COURS D'INTRODUCTION A LA LINGUISTIQUE HISTORIQUE ANNEE 94-95 NOTES DU COURS DE
COURS D'INTRODUCTION A LA LINGUISTIQUE HISTORIQUE ANNEE 94-95 NOTES DU COURS DE M. SANDOZ 2 LINGUISTIQUE HISTORIQUE A. Introduction La linguistique [science du langage, c'est-à-dire étude objective, descriptive et explicative de la structure, du fonctionnement (linguistique synchronique) et de l'évolution dans le temps (linguistique diachronique) des langues naturelles humaines] s'est constituée au début du XIXème siècle, mais les frontières décisives ont été fixées plus tard dans l'oeuvre de Ferdinand de Saussure (1857-1913). Celui-ci donnait des cours à sa chaire de l'université. A partir de notes d'étudiants, Bally & Sechehaye, deux de ses disciples, ont réalisé un ouvrage continu, intitulé Cours de linguistique, paru après la mort du maître. Il existe une édition critique du cours réalisée par Engler. On y distingue deux points pertinents dans l'édition de T. de Mauro (p. 115) : - Axe des simultanéités : coexistence de faits - Axe de successivité : tous les faits du premier axe avec leurs changements La langue est un système d'ordre complexe et il ressort l'utilité de l'étudier selon les deux axes. Par conséquent, on observe l'évolution de deux linguistiques : - active : synchronique (ligne horizontale) : étudie la statique de la science, [se fonde sur l'observation des éléments d'une langue à un moment donné de son histoire, indépendamment de toute évolution dans le temps] - passive : diachronique (ligne verticale) : étudie l'aspect évolutif de la langue Synchronie : état de langue. Diachronie : phase d'évolution, système évolutif. L'opposition des deux systèmes est développée dans la première partie du cours. On revendique d'abord la légitimité d'une synchronie autonome qui ne dépend pas de sujets historiques. Cela représente une attitude nouvelle à l'époque car la linguistique s'intéresse surtout à la diachronie. On peut étudier une langue sans se référer à son évolution antérieure. Une phrase française peut être étudiée d'une manière synchronique : reconnaissance des mots, des sons, des relations entre les unités qui entretiennent des rapports entre elles. On peut aussi étudier une langue selon une recherche diachronique ou historique, selon son évolution. Il y a donc deux manières d'approche pour étudier une langue. La démarcation entre les deux approches est nette, bien qu'on ne nie pas l'existence de liens de causalité. Les études sur le langage se sont depuis scindées en deux parties. L'historique s'est longtemps tenue à l'écart de la réflexion linguistique. Le Cercle de Prague de Roman Jakobson a pourtant fait un effort pour réconcilier les approches diachroniques et synchroniques. "On ne peut pas poser de barrières infranchissables entre les deux systèmes. L'étude diachronique n'exclut pas les notions de systèmes." L'étude de l'évolution [ensemble des modifications subies entre deux moments de son histoire] ne porte pas seulement sur des objets isolés, mais aussi sur la prise en compte de la structure. L'utilité d'un mélange se confirme toujours davantage. De plus, une langue se présente toujours comme un ensemble structuré et ne perd en aucun cas son rôle de communication. L'historien ou diachronicien appréhende des synchronies successives. Cette méthode met en évidence des relations entre les changements. 3 Exemple : oncle vient du latin avunculus, en réalité, la base est avunculu-. Peu importe les détails, il s'agit de modifications matérielles. Ensuite, au niveau du sens, il y a aussi une évolution. avunculus : oncle maternel oncle : aussi bien du frère que de la mère On a donc un élargissement du champ d'emploi du terme. L'évolution historique se contenterait uniquement du changement. La nature du changement ne s'éclaire qu'à la lueur de la synchronie. avunculus est opposé à patruus (parenté du père) matertera est opposée à amita (tante) Le français en revanche ne possède plus que deux termes (venant de avunculus et amita). Tante provient de tua amita, puis t'ante, puis tante. La disparition des deux mots entraîne une redistribution des fonctions, on assiste donc, au niveau du sens, à un élargissement de la sphère des deux mots restants. On soulignera ici l'intérêt de la synchronie dans l'étude diachronique. Réciproquement, le point de vue diachronique complète la description synchronique. B. Problème de la répartition entre la forme pleine le et élidée l' de l'article. Le devant consonne : le car, le poison L' devant voyelle ou semi voyelle : l'art, l'oison Il y a toutefois des exceptions. Certaines voyelles initiales demandent la forme pleine. Par exemple, le hameau et l'anneau. Le h de hameau est purement graphique, il ne correspond pas à une prononciation. Phonétiquement, on l'écrit [amo]. Il y a une limitation de l'élision non pas du point de vue synchronique, mais du point de vue de l'aspect historique. C'est la trace en synchronie d'une réalité antérieure. Au Moyen Âge, hameau ou hamel