Les femmes et la Commune de Paris de 1871 Author(s): Marisa Linton and Christin

Les femmes et la Commune de Paris de 1871 Author(s): Marisa Linton and Christine Hivet Source: Revue Historique , JUILLET-SEPTEMBRE 1997, T. 298, Fasc. 1 (603) (JUILLET- SEPTEMBRE 1997), pp. 23-47 Published by: Presses Universitaires de France Stable URL: https://www.jstor.org/stable/40956129 JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact support@jstor.org. Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at https://about.jstor.org/terms Presses Universitaires de France is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Revue Historique This content downloaded from 161.116.100.129 on Sun, 06 Dec 2020 15:49:08 UTC All use subject to https://about.jstor.org/terms Les femmes et la Commune de Paris de 1871 La guerre franco-prussienne et le siège de Paris furent suivis par la création à Paris en mars 1871 d'un gouvernement municipal révolu- tionnaire qui prit le nom de Commune. La Commune vécut moins de dix semaines mais élabora de nombreux projets révolutionnaires, demeurés stériles, faute de temps. Le gouvernement national reprit Paris par la force en y envoyant l'armée, faisant ainsi des rues de la capitale le théâtre de combats sanguinaires : à Tissue de la « semaine sanglante », pour reprendre le nom sous lequel elle allait entrer dans l'histoire, les insurgés gisaient par milliers, morts au combat ou mas- sacrés après leur capture. Comptant parmi les épisodes les plus trau- matisants du xix1 siècle, la Commune de Paris de 1871 est aussi une des questions de l'histoire de France qui a causé le plus d'amertume et déclenché le plus de controverses. Les historiens ne sont en effet toujours pas d'accord sur la nature de la Commune. Avait-elle été l'œuvre d'éléments mal avisés, voire criminels et immoraux, de la société parisienne, que seule avait motivés leur haine des riches et des privilégiés ? N'avait-elle été que le contrecoup du traumatisme causé par la victoire de la Prusse, c'est-à-dire un événement contingent qui, s'il s'était produit, n'en avait pas pour autant une signification poli- tique importante ? Avait-elle offert un exemple ultime de cette tradi- tion révolutionnaire française qui s'était manifestée dans les rues de Paris en 1789, en 1830 et en 1848 ? Ou bien signala-t-elle au contraire la nouvelle tendance politique qu'allait suivre la gauche, à savoir la ligne des marxistes qui, déjà actifs dans la Première Internationale, Revue historique, ( :( X( VI 1 1 / 1 This content downloaded from 161.116.100.129 on Sun, 06 Dec 2020 15:49:08 UTC All use subject to https://about.jstor.org/terms 24 Marisa Linton prirent effectivem qu'ils y jouèrent r moins les débats concernant les chefs révolutionnaires, leurs vertus, leurs vices et leur idéologie qui ont attiré l'attention que les insurgés ordinaires, leur monde, leur vie, leurs motivations, lesquelles étaient souvent très différentes de celles de leurs dirigeants. La Commune compta nombre de partisans sur lesquels l'historien ne sait en général que très peu de choses, leurs noms eux-mêmes n'ayant souvent pas été recensés. Il sait cependant qu'il se trouva beaucoup de femmes parmi les insurgés. Les femmes impliquées dans la dernière des insur- rections parisiennes furent nombreuses ; présentes dans les clubs et dans les organisations populaires, elles se transformèrent en ambu- lancières et en cantinières. Lors des derniers jours, elles construisi- rent des barricades et prirent les armes pour défendre la Commune. Ces femmes méritent l'attention de l'historien. Les images que l'histoire a transmises des femmes de la Commune ont pris valeur de symboles, voire de mythes, et révèlent à quel point les interprétations de la tradition révolutionnaire sont polarisées. Idéalisations des héroïnes de la révolution, incarnations de Marianne allant au combat, elles brandissent le drapeau rouge du haut des bar- ricades où elles font face à la mort même ; sacrifiant leur vie dans l'es- poir que leurs enfants connaîtront un avenir meilleur, elles sont figées dans un geste ultime de défi et de courage. Les communards eux- mêmes contribuèrent à immortaliser cette première image. Les femmes de la Commune donnèrent cependant aussi naissance à l'image menaçante de la prostituée ou, pire encore, de la pétroleuse ; tout droit sorties du cauchemar bourgeois, elles hantent les bas-fonds de la société parisienne ; rongées par le mépris et la jalousie qu'elles ressentent à l'encontre des riches, elles sont prêtes à brûler et à piller, à faire périr avec elles le monde civilisé dans une orgie