479 HAUTE COUR CONSTITUTIONNELLE DE MADAGASCAR La sécurité juridique est ainsi

479 HAUTE COUR CONSTITUTIONNELLE DE MADAGASCAR La sécurité juridique est ainsi définie par le Conseil d’État français dans son rapport public 2006 : « Le principe de sécurité juridique implique que les citoyens soient, sans que cela appelle de leur part des efforts insurmontables, en mesure de déterminer ce qui est permis et ce qui est défendu par le droit applicable. Pour parvenir à ce résultat, les normes édictées doivent être claires et intelligibles, et ne pas être soumises, dans le temps, à des variations trop fréquentes, ni surtout imprévisibles ». Le Conseil d’État, qui rappelle qu’elle « constitue l’un des fondements de l’État de droit », dégage deux approches : l’une formelle, l’autre temporelle. ●  La sécurité juridique est d’abord garantie par la qualité de la loi. Cette dernière doit être normative, c’est-à-dire prescrire, interdire, sanctionner. Le rapport souligne à cet égard que « la loi non normative affaiblit la loi nécessaire en créant un doute sur l’effet réel de ses dispositions ». En outre, la norme doit être intelligible. « L’intelligibilité implique la lisibilité autant que la clarté et la précision des énoncés ainsi que leur cohérence », précise le Conseil d’État. ●  La sécurité juridique dépend aussi de la prévisibilité de la loi. Sans pour autant aboutir à un conservatisme excessif, « le principe de sécurité juridique suppose que le droit soit prévisible et que les situations juridiques restent relativement stables », explique le rapport. Il s’agit d’une part de la non- rétroactivité de la loi, et d’autre part de la protection des droits acquis et de la stabilité des situations juridiques. LA SÉCURITÉ JURIDIQUE | 8e congrès de l’ACCF 480 1.  PROTECTION CONSTITUTIONNELLE DE LA SÉCURITÉ JURIDIQUE Situation générale 1.1. Le principe de « sécurité juridique » est-il, en tant que tel et de façon autonome, expressément garanti par le texte de votre Constitution ? D’un point de vue général, le principe de sécurité juridique a pour dessein l’accessibilité et la lisibilité des normes juridiques pour les citoyens, de manière à ce que ces derniers puissent accorder aisément leur comportement avec la loi en vigueur. La mise en œuvre du principe repose sur des textes énoncés clairement, rationnellement et sans ambiguïté dans ses dispositions ; elle doit instaurer la confiance chez les citoyens en évitant des changements continuels des prescriptions légales qui prêteraient à confusion ainsi que l’assurance de la non- rétroactivité de la loi. Dans la Constitution malgache, le principe de sécurité juridique n’est pas expressément inscrit dans les dispositions de la loi fondamentale, que ce soit dans le préambule ou dans les principes fondamentaux. 1.2. Est-ce un principe formellement reconnu dans la jurispru­ dence de votre Cour ? Depuis quand ? Sur quels fondements textuels ? La jurisprudence de la Haute Cour constitutionnelle ne fait pas expressément référence au principe de sécurité juridique. Toutefois, l’accessibilité et l’intelligibilité de la loi sont posées comme des valeurs constitutionnelles reconnues, sans que des fondements textuels les soutiennent. 1.3. Merci d’indiquer les principales étapes de cette reconnais­ sance et ce qui a pu justifier les orientations retenues. 1.4. A défaut, qu’est-ce qui justifie, selon la Cour, l’absence de reconnaissance formelle du principe de sécurité juridique ? La Haute Cour constitutionnelle malgache se base généralement sur le principe de légalité pour rendre ses décisions, avis et arrêts. La référence stricto sensu à la loi prime dans les débats et l’emporte la plupart du temps sur tout autre principe juridique. En outre, dans les mentalités, la pratique du droit ne nécessite pas Haute Cour Constitutionnelle de Madagascar 481 une reconnaissance formalisée des divers principes juridiques pour qu’ils soient appliqués. Il convient de signaler que le principe de sécurité juridique n’a jamais figuré dans aucune des constitutions malgaches, de la première à la quatrième République. 1.5. Votre jurisprudence a-t-elle connu des évolutions récentes sur cette matière ? Dans les récents contrôles de constitutionnalité, la Cour exige plus de précision quant à la définition précise des termes et expressions employés dans les lois à promulguer afin d’apporter plus de clarté dans les textes ; elle s’attache à relever les dispositions insuffisamment précises si auparavant, les lois déférées étaient principalement évaluées selon leur sens global. En cas de manque de clarté d’une disposition, soit la Cour censure l’article incriminé soit pose une réserve d’interprétation, ayant la forme d’une réserve directive. 1.6. Merci d’indiquer les aspects qui sont aujourd’hui débattus, au sein de votre Cour, quant à la protection de la sécurité juridique. 