14èmes Journées Normandes de Recherches sur la Consommation : Société et Consom

14èmes Journées Normandes de Recherches sur la Consommation : Société et Consommation 26-27 Novembre 2015, Angers 1 TRADITIONNALITÉ, TRADITIONNALITÉ PERÇUE : PROPOSITION D’UN CONCEPT POUR LES PRODUITS ALIMENTAIRES Georgina GONZALEZ- HEMON Doctorante - Chargée de Projet Université d’Angers - GRANEM (Groupe de Recherche Angevin en Economie et Management) 13, Allée François Mitterrand — BP 13633 49036 Angers Cedex 01 Essca Business School 1 rue Joseph Lakanal 49000 Angers gina.glez@gmail.com Tel : 06.74.95.16.10 Gaëlle PANTIN- SOHIER Maître de Conférences HDR Directrice du GRANEM (Groupe de Recherche Angevin en Economie et Management) Université d’Angers 13, Allée François Mitterrand — BP 13633 49036 Angers Cedex 01 gaelle.pantin- sohier@univ-angers.fr Jean-Marc FERRANDI Professeur Responsable du LARGECIA (Laboratoire de Recherche en Gestion et en Economie de la Consommation et de l’Innovation Alimentaire). LEMNA ONIRIS Rue de la Géraudière CS 82225 44322 Nantes cedex 03 jean- marc.ferrandi@oniris- nantes.fr TRADITIONNALITÉ, TRADITIONNALITÉ PERÇUE : PROPOSITION D’UN CONCEPT POUR LES PRODUITS ALIMENTAIRES RESUME : Revisiter les produits traditionnels est souvent problématique pour les entreprises agroalimentaires concernées. Les recherches conduites en marketing sur des produits traditionnels ne permettent pas d’appréhender la perception du caractère traditionnel des produits alimentaires par les consommateurs. Pourtant, la définition de la traditionnalité perçue par le consommateur permettrait d’identifier les barrières à l’innovation pour ce type de produit. L’objet de notre recherche est ainsi d’appréhender le concept de traditionnalité perçue à partir d’une revue de littérature. Elle montre que l’association entre le rituel et l’objet est un élément constitutif de la traditionnalité. MOTS CLEFS : tradition, traditionnalité, produit alimentaire, innovation TRADITIONNALITY, PERCEIVED TRADITIONNALITY: PROPOSAL OF A CONCEPT FOR FOOD PRODUCTS ABSTRACT: Revisiting traditional products is often problematic for affected agribusinesses. Marketing research on traditional products do not capture the perception of the traditional character of foodstuffs by consumers. However, the definition of traditionality perceived by the consumer would enable to identify the barriers to innovation for this type of product. The purpose of our research is to understand well the concept of traditionality perceived from a literature review. It shows that the association between the ritual and the object is a constituent element of traditionality. KEY WORDS: tradition, traditionnality, food product, innovation 14èmes Journées Normandes de Recherches sur la Consommation : Société et Consommation 26-27 Novembre 2015, Angers 2 INTRODUCTION “La tradition fait recette1“. Les produits traditionnels sont les “nouvelles“ tendances pour les produits alimentaires. Les marques se battent pour montrer leur traditionnalité à travers le packaging et la publicité. Des émissions de télévision telles que Capital sur M6 ainsi qu’un documentaire sur France 5 ont été consacrées aux produits “traditionnels“. Et, en effet, les ventes de produits “traditionnels“ alimentaires sont aujourd’hui croissantes et participent au développement économique des entreprises agroalimentaires, notamment des PME (Todericiu and Muscalu 2012 ;Vanhonacker et al. 2013). Ces produits sont considérés comme faisant partie du patrimoine de l’Union Européenne parce qu’ils sont vecteurs de la culture et de l’histoire qu’ils représentent (Bérard and Marchenay 2000;Todericiu and Muscalu 2012). Pourtant, en marketing agroalimentaire plus particulièrement, les travaux sur les produits traditionnels ne permettent d’affirmer si un produit est perçu par les consommateurs comme traditionnel ou pas (Pantin-Sohier et al. 2015). La définition de produit traditionnel proposée reste aujourd’hui ambiguë et peu précise (Diop 2013 ; Hamon and Joffre 2008). En effet, « le « secteur traditionnel » apparaît comme un terme générique, l’absence de définition semble communément acceptée… Jusqu’à présent, il n’existe pas de consensus sur ce que recouvrent les secteurs traditionnels. Ainsi, ces termes sont communément employés dans des acceptations souvent différentes… Enfin, il est vrai que l’absence de définition précise ne favorise pas sa légitimation par les chercheurs » (Dumoulin and Simon 2008, pp. 25–26). Pour Bougeard Delfosse (2009), les produits régionaux dits traditionnels sont opposés aux produits régionaux dits non traditionnels. Cependant, il « n’a pas 1 Nom de l’émission télévisée sur France 5 le jeudi 31 octobre 2014 cherché à démontrer ce qu’est un produit traditionnel ou un produit non traditionnel » (p. 353). L’Institut National de l’Origine et de la Qualité (INAO) propose un label « Spécialité Traditionnelle Garantie ». Ce label, orienté vers les produits agricoles et alimentaires, a pour objectif de soutenir les produits traditionnels qu’il définit sur un plan réglementaire comme : « des produits existant sur le marché communautaire depuis au moins une génération. Une ancienneté supérieure au minimum de 25 années ». En d’autres termes, tout produit, dont l’existence est supérieure à 25 