de destruc- tion. Ce portrait fit de fréquentes apparitions dans les journaux hos- tiles à la Commune ainsi que dans les procès qui allaient suivre. Pour évocateurs qu'ils soient, il convient cependant d'essayer de dépasser ces mythes entretenus par la gauche et par la droite pour se poser une série de questions, quel que soit le degré de certitude avec lequel on pourra y répondre. Quels types de femmes participèrent à la Com- mune ? Pourquoi certaines femmes prirent-elles fait et cause pour la Commune alors que leurs voisines demeurèrent en revanche indiffé- rentes ou même hostiles à l'insurrection ? Quelles furent les motiva- tions des femmes ? Qu'attendaient-elles de la Commune ? Furent-elles inspirées par sa rhétorique socialiste ou avaient-elles au contraire leur propre programme, un programme ayant moins trait à la politique qu'à des questions de survie ? En tant que femmes, quelle fut pour This content downloaded from 161.116.100.129 on Sun, 06 Dec 2020 15:49:08 UTC All use subject to https://about.jstor.org/terms Les femmes et la Commune de Paris de 1871 25 elles l'importance, à supposer qu'ils en aient eu une, des droits femme ? Espéraient-elles la venue d'une plus grande égalité pol ou sociale entre les sexes ? Ou de telles questions n'avaient-ell contraire que peu de sens pour des femmes pour qui la vie qu dienne se résumait souvent à lutter pour survivre ? Il faut se garder de chercher les réponses à ces questions dan suppositions anachroniques. Il est en effet impossible d'affirme les communardes partageaient nécessairement les idéologies p tiques des chefs et des porte-paroles officiels de la Commune, tant que ces derniers étaient souvent incapables de se mettre cord. Des termes comme ceux de « socialiste » ou de « républi étaient souvent utilisés au sens large ; de plus, dans la bouche ouvrière peu instruite et n'ayant peut-être jamais assisté réunion politique, il se peut que de tels mots aient eu un sens très férent de celui que nous leur donnons aujourd'hui et que ce sen été intimement lié à leurs conditions de vie et à leurs expériences sonnelles. De même, le féminisme tel que nous l'entendons de jours, soit la prise de conscience claire de la nécessité d'une libé de la femme en tant que femme, n'avait guère de sens pour l'ouvr moyenne de l'époque : le terme n'existait d'ailleurs pas puisqu fit son apparition qu'à la fin du siècle. Voilà qui signifie, non p l'ouvrière ne s'inquiétait nullement des questions touchan femmes, mais qu'elle les envisageait dans le contexte de sa vie L'historien désireux de comprendre le rôle que les femmes jou dans la Commune et ce que ce rôle représenta pour elles doit commencer par situer ces femmes dans le contexte de la fin Second Empire : il lui faut se tourner vers la vie que menaien classes populaires et vers la politique que suivait la gauche. Les années qui précédèrent la Commune : 1860-1870 Le gouvernement de Napoléon III réprima pendant longtem toute forme d'organisation et d'agitation politique radicale suscept de menacer l'ordre établi. Cette attitude se relâcha néanmoins q peu à partir de 1860 avec l'évolution vers l'empire libéral, mena à une réapparition de la gauche. Les syndicats furent ains lisés en 1864. En 1865, une branche de l'Association internationale des travailleurs fut créée à Paris, offrant à la classe ouvrière un lieu de réunion et de politisation. Jusque-là interdits, les rassemblements de nature politique furent autorisés à partir de 1868 : clubs et sociétés politiques commencèrent alors à se multiplier et à attirer des quanti- tés considérables d'ouvriers et d'ouvrières intéressés par la politique. This content downloaded from 161.116.100.129 on Sun, 06 Dec 2020 15:49:08 UTC All use subject to https://about.jstor.org/terms 26 Marisa Linton L'héritage de la g quant aux attitudes du rôle de la fem sante et évocatric française de Robe sentait la politiqu cades. Le plus extr des Blanquistes, g Blanqui. Les femm tionnaire : par so avaient en effet p femmes donnait a les Jacobins ni l d'importance à ce Au lieu de rester déplaça vers le soc tion et le partage abordé la question Fourier et leurs di compréhension à l sur les droits des structures familial Proudhon n'avait fussent : ainsi pron les femmes étaie épouses. Son socia ment bien reçu par pour la plupart d idées de Proudhon donc très répand sienne de l'Intern femmes, les discip sur le marché du bien payées que le que ces derniers e une main-d'œuvre bon marché. Même si leur uploads/Politique/ les-femmes-et-la-commune-de-paris-de-1871.pdf

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