la danse de l’âme Les écrits de Hazrat Inayat Khan comprennent des prières, des

la danse de l’âme Les écrits de Hazrat Inayat Khan comprennent des prières, des aphorismes, des poèmes, des dits adressés à ses disciples, et enfin des conférences. À la fois conforme aux tenants de l’islam et ouvert aux autres confessions dans leur expression mystique, l’enseignement de Hazrat Inayat Khan a pour origine et fin la déification de l’âme du chercheur de vérité. L’identification à Dieu par l’amour comme facteur de connaissance s’y exprime tour à tour dans les termes les plus ciselés et les plus poétiques. Mais la voie de la connaissance fait également l’objet de nombreux poèmes et épigrammes, sans doute parce qu’il faut connaître pour aimer et aimer pour connaître ; mais surtout parce que, pour Hazrat Inayat Khan, Dieu est l’unité de l’amour et de la connaissance. Hazrat Inayat Khan est né le 5 juillet 1882 à Baroda, dans la province du Gujarat en Inde. Dès 1903, il suit les enseignements de Sayyed Abu Hashim Madani, un maître soufi qui lui confie la tâche “d’apporter la sagesse du soufisme au monde occidental”. À partir de 1922, Hazrat Inayat Khan vit en France, à Suresnes, où il continue d’enseigner tout en parcourant le monde. Il meurt en Inde, à Delhi, le 5 février 1927. Il est aujourd’hui considéré comme l’un des principaux introducteurs du soufisme en Occident. Choix, présentation et traduction par Alain Sainte-Marie. ACTES SUD “LE SOUFFLE DE L’ESPRIT” collection dirigée par Christian Dumais-Lvowski La collection “Le Souffle de l’esprit” se veut le reflet d’une ouverture des uns aux autres, à travers la prière, la réflexion, la méditation. Nous avons demandé à des personnalités religieuses ou laïques, croyantes, athées ou agnostiques, de nous faire part de leurs “prières”, qu’elles soient une invocation à Dieu ou une réflexion de sagesse sur l’humain et son devenir. DU MÊME AUTEUR LE GRAND CYCLE DE L’ÂME, Le Souffle d’or, 1984. AU CŒUR DU SOUFISME, Véga, 2005. LA VIE INTÉRIEURE, Koutoubia, 2009. GAYAN, NOTES DE LA MUSIQUE SILENCIEUSE, Koutoubia, 2009. LE MYSTICISME DU SON, Encre d’Orient, 2011. L’ESPRIT ET LA MATIÈRE, Apopsix, 2012. Titre original : The Complete Sayings Éditeur original : Omega Publications, Inc., New Lebanon © ACTES SUD, 2016 pour la présente édition ISBN 978-2-330-09421-8 HAZRAT INAYAT KHAN la danse de l’âme gayan, vadan, nirtan choix, présentation et traduction par Alain Sainte-Marie ACTES SUD L’éditeur tient à remercier Sandy Lillydahl d’Omega Publications pour son aimable coopération. Cette traduction est affectueusement dédiée à Claude Sauret, dite Souppilou. PRÉSENTATION L’ISLAM ET LES SOUFIS1 Nous n’essaierons pas de donner ici une description exhaustive de l’islam et du soufisme, mais seulement d’en esquisser quelques aspects fondamentaux afin de permettre au lecteur d’entrer plus aisément dans le texte de Hazrat Inayat Khan. Islam signifie littéralement consentir à la paix de Dieu en se soumettant volontairement à sa volonté. En tant que religion constituée, l’islam est un édifice qui repose sur cinq piliers. L’unité et l’unicité de Dieu (tawhid) est le premier d’entre eux. “Dieu est un. C’est le Dieu éternel. Il n’a point enfanté, et n’a point été enfanté. Il n’a point d’égal”, dit le Coran (CXII, 1-4). Plus précisément, le tawhid est l’attestation qu’“il n’y a pas de divinité, si ce n’est la Divinité” (la ilaha ill-Allah) et que Mohammed est son envoyé. Le deuxième pilier est l’accomplissement de la prière, le troisième l’acquittement de l’impôt légal, le quatrième le pèlerinage à la Maison d’Allah (Kaaba) et le cinquième le jeûne en Ramadan2. Le Coran (ou “récitation”), est considéré par les musulmans comme la Parole de Dieu descendue sur le dernier de ses prophètes, Mohammed. Ainsi, le Coran est-il respecté par les adeptes de l’islam comme le sceau de la révélation qui a commencé avec Abraham et Moïse, s’est développée avec Jésus et s’achève avec Mohammed. Traduction humaine du Coran céleste, le Coran terrestre aurait été révélé au Prophète par le truchement de l’archange Gabriel au cours d’une période s’étalant sur vingt-trois années. Mais ce que le Coran révèle, c’est la parole de Dieu, non Dieu lui-même, lequel reste enclos dans le mystère de sa Déité. Le soufisme est la mystique de l’islam, c’est-à-dire la tradition instaurée par les croyants qui aspirent à pénétrer le mystère de la Déité en vue de la déification de l’âme, forme éminente de la soumission volontaire à la paix de Dieu (islam). Le mot soufisme est dérivé de tasawwouf (se vêtir de laine), étymologie qui rappelle que les premiers ascètes de l’islam portaient des vêtements tissés dans ce matériau (suf). D’aucuns font du mot tasawwouf le synonyme numérique d’une expression arabe signifiant “sagesse divine”. Dès l’origine de l’islam, les soufis se sont organisés, autour d’un maître, en