-IX IEME CONFERENCE INTERNATIONALE DE MANAGEMENT STRATEGIQUE- " PERSPECTIVES EN
-IX IEME CONFERENCE INTERNATIONALE DE MANAGEMENT STRATEGIQUE- " PERSPECTIVES EN MANAGEMENT STRATEGIQUE " AIMS 2000 Montpellier - 24-25-26 Mai 2000 - Ethique ou déontologie : quelles différences pour quelles conséquences managériales ? L’analyse comparative de 30 codes d’éthique et de déontologie Henri ISAAC Maître de conférences en sciences de gestion CREPA Université Paris Dauphine 75775 Paris Cedex isaac@dauphine.fr Tel : 01 44 05 43 08 Fax : 01 44 05 40 84 Samuel MERCIER Maître de conférences en sciences de gestion CREGO/LATEC, IAE de Dijon Université de Bourgogne Samuel.Mercier@u-bourgogne.fr Tel/Fax : 03 80 70 17 72 Introduction. La décennie qui s’achève aura vu l’extension de l’espace marchand : libéralisation des marchés et des échanges, privatisations, dérégulations. Cette profonde modification de l’environnement socio-économique des entreprises a entraîné de très nombreuses modifications concomitantes des méthodes de management. Parmi, ces modifications sensibles, les préoccupations éthiques dans l’entreprise ont tenu une place sans cesse croissante débouchant sur la mise en place de comités d’éthique et de codes d’éthique. Avec l’effacement progressif d’une régulation macro-sociétale, les entreprises tentent de répondre par une régulation des comportements en interne. Parallèlement, ce nouvel environnement se caractérise pour certains (Cotta,1991) par une corruption croissante de la sphère politique par la sphère économique. A ceux qui dénoncent cette montée en puissance de la corruption, les entreprises opposent, dans le pire des cas la nécessité de faire des affaires, dans le meilleur des cas, l’engagement dans une démarche éthique ou déontologique. Dans le même temps plusieurs professions possèdent depuis de nombreuses années des règles professionnelles rassemblées dans un code de déontologie. Dans les entreprises, l’analyse stratégique, c'est-à-dire le questionnement portant sur le domaine d’activités, sur le mode de développement de l’entreprise et sur l’agencement des ressources se complète, de plus en plus, par une réflexion sur l’éthique de l’entreprise. Jusqu’à présent, les principes directeurs qui composaient la politique générale de l’entreprise restaient largement implicites. Aujourd'hui, les entreprises mettent en place des démarches éthiques ou déontologiques formalisées. Ces pratiques s’inscrivent dans le cadre de la montée de l’entreprise relationnelle. La performance repose de plus en plus sur la qualité des relations entre les acteurs. Les allers-retours permanents entre les acteurs au sein de la firme, entre les firmes et leurs fournisseurs, leurs clients, leur environnement sont au cœur de l’efficacité. Ces interactions étant susceptibles de provoquer des conflits éthiques, il est devenu opportun de formaliser des valeurs et des règles de conduite. La société, les revues académiques, des chercheurs s’emparent alors de cette problématique sans que jamais une distinction précise ne soit opérée entre éthique et déontologie. Il n’existe, à notre connaissance, aucune étude empirique qui se propose de comparer ces deux types de démarche. Or, peut-on mettre sur le même plan le code d’éthique de la Lyonnaise des Eaux et le code de déontologie des experts-comptables ? De quoi parlent exactement les entreprises lorsqu’elles arguent d’une démarche éthique ? Plus généralement, qu’est-ce qui distingue éthique et déontologie ? En quoi cette distinction fait-elle sens pour le management de l’entreprise ? Le simple recensement des codes d’éthique et de déontologie selon leur émetteur met en évidence deux groupes de codes distincts : les entreprises prises individuellement et des organismes de regroupement professionnel (syndicat, ordre). Ce premier constat suffit-il à distinguer deux catégories d’objets de gestion ? Bien évidemment, non. Dès lors, une analyse systématique du contenu des codes nous a semblé un moyen de mettre en évidence des différences qui ne relèvent pas de simples questions de vocabulaire, même si c’est par ce biais que nous les analysons. Ces différences sont beaucoup plus profondes et renvoient directement à la finalité même de ces objets. Après une présentation des concepts d’éthique et de déontologie, nous mettons en œuvre une analyse de contenu de trente codes afin de mettre en évidence leurs différences. Nous proposons ensuite une interprétation de ces deux outils de gestion et en tirons des conclusions quant à leur instrumentation dans une perspective de management stratégique. 