ans sur le marché, est un produit légalement traditionnel. Mais qu’entendons-nous réellement par tradition ? Pouvons-nous parler de produit traditionnel, de traditionnalité perçue ou de consommateur traditionnel ? La difficulté à appréhender ce qui est perçu comme traditionnel a pour conséquence pour les entreprises leur difficulté à innover en revisitant les produits traditionnels qu’ils fabriquent (Dumoulin et Simon, 2008a ; Celhay and Cusin 2010 ;Gailly and Lesueur 2010 ; Pantin-Sohier, Lancelot Miltgen et Camus, 2015). Suite à une revue de la littérature en sciences humaines et sociales, nous proposerons une première définition du concept de traditionnalité. Nous présenterons et discuterons les propositions actuelles et mettrons en évidence les éléments qui constituent la traditionnalité. 14èmes Journées Normandes de Recherches sur la Consommation : Société et Consommation 26-27 Novembre 2015, Angers 3 1. REVUE DE LITTERATURE SUR LE CONCEPT DE TRADITION 1.1. De l’intérêt du concept de tradition en marketing et en comportement du consommateur En marketing, même si la tradition est utilisée comme une variable de segmentation des marchés (Diop 2013), peu d’études ont cherché à connaître ce que recouvre ce concept. Il n’existe ainsi pas à l’heure actuelle de définition claire et/ou précise de la tradition ou de ce qui est perçu comme traditionnel (Dumoulin et Simon, 2008 ; Pantin-Sohier et al., 2015). Construit présent dans l’imaginaire du consommateur (Diop, 2013), la tradition est parfois mesurée par le temps (Smith 2009). Elle est alors souvent interprétée comme quelque chose d’ancien qui s’oppose à la nouveauté (Drayer et al. 2008). Les produits traditionnels alimentaires sont définis comme une « représentation », un marqueur du groupe. Pour qu’un produit soit traditionnel, il doit avoir un lien fort avec l’histoire, la culture et le territoire de ce groupe. Ce lien permet au groupe d’assurer une continuité dans le temps (Jordana, 2000 ; Conter et al., 2008; Kühne et al., 2010). Ce produit est ainsi attaché dans le temps et dans l’espace. Les produits alimentaires traditionnels sont fréquemment consommés lors, ou associés à des célébrations ou saisons particulières. Transmis d’une génération à une autre, ils peuvent engendrer un sentiment nostalgique chez les consommateurs (Ferrandi 2013; Kessous and Roux 2012). La nostalgie est en effet favorisée par la tradition (Brown 2000). C’est à travers des habitudes familiales avec une pratique quotidienne des coutumes et rituels que la tradition de la consommation d’une marque est notamment transmise (Croft 2006). Les produits traditionnels sont réalisés avec précision, de manière spécifique, avec peu ou pas de traitement et/ou de manipulation. Ils se distinguent et sont connus en raison de leurs propriétés sensorielles et de leur association à une zone, région ou pays spécifique (Guerrero et al. 2009). Ces produits sont authentiques de par leur recette (mélange d'ingrédients), l'origine de leurs matières premières et/ou leur processus de production. Perçus comme moins nocifs pour l’environnement (Conter et al. 2008 ; Kühne et al., 2010), ils sont associés à des phrases comme “les grands-parents le mangeaient déjà“ ou “c’est sain“ (Vanhonacker et al. 2010). Disponibles dans le commerce depuis environ 50 ans, ils font partie du patrimoine gastronomique. La plupart de ces produits ne possède pas de label (Kühne et al. 2010). Les consommateurs français, espagnols et italiens se divisent d’ailleurs en trois groupes en fonction de leur perception du caractère traditionnel d’un produit : ceux qui perçoivent le produit traditionnel comme habituel ; ceux qui pensent qu’il constitue un héritage et ceux qui le perçoivent comme familier (Vanhonacker et al. 2010). Ces produits, issus de la cuisine alimentaire régionale, font partie de leur quotidien. Une étude sémiologique s’est intéressée à l’analyse du packaging de différents produits alimentaires et elle a mis en lumière des mots associés à la tradition. Tel est le cas de : artisanat, rustique, ancien ou famille. De même, les objets traditionnels représentés sur le packaging (tels que le bois, le papier kraft, ou les torchons) augmentent la tradition perçue du produit. En gestion, la tradition se traduit par le mouvement d’une transmission de connaissances dans le temps. Elle permet d’assurer la transmission du savoir (Dumoulin and Simon 2008, p. 25). La tradition symbolise, dans le présent, la continuité du passé, la transmission d’un fait ancien dans un nouveau contexte. Elle rappelle le passé, mais ne le reproduit pas 14èmes Journées Normandes de Recherches sur la Consommation : Société et Consommation 26-27 Novembre 2015, Angers 4 à l’identique ; c’est un “ «dépôt culturel sélectionné » significatif, disposant «d’une force agissante»“ (Auger and Reynaud 2008, pp. 58–59). L’artisanat peut faire partie de la tradition (Schieb-Bienfait and Journé- Michel 2008). En effet, le savoir-faire traditionnel repose sur des modes de fabrication qui valorisent le métier (Polge 2008, p. uploads/Societe et culture/ gonzalez-hemon-g-pantin-sohier-g-ferrandi-j-m-traditionnalite-traditionnalite-percue-proposition-d-un-concept-pour-les-produits-alimentaires.pdf

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