comportait une consonne aspirée. Cette aspiration existe encore au XVIème siècle d'après les grammairiens de l'époque. La présence de cette aspiration s'explique par son origine germanique. Il dérive d'un terme ham (village) qui se rattache à Heim de l'allemand ou home en anglais. Le terme français provient d'un dialecte germanique, le francique des Francs. Aujourd'hui, seul le phénomène syntaxique garde cette aspiration. La langue d'aujourd'hui manifeste à étendre l'élision (avec un_hameau, pas de liaison) et le hiatus. Honteux, par exemple, se prononce parfois avec la liaison, on s'approche ainsi vers la tendance à l'abandon de toute trace d'ancienne aspiration. Le descripteur de langue rencontre fréquemment des différences dans la synchronie. 50% des auditeurs parisiens distinguent entre è (ouvert) et é (fermé). Par exemple, maître et mettre, renne et reine. L'autre moitié ne la fait pas et confond les deux sons. Du point de vue synchronique, le synchronicien relève des comportements différents. Les parisiens qui connaissent la distinction entre les è et les é sont en moyenne 14 ans plus âgés. Les jeunes confondent, mais cette distinction est un trait régressif [changement de point d'articulation qui est orienté de l'avant vers l'arrière] qui est en train de disparaître. La prise en compte de l'âge est rendue par les données diachroniques. La synchronie dynamique prend ici forme dans une synchronie développée (cf. le livre de Martinet). Les méthodes de travail ne sont pas les mêmes. Le descripteur contemporain recueille ses matériaux sur des sujets parlants, donc le champ d'observation est un exemple vivant de la langue. Le diachronicien, lui, interroge les textes (parfois des enregistrements) et il rencontre des problèmes spécifiques. Entre un discours prononcé et sa transcription existe toujours un décalage. L'écriture suppose la réalité, mais ne la reproduit jamais parfaitement. C. Les signes 1. Introduction Dans un premier type de représentation graphique, le signe [objet, forme ou phénomène qui représente autre chose que lui-même] s'associe à un concept, c'est un signe-mot et on appelle cela une écriture idéographique ou logographique. Ce système de notation ressemble un peu à nos chiffres. La représentation symbolique des chiffres se caractérise par son indépendance de la réalité graphique. Par exemple, 1 s'applique à toutes les langues 4 : un, eins, one, uno... 1 renvoie directement au concept, sans passer par la phonie. Cela permet une communication au-delà des frontières linguistiques, car la compréhension est aisée pour tout le monde. L'avantage de ce type de graphie est compensé par un inconvénient : c'est le manque d'économie. Le nombre de signes détermine le nombre de mots. Bien sûr, n'importe quel idiome possède un lexique nombreux. Mais si l'on prend l'exemple du chinois, il possède plusieurs milliers de signes qui correspondent chacun à un mot différent. 2. L'antiquité Dans l'antiquité, on retrouve cela dans les hiéroglyphes [chacun des signes du système d'écriture idéographique des anciens Egyptiens]. Les plus anciens documents remontent à ~ 3'000 av. J.-C. Leur déchiffrement remonte à 1822 par Fr. Champollion. Ce déchiffrement n'a été possible que par la découverte d'un document trilingue : la fameuse pierre de Rosette (port d'Egypte). En 1799, les soldats de Napoléon faisaient des travaux de terrassement et ils découvrirent un bloc de pierre avec trois textes : un texte en hiéroglyphe, un en démotique (écriture cursive de l'ancienne Egypte) et un en grec alphabétique. Le texte remonte à 196 av. J.-C., époque de Ptolémée Epiphane (roi d'Egypte). Dans la version hiéroglyphique se trouvent des idéogrammes [type d'écriture qui représente des significations à l'aide de dessins reconnaissables ou abstraits sans se référer à la forme phonique] et des signes de valeur phonétique. Il s'agit de pictogrammes [type d'écriture qui représente des significations à l'aide de dessins figuratifs ou symboliques sans se référer à la forme phonique d'un énoncé]. Exemples : - = soleil - = montagne - = eau (3 lignes brisées) Avec ce genre de signes, il faut une très grande convention pour exprimer les verbes. En effet, comment dessiner une action ou un état ? Pour aller, on dessine des jambes ; pour manger, un personnage assis portant sa main à la bouche. Des procédés complémentaires facilitent la lecture, ce sont 24 signes de valeur phonétique. Ils représentent des consonnes et servent à la notation d'éléments linguistiques inexprimables par des idéogrammes. Ces signes suppléent aux lacunes idéographiques. Ils s'emploient aussi comme compléments aux idéogrammes polyvalents. Ils s'emploient parfois pour plusieurs mots différents d'un même champ sémantique (ex : voie, uploads/Litterature/ cours-de-linguistique-historique.pdf
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- Publié le Oct 25, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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