Vie et œuvre d’Alfred de Vigny (1797-1863). Le comte Alfred de Vigny occupe une

Vie et œuvre d’Alfred de Vigny (1797-1863). Le comte Alfred de Vigny occupe une place à part dans la poésie romantique. Il se sentit d’abord porté vers la carrière militaire, où s’étaient illustrés son père et ses aïeux. Entré dans l’armée au moment où l’épopée impériale était close, il ne pouvait avoir, comme officier, que des déceptions. En 1823, cependant, il partit pour la guerre d’Espagne ; mais son régiment laissé en observation à la frontière, ne prit part à aucun combat. Il ne rapporta de cette expédition que les vers du Cor, sur la mort de Roland. Aussi démissionna-t-il, en 1827, pour se retirer dans sa « tour d’ivoire ». Depuis 1828, il s’était mêlé au mouvement romantique ; il avait collaboré au Conservateur littéraire de Victor Hugo. En 1822, il publia son premier recueil. En 1826, il en fit une édition augmentée, sous le titre de Poèmes antiques et modernes. Puis il se tourna tout entier vers le roman et vers le théâtre. Il ne donna plus, comme poèmes, que le Mont des Oliviers et la Maison du berger (insérés dans la Revue des Deux-Mondes). Après sa mort seulement parut le livre intitulé les Destinées, et qui comprend, avec les deux pièces que nous venons de nommer, ses plus beaux poèmes : la Colère de Samson, la Mort du loup, la Bouteille à la mer, l’Esprit pur. Le roman historique Alfred de Vigny a publié en 1826, Cinq-Mars ou une Conjuration sous Louis XIII. Dans l’introduction, il présente une théorie du roman historique, où il revendique les droits du poète en face des droits de l’histoire. C’est pourquoi il invente beaucoup plus qu’il ne peint ses personnages : Louis XIII, Cinq-Mars, de Thou, Richelieu. En 1832, Vigny donna Stello ou les Diables bleus, dans lequel l’histoire n’intervient qu’à titre d’exemples. Il s’agit, pour l’auteur, de démontrer une thèse, à savoir que le poète, ou plus généralement l’homme de lettres, est un incompris, quelle que soit la forme politique de la société où il essaye de vivre : monarchie absolue, monarchie constitutionnelle, république. Le dernier roman de Vigny, Grandeur et Servitude militaire (1835), est encore une « démonstration », très noble d’ailleurs, et qui fait honneur au soldat-poète. L’histoire n’y apparaît que comme fond de tableau dans les nouvelles destinées à illustrer le livre : Laurette ou le Cachet rouge, la Veillée de Vincennes, la Vie et la Mort du capitaine Renaud ou la Canne de jonc. C’est, à tous les points de vue, et malgré une solennité quelque peu creuse dans les chapitres de théorie, la meilleure œuvre en prose de Vigny. STENDHAL Un écrivain majeur dont la vie est un roman Né à Grenoble le 23 janvier 1783, Henri Beyle – son véritable nom – perdit sa mère alors qu’il n’a que sept ans. Il connaît dès lors une enfance difficile entre son père, procureur au parlement du Dauphiné, « un homme extrêmement peu aimable, réfléchissant toujours à des acquisitions ou des ventes de domaine », Séraphie, sa tante maternelle qui entend l’éduquer sévèrement, et l’abbé Raillane, précepteur qui le terrorise. « Je haïssais l'abbé, je haïssais mon père, source des pouvoirs de l'abbé, je haïssais encore plus la religion au nom de laquelle ils me tyrannisaient », écrira-t-il dans La Vie de Henry Brulard, autobiographie imaginaire publiée à titre posthume, en 1890. On veut faire de lui un homme à l’image de son père : il est privé de sorties, de théâtre, de musique, il lui est interdit de jouer avec les autres enfants, voire de discuter avec les domestiques. On l’empêche de lire. De rire aussi. En rébellion permanente, il se construit en opposition, dans une dualité manichéenne : d’un côté les ennemis, le père, sa sœur Zénaïde, la rapporteuse, Séraphie, le clergé et la monarchie ; de l’autre, les amis, dont sa sœur Pauline qui sera longtemps sa confidente. Il se console auprès de son grand-père maternel, le docteur Gagnon, imprégné de Rousseau et de Voltaire, et rêve d’Italie auprès de sa grand-tante Élisabeth qui lui raconte le pays de ses ancêtres. À treize ans, il entre à l’École centrale de Grenoble, qui depuis la Révolution remplace les collèges religieux. Très doué en mathématiques, il arrive à Paris en novembre 1799, au lendemain du coup d’État du général Bonaparte, devenu Premier Consul, pour passer le concours de l’École polytechnique, mais surtout se soustraire du carcan familial. Déprimé par Paris, mélancolique, malade, il renonce finalement à se présenter et s’installe chez son cousin, le comte Daru, qui lui procure un emploi de bureau au Ministère de la Guerre, avant