PRINCIPE La microfluidique, c’est l’étude des écoulements et de leur mise en œu

PRINCIPE La microfluidique, c’est l’étude des écoulements et de leur mise en œuvre dans des réseaux de microcanaux dont les dimensions sont de l’ordre du micron. À cette échelle, le comportement des liquides change radicalement, ouvrant la voie à de multiples applications… Voyons comment. Les défis du CEA Juin-juillet 2019 N°238 Sylvie Rivière et Aurélien Boudault (Infographie), avec la collaboration de Florent Malloggi (CEA-Iramis) et Sandra Barbier (CEA-Leti). La microfluidique eau canal hydrophile eau t0 t2 t1 + - canal hydrophobe eau Écoulement d’un échantillon, poussé par une pression, dans un microcanal Déplacement d’un échantillon, soumis à une différence de potentiel. Le champ de vitesse dans l’échantillon est en tous points identique. Écoulement de trois liquides colorés en régime laminaire. Les secrets de la microfluidique Pour un objet macroscopique, le volume a plus d’importance que la surface ; mais pour les tout petits objets, comme un capillaire, c’est l’inverse : les effets de surface prédominent ! Le liquide circulant « voit » essentiellement des parois. Conséquence : les propriétés physiques des écoulements sont modifiées. En dessous du millimètre, les forces de capillarité prédominent sur les forces de gravité. Comme les effets de surface sont prépondérants, c’est l’adhérence du liquide aux surfaces des microcanaux qui l’emporte. Ce qui permet par exemple la montée naturelle des liquides, malgré la force de gravité, dans des capillaires verticaux. Lorsque la vitesse d’écoulement est faible, ce qui est le cas dans des microcanaux, la viscosité des fluides devient un facteur prépondérant par rapport à leur vitesse. L’écoulement devient laminaire : il file tout droit, sans tourbillon ! Les molécules composant le fluide progressent ainsi en conservant leurs vitesses les unes par rapport aux autres. C’est la capacité d’un liquide à « adhérer » à une surface. Les effets de surface étant prédominants dans les microcanaux, le comportement des fluides dépend fortement du caractère hydrophile (ayant une affinité pour l’eau) ou hydrophobe (repoussant l’eau) de la surface du microcanal. Conséquence : une goutte d’eau à l’entrée d’un microcanal hydrophobe n’y entrera pas sans être poussée par une très forte pression. Aux petites échelles, grâce à des effets électrocinétiques particuliers, on peut mieux contrôler le déplacement d’un échantillon liquide, sans qu’il soit déformé au niveau des contacts avec la surface, un phénomène provoqué par les charges électriques naturellement présentes sur les surfaces des microcanaux. Comment ? En appliquant une différence de potentiel entre l’amont et l’aval. L’échantillon avance ainsi de manière homogène. Du fait de la prépondérance des surfaces de contact avec l’extérieur et des petits volumes en jeu, les échanges thermiques sont très rapides. L’évacuation de la chaleur, tout comme le chauffage ou le refroidissement, sont faciles à réaliser et quasi-instantanés. La microfluidique, ça sert à quoi ? Quelques exemples… •  Culture cellulaire en parallèle dans des microvolumes, par exemple pour des tests à haut débit de médicaments ; •  Micro-organes artificiels pour le criblage de nouveaux médicaments, ou pour la recherche fondamentale ; •  Insertion d’ingrédients actifs dans des microgouttelettes, elles-mêmes encapsulées dans une membrane évanescente n’éclatant qu’au moment de l’application sur la peau, pour la cosmétique ; •  Diagnostic médical, à partir d’urine ou d’une goutte de sang : grossesse, sida, etc ; •  Micropompes pour l’injection de produits dans le corps humain (Exemple : injection d’insuline dans le foie) ; •  Tête d’imprimante à jet d’encre ; •  Laboratoire sur puce, avec tout un éventail d’applications en recherche… La laminarité La capillarité La mouillabilité L’exacerbation des effets électrocinétiques La rapidité des échanges thermiques La microfluidique TOUT S’EXPLIQUE 238 ENJEUX La microfluidique est une technologie en plein essor, à la croisée de la biologie, de la physique, de la chimie et de l’ingénierie. S’inspirant de ce que fait déjà la nature – pensez à la montée de la sève dans les feuilles des arbres ou à la circulation du sang dans les capillaires sanguins –­ , elle permet d’assembler sur quelques cm2 un ensemble de composants miniaturisés – vannes, pompes, canaux, systèmes d’analyse, etc. – dans le but de réaliser une fonction donnée avec des liquides. Nous lui devons par exemple l’encre électronique des liseuses, la tête d’imprimante à jet d’encre ou encore le test de grossesse sur échantillon