1.7. La jurisprudence constitutionnelle étrangère et/ou le droit international régional ont-ils eu une influence significative sur votre jurisprudence en matière de sécurité juridique ? Merci de le préciser. Le droit malgache étant de tradition romano-germanique, les juridictions malgaches s’inspirent de la jurisprudence française, du droit comparé en cas de vide juridique. La Haute Cour constitutionnelle malgache ne fait pas exception à cette pratique. Mais du fait de son appartenance à différentes organisations régionales et mondiales de juridictions constitutionnelles, elle élargit progressivement ses sources d’inspiration. Contentieux de la sécurité juridique 1.8. Le principe de sécurité juridique est-il pleinement invocable dans le contentieux constitutionnel incident ? Etant donné que le principe de sécurité juridique implique l’accessibilité, l’intelligibilité et la non-rétroactivité des lois, ces divers aspects peuvent entrer en considération lors du contentieux constitutionnel incident – connu sous l’appellation LA SÉCURITÉ JURIDIQUE | 8e congrès de l’ACCF 482 « exception d’inconstitutionnalité » à Madagascar – bien que les termes « sécurité juridique » ne sont pas énoncés. 1.9. Le principe de sécurité juridique est-il fréquemment invoqué dans les contentieux portés devant votre Cour ? Merci d’indiquer les données statistiques chiffrées (nombre/ taux d’invocation selon le contentieux, domaines des affaires concernées…). A ce jour, dans les rares cas d’exception d’inconstitutionnalité traduits devant la Cour, aucun n’a fait référence au principe de sécurité juridique. En outre, elle ne se réfère pas formellement au principe de sécurité juridique dans le traitement des cas qui lui sont soumis. 1.10. Le principe de sécurité juridique est-il mobilisé par vos cours en tant que motif d’intérêt général pouvant justifier une atteinte portée à un droit protégé par la Constitution ? Si oui, dans quels cas ? Est-ce fréquent ? Merci de l’illustrer. Non. 2.  LES EXIGENCES CONSTITUTIONNELLES EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ JURIDIQUE Confiance et attentes légitimes 2.1. Quelle protection accordez-vous aux droits acquis, à la stabilité du droit et à la prévisibilité du droit ? Bien que nulle mention expresse concernant les droits acquis ne figure dans la loi fondamentale, de même pour la stabilité et la prévisibilité du droit, ces divers aspects sont pris en compte lors des débats de la Haute Cour constitutionnelle et peuvent entrer en ligne de compte lors de la rédaction de la décision, de l’arrêt ou de l’avis. 2.2. Comment votre Cour protège-t-elle la « confiance légitime » ou les situations légalement acquises ? Le principe de « confiance légitime » n’existe pas expressément en droit malgache. De fait, la Cour n’a pas été directement confrontée à la situation de remise en cause de la « confiance légitime ». Par contre, les situations légalement acquises sont respectées car la Cour impose le principe de la non-rétroactivité de la loi, sauf les lois pénales plus douces. Haute Cour Constitutionnelle de Madagascar 483 2.3. Votre Cour appréhende-t-elle la protection de ces situations de manière objective et abstraite ou, à l’inverse, de manière subjective et concrète ? Merci d’illustrer votre réponse. 2.4. Merci d’indiquer le nombre de déclarations d’inconsti- tutionnalité fondées sur ces exigences. Exigences constitutionnelles en matière de qualité de la loi 2.5. Quelle protection accordez-vous aux exigences de clarté, d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi ? La Cour est exigeante en matière de formulation des dispositions légales, insistant sur la précision pour protéger les droits de tout un chacun. Soit elle censure la disposition manquant de clarté ou d’intelligibilité soit elle pose une réserve d’interprétation précisant le sens de la disposition législative. 2.6. Avez-vous consacré une exigence de normativité de la loi ? Tout comme les grands principes mis en œuvre dans le domaine de la loi, le besoin de normativité de la loi est implicitement reconnu au sein de la Haute Cour constitutionnelle malgache. 2.7. Quelle valeur accordez-vous à la promotion de la simplifi- cation du droit ? Est-ce une exigence mobilisée au contentieux ? En pratique, les textes composant une loi déférée sont acceptés du moment qu’ils font preuve de clarté et d’intelligibilité. En matière de contentieux, il est rare que le besoin de simplification du droit se fasse ressentir. 2.8. Merci d’indiquer le nombre de déclarations d’inconsti- tutionnalité fondées sur ces exigences. Exigences constitutionnelles en matière de non-rétroactivité des lois 2.9. Quelle protection accordez-vous à la protection des contrats légalement conclus ? La non-rétroactivité des lois est un principe reconnu par la jurisprudence de la Haute Cour constitutionnelle malgache sur le plan général et également en matière de contrats. LA SÉCURITÉ JURIDIQUE | 8e congrès de l’ACCF 484 2.10. Quelle protection accordez-vous à la protection de la chose jugée et aux décisions de justice ? (Notamment à l’égard uploads/S4/c8q-madagascar.pdf

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  • Publié le Mar 14, 2021
  • Catégorie Law / Droit
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