L’essentiel sur Le lupus systémique DOSSIER Rhumatos • Mai 2013 • vol. 10 • num

L’essentiel sur Le lupus systémique DOSSIER Rhumatos • Mai 2013 • vol. 10 • numéro 88 133 Anticorps à visée diagnostique Anticorps ayant valeur de critères de classification Il s’agit de certains anticorps antinucléaires et antiphospholi- pides. En effet, parmi les critères de classification, ACR 1982 modi- fiés en 1997, du lupus systémique, figure un critère “immunolo- gique” (n°10) qui comporte plu- sieurs déterminations d’auto- anticorps : il s’agit des anticorps anti-ADN natif ou des anticorps anti-Sm d’une part, des anticorps antiphospholipides sous la forme soit d’un anticoagulant circulant de type lupique, soit d’anticorps anticardiolipines d’isotype IgG ou IgM, soit d’une fausse sérolo- gie syphilitique d’autre part. Une seule de ces anomalies sérolo- giques permet de remplir le critère n°10 à condition, pour les anti- corps antiphospholipides, d’avoir été reconnus positifs à 2 reprises à 12 semaines d’intervalle. Le cri- tère n°11 est représenté par un test global de dépistage des anticorps 3 Les auto-anticorps du lupus systémique Quels sont ceux utiles pour le clinicien ? n La diversité des auto-anticorps (ciblant plus de 100 auto-antigènes différents) illustre l’hyper- activation de l’immunité acquise à médiation humorale, mais ne doit pas faire oublier que seuls certains de ces anticorps sont utiles en clinique, soit pour une aide au diagnostic, soit pour leur valeur pronostique (association à certaines manifestations viscérales, suivi évolutif sous traitement). Nous envisagerons en premier lieu les principaux anticorps antinucléaires, puis nous passerons en revue quelques auto-anticorps utiles au clinicien : antiphospholipides, anti- ribosomes, anti-C1q et divers autres marqueurs de pratique courante. Pr Olivier Meyer* *Service de rhumatologie, Hôpital Bichat, Paris. Mail : olivier. meyer@bch.aphp.fr L’essentiel sur Le lupus systémique (2e partie) Coordonné par le Pr Yannick Allanore 3  Les auto-anticorps du lupus systémique Quels sont ceux utiles pour le clinicien ?.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.� p. 133 Pr Olivier Meyer (Paris) 4  La néphropathie lupique Que retenir pour le rhumatologue ?.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.� p. 139 Dr Alexandre Karras (Paris) 5  Le risque cardiovasculaire Comment l’évaluer et le prendre en charge ? .�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.� p. 144 Pr Yannick Allanore (Paris) L’essentiel sur Le lupus systémique DOSSIER 134 Rhumatos • Mai 2013 • vol. 10 • numéro 88 antinucléaires positif à un taux significatif. Plus récemment, en 2012, le groupe SLICC (systemic lupus international collaborating clinics) a proposé un autre sys- tème de critères de classification (toujours basé sur un minimum de 4 critères) et devant comprendre au moins un critère clinique et un critère immunologique (Tab. 1). Par- mi ces critères immunologiques, on trouve la présence d’anticorps anti-nucléaires à un taux significa- tif, ou la présence d’anti-ADN natif également à un taux significatif, ou la présence d’anticorps anti-Sm, ou la présence d’anticorps anti- phospholipides sous forme d’un anticoagulant circulant, ou d’une fausse sérologie syphilitique, ou d’un taux moyen ou élevé d’anti- cardiolipine, ou d’un taux signi- ficatif d’anticorps anti-β2 GPI. Il existe 2 autres sous-critères immunologiques représentés, soit par un test de Coombs érythrocy- taire positif (même en l’absence d’hémolyse), soit par une hypo- complémentémie dosée par le CH50 (dosage fonctionnel) ou le C3 ou le C4 (dosages pondéraux). Bien qu’il ne s’agisse que de cri- tères de classification, l’usage fait que ces critères immunolo- giques sont régulièrement uti- lisés pour faire le diagnostic po- sitif de lupus systémique. C’est dire s’il faudra être exigeant sur la méthode de dosage employée et sur le seuil minimal de positivité à exiger pour retenir le critère. Anticorps antinucléaires Ces auto-anticorps apparaissent très précocement, souvent plu- sieurs années avant le premier signe clinique (1, 2). ❚ ❚Dépistage global Il s’effectue en routine par une réaction d’immunofluorescence indirecte (IFI) sur frottis de cel- lules tumorales humaines, habi- tuellement de la lignée HEp2. Il faut exiger du laboratoire un double résultat donnant le titre des anticorps et l’aspect de la fluo- rescence. Plusieurs aspects sont possibles pour un même sérum selon la dilution considérée, té- moignant de la présence de mul- tiples anticorps antinucléaires au cours du lupus. Les aspects homogènes et mouchetés sont évocateurs du diagnostic, mais un aspect membranaire périphé- rique, et même nucléolaire, sont possibles. Le titre minimal à rete- nir chez l’adulte est le 160e (voire pour certains auteurs le 320e) car des taux faibles (80e) sont fré- quents (20 %) dans la population générale (3). A côté du test d’IFI, on voit apparaître des tests de dé- pistage global en ELISA avec une soupe d’antigènes nucléaires, ou des antigènes purifiés ou