La Naissance des Dieux et les Origines de l’Agriculture1 Recension par Jonathan

La Naissance des Dieux et les Origines de l’Agriculture1 Recension par Jonathan Slyk La Naissance des Dieux et les Origines de l’Agriculture par Jacques Cauvin, traduit par Trevor Watkins (Cambridge University Press, 40 West 20th St., New York, NY 10011-4211, 2000) Les récentes dernières années nous avons assisté à une série d’horreurs dans le domaine de l’agriculture, tout depuis la viande infectée par les bacilles de E. Coli, les hormones de croissance bovine dans le lait, et des spores de cultures génétiquement modifiées dérivant vers des fermes biologiques, jusqu’à la maladie de la vache folle et la fièvre aphteuse. Le long cortège de désastres insidieux est apparu récemment pour aboutir à des bûchers de carcasses d’animaux brûlantes se consumant à travers champs dans la campagne anglaise - macabre sacrement annonçant l’entrée de notre civilisation dans l’âge de la biotechnologie. Comme dans un mauvais film de science fiction des années 1950 plein des radiations et d’insectes géants, l’histoire de l’agriculture est celle d’une hubris incontrôlée et une expérience qui se déroule terriblement mal. De plus, c’est une histoire qui nous est racontée dans la perspective sacerdotale des élites conquérantes, les sociobiologistes et les psychologues évolutionnistes. L’agriculture, nous assure- t-on, était inévitable, une excroissance adaptative naturelle de notre ancien passé de chasseurs cueilleurs. Elle était préfigurée dans l’évolution cognitive du cerveau humain suivant naturellement un développement évolutif conduisant inexorablement à la connaissance suffisante nécessaire au contrôle de l’environnement. De ce point de vue, la domestication des plantes et des animaux et tout ce qui s’en est suivi était simplement inévitable, tôt ou tard. Il y a cependant quelques archéologues pour penser autrement. Parmi ceux-ci, Jacques Cauvin, professeur émérite au Centre National de la Recherche Scientifique à Paris qui a travaillé sur des fouilles Néolithiques au Proche Orient pendant plus de trente ans. La Naissance des Dieux et les Origines de l’Agriculture est le premier ouvrage de l’auteur à être traduit en anglais. Cauvin décrit le développement des cultures Néolithiques levantines (région de l’est méditerranéen comprenant l’Anatolie du sud-est, la Syrie, le Liban, Israël et la Jordanie) depuis environ 12.000 à 6.300 ans avant JC. Situer ces cultures dans leur contexte propre nécessite une brève explication par Cauvin des conditions environnementales et sociales primitives de l’Epi-Paléolithique dans toute cette région. On sait que le Proche Orient a été habité il y a 90.000 ans par une partie de la première vague d’hommes anatomiquement modernes ayant quitté l’Afrique. Aux alentours de 12.000 ans avant JC, les premiers villages permanents furent établis dans beaucoup de régions du Levant par un groupe culturel appelé les Natufiens. C’était un peuple sédentaire jouissant d’un large éventail économique chasse/cueillette/pêche qui vivait dans des abris ronds semi enterrés. Des céréales sauvages étaient moissonnées par les Natufiens jusqu’au moment où une période de climat sec vint modifier l’environnement levantin. Pendant cette période (environ 9.800 avant JC) ils se tournèrent vers d’autres plantes comme la renouée (plante de la famille des polygonacées dont une espèce cultivée donne précisément le sarrasin ou le blé noir - ndt) et la vesce (plante herbacée de la famille des papilionacées, dont on cultive aujourd’hui une espèce fourragère - ndt), ce qui nous montre que les céréales n’étaient pas encore spécifiquement cultivées de manière délibérée. La phase de transition entre la culture des Natufiens et l’importante ère archéologique suivante - le Néolithique précédent la période de la terre cuite (pre-pottery)- est la période de Khiam (10.000 à 9.500 avant JC), nommée d’après le site palestinien de Khiam où furent trouvés pour la première fois des pointes de projectile aux entailles latérales. Le peuple Khiamien de chasseurs-cueilleurs était aussi diversifié que le précédent. Leur culture était autrement assez ordinaire, sauf sous un aspect. On assiste maintenant à une explosion de l’activité symbolique. Les thèmes de cette explosion se concentrent sur les figures féminines et les taureaux. 