de l’aider à rejoindre l’armée d’Italie en qualité de sous-lieutenant du 6e dragon, sous la bannière de son héros Napoléon Bonaparte. L’Italie l'ensorcèle, ses paysages, l’opéra, les musées, les Italiennes et surtout Milan, « le plus beau lieu de la terre » qui deviendra sa vraie patrie. Fatigué de la vie militaire, Henri Beyle démissionne et rentre à Paris en avril 1802. Il se rêve dramaturge, fréquente des actrices qui deviennent ses maîtresses, mais ne publie que très difficilement ses textes, lorsqu’il les achève. Conscient de son échec, il renoue en 1806 avec son cousin et devient fonctionnaire impérial. Il voyage en Allemagne, traverse la ville de Stendhal qui lui donnera en 1817 l’idée de son pseudonyme et assiste de loin aux batailles napoléoniennes qui nourriront La Chartreuse de Parme. De retour à Paris en 1810, il est nommé auditeur au Conseil d'État, puis inspecteur du mobilier et des bâtiments de la Couronne. En 1812, alors qu’il travaille à l'Histoire de la peinture en Italie, il est chargé de porter la correspondance officielle à l’Empereur qui mène la campagne de Russie. Il assiste à l’incendie de Moscou et perd son manuscrit durant la retraite. Par chance, il traverse la Bérézina la veille de la destruction des ponts et se fait remarquer pour sa bravoure et son esprit d’initiative. En 1814, les Bourbons retrouvent le pouvoir et le corps des auditeurs est dissout. Beyle voit ses ressources gravement amputées et il est perclus de dettes. Il écrit les Lettres sur Haydn, Mozart et Métastase qu’il publiera à compte d’auteur l’année suivante, sous le pseudonyme de Louis- Alexandre-César Bombet. Puis il part s’installer à Milan. Entre des scènes orageuses avec sa maîtresse, Angela Pietragua, rencontrée en 1801 et qui ne se donna à lui qu’en 1811, il récrit son Histoire de la Peinture en Italie. En 1815 il rompt avec Angela, qui lui a été infidèle, et tombe en dépression. Il publie en 1817, encore à compte d’auteur, son Histoire de la peinture en Italie, signée M.B.A.A., qui signifie M. Beyle Ancien Auditeur, et la même année, dans les mêmes conditions, mais à Paris et sous le nom de M. de Stendhal, officier de cavalerie, Rome, Naples et Florence, livre entièrement rédigé par ses soins, les précédents n’étant que le fruit de compilations érudites, voire de plagiats sans vergogne. De l'amour En 1818, il travaille à une Vie de Napoléon lorsqu’il tombe passionnément amoureux de Matilde Dembowski, qui ne sera qu’indifférence à son égard. Profondément malheureux, il écrit De l'amour qui se présente comme « une description détaillée et minutieuse de tous les sentiments qui composent la passion nommée amour » et dans laquelle il développe quasi scientifiquement sa fameuse théorie de la cristallisation. Soupçonné par le gouvernement autrichien de carbonarisme, désappointé par l’attitude de Matilde, il quitte Milan en 1821 pour mener à Paris une vie de dandy. Il collabore à des journaux britanniques. De l'amour paraît en 1822, Racine et Shakespeare en 1823, ainsi qu’uneVie de Rossini qui sera son premier succès littéraire. Il devient l’année suivante l’amant de la comtesse Clémentine Curial, avec qui il vivra des amours très agitées, et publie une deuxième version de Racine et Shakespeare où il répond aux attaques contre le romantisme. Entre temps, prenant Hugo de vitesse, Stendhal a appelé à rompre avec le classicisme, tout en se démarquant de l’emphase des romantiques et en prônant une troisième voie : le réalisme. En 1825 meurt Matilde et, en 1826, Clémentine Curial met fin à leur liaison. Elle « est celle qui m'a causé la plus grande douleur en me quittant, écrira-t-il dans La vie de Henry Brulard. Mais cette douleur est-elle comparable à celle occasionnée par [Matilde] qui ne voulait pas me dire qu'elle m'aimait ? » Angela, Matilde, Clémentines, trois passions contrariées et qui l’ont trop fait souffrir : Stendhal se réfugie alors dans la rédaction d’Armance, son premier roman, mis en vente en 1827 sans nom d'auteur, et qui passera inaperçu. Le Rouge et le Noir Le cheminement personnel, politique, social, sentimental et littéraire de Stendhal l’a conduit jusqu’au Rouge et le Noir. Lorsqu’il entreprend ce roman, il a traversé un demi-siècle d’histoire. Il a connu la Révolution, la Terreur, le Directoire, l’Empire, la Restauration de Louis XVIII et celle de Charles X, renversée par les Trois Glorieuses et l’avènement de Louis-Philippe. C’est bien une chronique en effet, au sens vrai du terme, à la fois récit uploads/Litterature/ vigny-et-stendhal.pdf

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