationalité française. Ce n’est cependant qu’en avril 2004 que Mme Habyarimana a saisi le préfet d’une demande préalable d’admission au séjour au titre de l’asile, puis le 8 juillet 2004, l’office français de protection des réfugiés et apatrides. Dans le silence de l’office malgré son audition le 10 septembre 2004, elle a saisi le 12 décembre 2005 la commission des recours des réfugiés d’une décision implicite de rejet qui était née depuis le 9 septembre 2004. Aucune forclusion ne lui était évidemment opposable en l’absence de décision expresse, voyez 29 juillet 1998 n° 187921, Préfet du Val-de-Marne c/ Mlle Pomaa. L’obligation d’une décision expresse de rejet n’était pas encore entrée en vigueur (aujourd’hui art. L723-3-1 CESEDA). L’office n’a finalement notifié à la requérante une décision explicite de rejet, que le 4 janvier 2007, communiquée par Mme Habyarimana à la commission le 10 janvier, soit quelques jours avant la séance de la commission qui s’est tenue le 25 janvier. Celle-ci a confirmé la décision de rejet par une décision du 15 février 2007 par laquelle elle tient pour fondée l’existence de craintes personnelles et actuelles de Mme Habyarimana en cas de retour dans son pays d’origine mais exclut toutefois cette dernière du bénéfice du statut de réfugié et de la protection subsidiaire en application des stipulations du a du F de l’article 1er de la Convention de Genève qui prévoient que ce statut n’est pas applicable, nous citons, « aux personnes dont on aura de sérieuses raisons de penser qu’elles ont commis un crime contre la paix, un crime de guerre ou un crime contre l’humanité au sens des instruments internationaux élaborés pour prévoir des dispositions relatives à ce crime. » Comme vous le savez, en effet, après avoir défini les conditions positives permettant la reconnaissance de la qualité de réfugié, la convention de Genève énonce des clauses d’exclusion qui sont essentielles dès lors qu’elles assurent qu’elle est un instrument de protection des persécutés et non des persécuteurs. 1 C’est donc pour contester l’application qui lui est faite de cette clause d’exclusion que Mme Habyarimana se pourvoit en cassation à l’encontre de la décision de la commission en soulevant cinq moyens. Mais avant d’en venir à leur examen, il nous paraît nécessaire de rappeler ici – trop rapidement – quelques éléments de l’histoire récente du Rwanda. Précisons que nous nous sommes principalement fondée sur le rapport de la mission d’information sur le Rwanda de l’Assemblée nationale du 15 décembre 1998 ainsi que sur l’exposé du contexte historique des événements survenus au Rwanda contenu dans la décision du 2 septembre 1998 du Tribunal pénal international pour le Rwanda concernant M. Akayesu. A titre liminaire toutefois, nous ne pouvons que constater que l’analyse historique des événements les plus récents est loin d’être achevée. Mais la réalité du génocide n’est pas en question. La résolution 955, adoptée le 8 novembre 1994 par le Conseil de sécurité des Nations Unies instituant le Tribunal pénal pour le Rwanda a ainsi qualifié de génocide les crimes commis au Rwanda en 1994 au sens de la convention pour la prévention et la répression des crimes de génocide du 9 décembre 1948. Cette même convention stipule que le génocide a le caractère de crime contre l’humanité. Le nombre exact de victimes est difficile à préciser. Il est le plus souvent estimé à un chiffre allant de 500 000 à un million de morts, parfois considéré comme bien inférieur à la réalité.1 Est également acquis le fait que ce génocide était en réalité envisagé de longue date, le processus d’extermination systématique et organisé des Tutsis par les extrémistes hutus ayant été préparé à la fois en termes d’idéologie par la manipulation de la population, notamment à l’aide des médias, et en termes matériels, par la distribution systématique d’armes, l’utilisation de caches et la formation de milices. Le conflit qui oppose les populations hutue et tutsie est, de fait, ancien. Alors qu’en 1885, la Conférence de Berlin avait attribué le Rwanda à l’Empire allemand, le Traité de Versailles donna en 1919 à la Belgique mandat sur le Rwanda. Le mandataire belge, choisissant l’administration indirecte, décida d’adapter les