recom- binants, et d’autres automates type “Bioplex” équipant certains gros laboratoires d’auto-immuni- té. La sensibilité de ces nouvelles méthodes serait au moins égale à celle de l’IFI (4-7). Aujourd’hui, 99 % des LES non traités ont des anticorps antinucléaires par IFI sur cellules HEp-2 au moment du diagnostic. Tableau 1 – Critères de classification SLICC/ACR 2012 du lupus systémique. Critères cliniques Critères immunologiques •  Lupus cutané aigu (rash malaire, lupus bulleux, rash maculopapu- leux, rash photosensible) •  Lupus cutané chronique (discoïde, localisé ou généralisé, verru- queux, panniculite, muqueux, tumidus, engelure, chevauchement avec lichen plan) •  Ulcérations orales (palais, bouche, langue) ou nasales •  Alopécie non cicatricielle •  Synovite (≥ 2 arthrites) ou arthralgies (≥ 2 articulations) avec raideur matinale > 30 minutes •  Sérite : pleurésie sèche ou liquidienne ou péricardite •  Atteinte rénale : protéinurie/créatininurie ≥ 500 mg/24 h ou cylindres hématiques •  Atteinte neurologique : convulsions, psychose, multinévrite, neu- ropathie périphérique ou des nerfs crâniens, état confusionnel • Anémie hémolytique •  Leucopénie (< 4 000/mm3 au moins une fois ou lymphopénie (< 1 000/mm3 au moins une fois) • Thrombopénie (< 100 000/mm3 au moins une fois) • Anticorps antinucléaires à taux significatif •  Anti-ADN natif à taux significatif (si ELISA : exiger 2 fois la limite supérieure de la normale du labora- toire) • Anti-Sm • Antiphospholipides : o Anticoagulant circulant lupique o Fausse sérologie syphilitique o Anticardiolipine à taux moyen ou élevé o Anti-b2-glycoprotéine I • Hypocomplémentémie o C3 o C4 o CH50 •  Test de Coombs érythrocytaire positif (en l’absence d’anémie hémolytique) Un patient est classé lupus systémique si : 4 critères dont 1 clinique et 1 immunologique, ou si atteinte rénale lupique et présence d’ANA ou d’anti-ADN natif. L’essentiel sur Le lupus systémique DOSSIER Rhumatos • Mai 2013 • vol. 10 • numéro 88 135 ❚ ❚Anticorps anti-ADN natif La méthode de référence est le test radio-immunologique de Farr en phase liquide. Ce test est très spécifique (> 90 %) du diagnostic de lupus, mais il peut être négatif, même au début en l’absence de traitement, n’éliminant pas le dia- gnostic (seuls 65 à 75 % des lupus ont eu, ou auront des anti-ADN natif). Le maniement des radio- isotopes lui a fait préférer d’autres méthodes plus simples d’emploi : • la méthode d’IFI utilisant un parasite agent de la trypanoso- miase murine : Crithidia luciliae. Cette méthode, assez peu sensible, nécessite une lecture manuelle et une technicienne entraînée pour éviter les faux positifs (spécificité 96 %) (Fig. 1). Elle est semi-quanti- tative et permet de confirmer une méthode en phase solide telle que la deuxième présentée ci-dessous. • l’ELISA anti-ADN natif. C’est la méthode la plus utilisée en routine, mais les trousses sont de sensibi- lité et de spécificité assez différentes d’une marque à l’autre. Seuls les taux élevés d’isotype IgG ont une réelle valeur diagnostique (83 à 97 % de spécificité). Elle est semi-quantita- tive et peut être utilisée pour le suivi biologique d’un malade à la condi- tion de procéder au dosage toujours avec la même trousse dans le même laboratoire (8, 9). ❚ ❚Anticorps anti-nucléosomes Il s’agit d’anticorps reconnais- sant soit l’ADN, soit les histones liées à l’ADN (H2A, H2B, H3 ou H4) (30 %) dans la chromatine, soit un épitope conformationnel fait à la fois d’ADN et d’histones (70 %). L’antigène utilisé par les réactifs commerciaux est soit un mono-nucléosome purifié, soit des polynucléosomes formés de chromatine avec l’histone H1 (H1 stripped chromatine) et dans ce cas on parle souvent d’anticorps antichromatine. Une méta-ana- lyse récente évalue la sensibilité comparée des tests antinucléo- somes à 61 % et la spécificité à 94 % avec un odds ratio en faveur du diagnostic de lupus de 40,7. Com- parativement les performances des tests anti-ADN natifs sont de 52,4 % pour la sensibilité et de 94,9 % pour la spécificité avec un odds ratio de 28 (10). On peut donc indifféremment utiliser l’une ou l’autre des 2 catégories d’anticorps pour confirmer un diagnostic de lupus. ❚ ❚Anticorps anti-histones Contrairement aux anti-ADN et aux antinucléosomes, ces anti- corps ne sont pas spécifiques du lupus et leur recherche en pre- mière intention ne doit pas être faite. Leur prescription (test ELISA) n’est justifiée qu’en cas de négativité des anti-ADN ou anti-nucléosomes chez un patient ayant une forte suspicion clinique de lupus : c’est le cas de certains lupus induits médicamenteux au cours desquels seuls seront pré- sents des anti-histones (en réa- lité beaucoup de médicaments induisent des anti-ADN natif : citons la sulfasalazine, la minocy- cline, les anti-TNFα). Les anti-his- tones H1 et H2B sont uploads/Sante/ l-x27-essentiel-sur-le-lupus-2.pdf

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  • Publié le Apv 04, 2022
  • Catégorie Health / Santé
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