1 - Ethique et déontologie : une première approche Ethique et morale sont deux termes voisins qui sont souvent mal différenciés dans la littérature parce qu’ils sont équivalents étymologiquement. Le terme éthique est utilisé, dès le XIIIème siècle, dans le milieu restreint des philosophes de profession et renvoie à une racine grecque : êthos (mœurs). Le premier usage attesté du terme morale dans la langue française se situe en 1530 et provient du mot latin mores (mœurs). Les philosophes américains sont généralement portés à assumer la pleine synonymie que révèle l’étymologie et font de l’éthique et de la morale un usage indifférencié. A l’inverse, les penseurs européens aiment à préciser les domaines de compétence. Selon Ricoeur (1988, p. 42), il convient de réserver le terme d’éthique pour tout le questionnement qui précède l’introduction de l’idée de loi morale et de désigner par morale tout ce qui se rapporte à des impératifs. La morale se définit comme un ensemble de normes et de règles qui doivent s’imposer à tous, elle dit le bien et le mal, c’est donc à la fois un référentiel et un impératif. L’éthique introduit une dimension supplémentaire : elle impose de donner une place à l’individu, reconnu capable de faire valoir sa parole et ses intérêts propres. Le passage de la morale à l’éthique est celui de l’universel au particulier et traduit sa concrétisation dans l’action de chacun, pris comme un individu intégré dans un collectif de travail. Ainsi, l’éthique d’une entreprise regroupe un ensemble de principes, de valeurs et de croyances qui dirigent la conduite des individus. Elle a pour ambition de rechercher, par une réflexion personnelle, la bonne et la mauvaise façon d’agir, c'est-à-dire une sagesse de l’action. Le terme déontologie a été forgé par Jeremy Bentham dans un ouvrage posthume publié en 1834 : « Deontology or the science of morality ». Son utilisation en France remonte au début du XX° siècle. Littéralement, la déontologie est la science des devoirs, ce qui est très proche de la définition originelle de l’éthique vue comme la science de la morale. Ce qui va progressivement différencier la déontologie de l’éthique, c’est l’usage du vocable dans des contextes bien précis : ceux des devoirs professionnels. Comme le note Couret (1992), « la déontologie est nécessairement l’expression opérationnelle d’une éthique des affaires. L’éthique donne des principes directeurs : la règle déontologique leur donne un contenu concret. ». La déontologie vise à réguler les situations couramment rencontrées par un corps de personnes exerçant un métier identifié. Elle cherche à donner impérativement à ces situations des solutions pratiques et précises définissant les règles de comportement à adopter. L’existence d’un code de déontologie au sein d’une profession peut cependant avoir des origines différentes : soit il s’agit de professions à accès réglementé et dès lors la déontologie est un élément structurant de la profession à l’exemple des avocats ou des experts-comptables, soit il s’agit de professions dont l’accès est libre, et dès lors la déontologie est le fruit d’une auto-réglementation que s’impose les entreprises d’un même secteur à l’instar du conseil en management. Dans les deux cas, l’instance commune (syndicat, ordre, association professionnelle) est l’organe en charge de la définition des règles déontologiques, de leur mise en œuvre, des contrôles du bon respect de ces règles et des éventuelles sanctions en cas de défaillance (pénalités financières, interdiction d’exercer, exclusion). Le recours à la formalisation d’une éthique ou d’une déontologie peut être appréhendé comme un outil de régulation des relations entre l’organisation et ses différentes parties prenantes. Une partie prenante est un groupe ou un individu qui peut affecter ou être affecté par la réalisation des objectifs de l’entreprise (Mercier, 1999, p. 61). C’est donc un acteur pour lequel le développement et la bonne santé de l’entreprise constituent un enjeu important. Cela inclut les fournisseurs, les consommateurs, les employés, actionnaires et la communauté locale. A la suite des travaux de Freeman (1998), il est possible d’interpréter l’entreprise comme un nœud de contrats entre les dirigeants et ses parties prenantes. Les dirigeants contractent, en effet, avec toutes les parties prenantes, de façon directe ou indirecte. Il est de leur responsabilité de diriger les ressources pour obtenir des avantages aux parties prenantes légitimes (qu’elles aient passé un contrat formel ou implicite avec la firme) et pour sauvegarder le bien-être de l’entreprise. Les codes de déontologie constituent un ensemble de règles dont se dote une profession, ou une partie de la profession, au travers d’une organisation professionnelle, qui devient l’instance d’élaboration, de mise en œuvre, de surveillance et d’application de ces règles. Le code éthique formalise les valeurs, principes et règles de conduite d’une entreprise. Il vise, par une réflexion propre à l’entreprise, à se doter d’une orientation éthique en liaison avec la culture d’entreprise. Cette autorégulation des comportements peut être qualifiée de pro-active : elle permet d’anticiper les demandes de nature sociétale. C’est une possibilité pour l’entreprise de promouvoir des normes de comportement qui satisfont aussi bien ses propres intérêts que les attentes des acteurs extérieurs. Guillon (1994, p. 10) indique que cette volonté de devancer les pouvoirs publics dans uploads/Philosophie/ ethique-ou-deontologie.pdf
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- Publié le Sep 10, 2021
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