confréries appelées turuq (pluriel de tariqa, la bonne voie conforme aux Prédécesseurs) et ont subi des influences diverses, notamment celles de l’Inde et des Pères du désert. Hasan Basri (né à Médine en 642) est le fondateur allégué du soufisme. Il s’inscrit néanmoins dans la lignée dite traditionniste des Compagnons du Prophète. La première rupture se produira avec Abdu Yazid al-Bistami (IXe siècle), dont la mystique de l’unité et surtout l’amoureuse dévotion qu’il porte à Dieu inquiéteront les théologiens, au prétexte que l’on peut adorer Dieu, mais non l’aimer, car l’amour suppose l’égalité des amants. Or, Dieu, qui reste caché, ne saurait devenir l’égal de l’homme en se rendant accessible par l’amour. De fait, si l’islam est essentiellement soumission à Dieu, le soufisme peut-il prétendre à la réciprocité, voire à l’unité avec la Déité ? Les soufis, à l’instar de nombreux mystiques d’autres religions, furent persécutés et/ou forcés à se rétracter par les autorités religieuses de leur temps. En réaction, certains choisirent de jouer de prudence et se réfugièrent dans un ésotérisme clandestin ou allèrent, comme Bakr al- Shibli, jusqu’à simuler la folie. Dans l’imaginaire occidental et musulman, le procès le plus emblématique jamais intenté à un soufi est celui du poète iranien Hallaj (IXe siècle). Hallaj fut condamné à mort pour s’être identifié publiquement à Dieu et avoir réclamé l’abolition du pèlerinage à La Mecque (quatrième pilier de l’islam), tandis qu’il n’en demandait, en fait, que l’intériorisation. On dénombre dans le soufisme deux tendances complémentaires qui se sont affirmées au fil des siècles. La première (wahdat al-shuhud) insiste sur l’inhabitation de l’unicité de Dieu dans le cœur de l’homme. Selon cette voie de l’immanence, le mystique devient Dieu (unité), non point substantiellement ni, bien sûr, entitativement, mais intentionnellement, Dieu devenant “objet” d’amour et de connaissance. Le représentant le plus illustre de cette tendance n’est autre que le poète Hallaj évoqué plus haut. La seconde tendance (wahdat al-wujud) est une recherche de l’unité substantielle de Dieu, à savoir la Déité, au moyen de la négation de toute connaissance formelle. Ibn ‘Arabî est le plus célèbre représentant de cette démarche qui, en milieu chrétien, pourrait s’apparenter à la théologie négative du Pseudo-Denys l’Aréopagite, telle qu’elle a été comprise et vécue, avec toutes les nuances respectives qui s’imposent, par l’auteur du Nuage de l’inconnaissance, Maître Eckhart et Jean de La Croix. L’apogée de la vie mystique y est atteint dans l’extinction (fana), condition de l’accomplissement de l’unité en la nuée primordiale qui entoure la Déité (voir Exode XXIV, 12-18). Même si ces deux voies ont leurs spécificités théoriques propres, dans la pratique, elles ne sont pas dissociables, et beaucoup de mystiques musulmans sont coutumiers de l’une et de l’autre. L’une des pratiques les plus importantes de l’ascension mystique en soufisme est la remémoration constante de Dieu (dikr), notamment au moyen de la récitation des Noms divins et du tawhid déjà mentionné. Cette pratique n’est pas sans ressemblance, ni différences notables, avec la répétition d’un mantra dans l’hindouisme, la prière de Jésus chez les spirituels de l’Église orthodoxe, le nembutsu de l’amidisme et la “prière courte” de l’auteur catholique du Nuage de l’inconnaissance. Faisant pendant à la remémoration de Dieu, la méditation discursive, ou fikr, se propose d’accomplir la même fin (l’extinction et la réintégration en Dieu) mais par d’autres moyens. UN SOUFISME POUR L’OCCIDENT Traditionnellement, ces pratiques ne sont point solitaires, mais sont exercées sous la conduite d’un maître, le cheikh, ou Pîr en persan3. Pîro- Murshid Sayyed Abu Hashim Madani, le maître spirituel d’Inayat, appartenait à la confrérie Chishti4, du nom de celui qui introduisit le soufisme au pays de Krishna au XIIIe siècle. Cette confrérie se distingue par l’utilisation de la musique et du chant. Né le 5 juillet 1882 à Baroda (l’actuelle Vadodara), dans le Gujarat, d’une famille musulmane de musiciens renommés5, Inayat entame très tôt une carrière musicale qui l’amène à devenir professeur à l’académie de Gayanshala alors qu’il n’est encore qu’un adolescent. À partir de 1903, devenu adulte, il suit l’enseignement de Sayyed Abu Hashim Madani jusqu’au décès de celui-ci en 1907. Entre-temps, un rapport intime (sohbat) s’est développé entre le maître et son disciple, rapport qui conduira Abu Hashim à donner pour mission à Inayat d’“harmoniser l’Orient et l’Occident par ses chants” et d’“apporter la sagesse du soufisme au monde occidental6”. Déjà célébré en Inde comme musicien de vîna (le luth à sept cordes) et comme soufi, uploads/Philosophie/ pir-hazrat-inayat-khan-la-danse-de-l-x27-ame.pdf

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