institutions locales en s’appuyant sur une élite essentiellement composée de personnes se disant tutsies, affaiblissant la royauté traditionnelle. La distinction existait donc déjà entre les Hutus et les Tutsis, les premiers étant les plus souvent associés au travail agricole et les seconds à une activité pastorale – mais elle n’était pas définitive, un individu pouvant passer d’un groupe à l’autre selon l’évolution de son statut social. Au début des années 30, fut toutefois instituée une carte d’identité mentionnant l’appartenance ethnique de son titulaire. La population fut ainsi divisée en trois groupes ethniques : les Hutus représentant environ 84% de la population, les Tutsis en représentant environ 15% et les Twas, constituant environ 1% de la population. En 1956 les premières élections au suffrage universel pour le renouvellement des organes locaux donnèrent une forte majorité aux Hutus qui prirent conscience de leur pouvoir démographique, les Tutsis comprenant pour leur part que le suffrage universel mettrait fin à leur domination institutionnelle favorisée par le colonisateur belge. Des troubles éclatèrent dès 1959 avec la multiplication d’incidents sanglants dont les Hutus furent les premières victimes. En riposte, ils se mirent à piller et incendier les maisons tutsies. Ce cycle de 1 James Gasana, ancien Ministre rwandais de la Défense d’avril 1992 à juillet 1993 l’évalue à 3,15 millions (Rapport Quilès). 2 violences déboucha sur l’installation par les autorités belges d’un gouvernement provisoire dirigé par Grégoire Kayibanda, président du MDR, parti des masses hutues. A la suite de la fuite du monarque tutsi à l’étranger, l’opposition hutue proclama la République de Gitarama en janvier 1961. L’indépendance fut proclamée le 1er juillet 1962, M. Kayibanda devenant président de la Première République. De nombreux Tutsis quittèrent alors le Rwanda pour les pays voisins à partir desquels ils menèrent des incursions au Rwanda. Le mot « Inyenzi », cancrelat, fut dès lors utilisé pour les désigner. Chaque attaque des exilés était suivie de représailles contre les Tutsis vivant au Rwanda, qui causèrent en 1963 la mort d’au moins dix mille Tutsis, accélérant encore les vagues d’exil. Au plan interne, une politique de quotas fut mise en place en faveur des Hutus, la région de Gitarama, au centre du pays et dont le président était originaire étant en outre favorisée. Ces lignes de fraction, ethniques d’une part, et régionales d’autre part, créèrent des dissensions telles au sein de la population qu’elles permirent au général Juvénal Habyarimana, ministre de la défense, de prendre le pouvoir par un coup d’Etat le 5 juillet 1973. M. Kayibanda, assigné à résidence, y mourut de faim et le général Habyarimana devint président de la Deuxième République au sein de laquelle il institua un parti unique, le MRND2. Bien qu’ayant suscité quelques espoirs chez les Tutsis au début de son régime, le président Habyarimana ne tarda pas à tomber dans les travers de son prédécesseur en poursuivant la politique de quotas dans les universités et l’administration et en favorisant les Hutus originaires cette fois du Nord Est dont il provenait, suscitant par là une opposition intérieure hutue. Isolée, la base du régime finit par se réduire à un cercle de proches auquel fut donné le nom d’Akazu, la maison du président, radicalisant encore davantage l’opposition. En octobre 1990, le Front patriotique rwandais, FPR, issu de l’Alliance créée en 1979 par des exilés tutsis en Ouganda, mena des attaques sur le territoire rwandais dans le but de déstabiliser le président, qui répondit par l’arrestation de milliers d’opposants. La dégradation de la situation intérieure en résultant et la pression des bailleurs de fonds obligèrent toutefois le président Habyarimana à accéder au multipartisme en 1991. Comprenant que le régime d’Habyarimana n’accepterait pas leur retour sur les terres rwandaises « qui ne suffiraient pas à tous les nourrir », les exilés tutsis élargirent leur objectif uploads/Politique/ decision-du-conseil-d-x27-etat-agathe-kanziga-veuve-habyarimana-france-16-10-2009.pdf
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- Publié le Aoû 22, 2021
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