d’urine ! Séduits par ses innombrables avantages – rapidité de mise en œuvre et d’utilisation, faible coût… –­ , les industriels se sont emparés de ce marché, avec un nombre d’applications sans cesse grandissant : en médecine (diagnostic médical, tests de dépistage), dans la cosmétique (ingrédients actifs insérés dans des microgouttelettes), l’industrie agro- alimentaire, etc. La microfluidique envahit aussi les unités de recherche. De véritables laboratoires sur puce arrivent aujourd’hui à remplacer plusieurs appareils de recherche encombrants et coûteux, réduisant les volumes et le nombre des expériences, et autorisant la réalisation de très grands nombres d’analyses en parallèle. La technologie s’est largement imposée dans de nombreux domaines, mais surtout dans la biologie et la santé : analyse biologique, synthèse chimique, criblage à haut débit de molécules actives (en pharmacologie, cosmétique), création d’organes sur puce pour des tests de médicaments in vitro… TOUT S’EXPLIQUE www.grouperougevif.fr La microfluidique est à la fois une science – celle de l’étude du comportement des fluides dans des microcanaux de taille micrométrique (de l’ordre du millième de millimètre) – et une technologie, qui permet la fabrication de dispositifs manipulant de très petites quantités de liquide dans des microvolumes. À la clé, un nombre d’applications considérable ! © L. Godart/CEA Pour les besoins de leur recherche fondamentale, les équipes du CEA-Iramis ont développé un savoir-faire et des compétences inédites en microfluidique. Des puces spécifiques sont fabriquées pour les études en physique et chimie – liquides confinés, émulsions ou nucléation/croissance de nanoparticules… – et pour la réalisation d’expériences sur synchrotron. D’autres Des normes pour la microfluidique La microfluidique est aujourd’hui une réalité, et son poten- tiel de développement, notamment en matière de dia- gnostic biologique rapide, grâce aux laboratoires sur puce, est gigantesque. Pour accélérer le développement de ces futurs dispositifs, le CEA-Leti œuvre, au niveau européen, pour la standardisation des composants, protocoles et règles de design (norme Iso), de sorte que l’ensemble des éléments proposés par les différents fournisseurs puissent être compatibles entre eux. À la clé : un gain de temps et d’argent en évitant les conceptions sur mesure. Le système FlowPad en est l’illustration. Il comporte un instrument porte-puce – une « boîte » de moins de 10 kg – équipé de toutes les fonctions de base : vannes, système de gestion des fluides, de chauffage, connectique pour les entrées et sorties de fluides, etc. ; et une carte normée (format carte de crédit, jetable), avec une connectique standardisée, sur laquelle le protocole biologique pourra être facilement inté- gré. Le système a aujourd’hui été transféré à des industriels. Grâce à ses compétences en microfluidique et à sa plate- forme de nanobiotechnologies, le CEA-Leti collabore par ailleurs avec de nombreux industriels pour concevoir des outils microfluidiques : diagnostic, dosages biologiques, etc. projets de recherche, comme les puces pour le diagnos- tic médical, ont une finalité plus appliquée. Les cher- cheurs exploitent également les possibilités offertes par l’impression 3D, avec une machine prototype dédiée. Celle-ci permet de réaliser des moules, pour la réalisa- tion de puces microfluidiques en polymère. Ce procédé est aujourd’hui en phase de maturation pré-industrielle. Au service de la recherche fondamentale Système FlowPad : plateforme microfluidique pour la préparation d’échantillons, le diagnostic, etc. uploads/Sante/ microfluidique.pdf

Documents similaires

Céline Dehez 1 Clinique conjugale sexologiques PSYS2920 – Christine Reynaert Ch 0 0

Jacques Lacan De la psychose paranoïaque dans ses rapports avec la personnalité 0 0

1 Institut d’Enseignement et de Promotion Sociale de la Communauté Française Ru 0 0

Ch 04 : Pathologies du Bois TD IV.1 Comment traiter les champignons ? Il est fr 0 0

Corrigés et transcriptions 1 DOSSIER 1 Désir de ville(s) Nous enrichissons notr 0 0

Quintessence d'une illusion, novembre 2004 Fiche de jeu (à détacher) Récapitula 0 0

L'éducation du chiot : A partir de la naissance plusieurs périodes se succèdent 0 0

1 Partie I : Marché du bien être et émergence des SPA Chapitre I : Présentation 0 0

1) Parmi les descriptions suivantes, quelle est celle qui convient pour l'anoma 0 0

N a t u r e s Sciences Sociétés Ces ondes qui nous menacent. Perceptions profan 0 0

• Détails
• Publié le Mar 18, 2021
• Catégorie Health / Santé
• Langue French
• Taille du fichier 1.5119MB