1 Traduit par Johannes Robyn. L’art du Paléolithique Supérieur représente également des humains et des taureaux et il semblerait donc qu’il y ait peu de raison de s’intéresser à des exemples tardifs. Les images les plus anciennes, trouvées dans la grotte de Chauvet, sont des peintures vieilles de 35.000 ans. Les statuettes de Venus en argile de Dolni Vestonice, trouvées en Moravie dans la République Tchèque et qu’on suppose être des symboles de fertilité, datent d’environ 28.000 ans. Et bien entendu on trouve aussi des taureaux à Lascaux et Altamira. Ayant connaissance de l’existence antérieure de tels motifs, Cauvin fait remarquer que tout l’art du Paléolithique Supérieur depuis le début jusqu’à la culture Natufienne était essentiellement zoomorphique. Cela signifie que les sujets animaux sont largement supérieurs en nombre aux représentations humaines et sont presque toujours montrés en groupe, comme des troupeaux de gazelles ou d’aurochs. Les figurines de Venus, bien qu’impressionnantes, ont toujours été rares en comparaison. Au centre de la thèse de Cauvin se trouve la révolution des symboles, ou la révolution - à la fois en qualité et en quantité - de la représentation symbolique commençant en 10.000 avant JC. Les statuettes représentant des femmes, au début allusives et schématiques devinrent rapidement plus détaillées et plus nombreuses. Aux environs de 9.500 avant JC, la statuette de femme était devenue une Déesse pleinement épanouie représentant non seulement la fertilité, mais une vraie "personnalité mythique, conçue être suprême et mère universelle ; en d’autres mots une déesse qui couronnait un système religieux que l’on pourrait décrire comme un ‘monothéisme féminin’ en ce sens que tout le reste lui était subordonné." (p.32) Le taureau, maintenant représenté au singulier mais toujours zoomorphique, est apparenté à Déesse féminine et occupe le second rang, mais subordonné, en tant qu’être suprême. Les taureaux étaient assez abondants au Levant mais ne jouaient aucun rôle dans le régime alimentaire des Khiamiens. Dans les sites fouillés partout au Levant la "femme et le taureau" sont représentés dans des peintures et des bas-reliefs, par des sculptures d’argile et sur des colonnes architecturales. On ne trouve pas de représentation d’autres animaux à cette époque. La culture matérielle est entièrement marquée et saturée par ce nouveau symbolisme. Trevor Watkins, le traducteur du livre, a fait remarquer dans un article ultérieur que d’autres objets façonnés découverts récemment montrent qu’il y avait plus à citer que des exemples d’images de femmes et de taureaux. En fait, l’artisanat n’était pas la seule chose à changer ; les pointes de flèche, les outils de pierre, les lames de faucille et les mortiers (pas encore utilisés pour l’agriculture) devenaient plus décoratifs. Après le période de Khiam, la diversité régionale s’accrut et des cultures distinctes naquirent sur différents sites. Trois sites sont principalement évoqués dans les premiers chapitres : il s’agit du Sultanien (Jericho et Netiv Hagdud dans le sud, près de la Mer Morte), de l’aswadien (Aswad, un site plus central près de Damas) et le Mureybetien (Muyrebet dans le Croissant Fertile, près de l’Euphrate). C’est à partir de cette période, environ 9.500 avant JC, que les premières traces d’agriculture apparaissent. La Déesse et le Taureau prolifèrent toujours, particulièrement dans le nord de l’Anatolie au site de Çatalhöyük, où le taureau devint " presque un thème obsessif " et aux environs du huitième millénaire avant JC prit une forme plus humaine. Le Sultanien se distingue par ses établissements plus étendus à Jéricho lorsque la population, qui ne s’accrut pas tellement, devint plus concentrée. Pendant ce temps, les village à Aswad, comme Jericho, conservèrent pour leurs maisons le modèle semi- enterré comme on le faisait à Muyrebet. C’est dans la phase finale de Muyrebet que l’on trouve les premières maisons rectangulaires au monde. Les céréales sauvages ne poussaient que sur les hauteurs dans le Lavant, là où s’étaient précédemment établi les Khiamiens. Les premières plantes cultivées furent découvertes dans les plaines alluviales du couloir levantin dans la vallée du Jourdain et dans d’autres zones basses autour de Damas. On trouve une bonne explication des différences entre le froment sauvage et domestiqué. Le froment, le seigle et l’orge sauvage étaient moissonnés de manière intermittente mais intensive et devait être transporté du haut des collines. Quand les gens commencèrent à préférer certaines espèces, on se mit à les cultiver. Ni la moisson ni la culture ne changèrent significativement la nature de la plante sauvage. Le froment sauvage cultivé reste sauvage pendant très longtemps sans subir aucun changement morphologique. Ce n’est que lors de la " domestication ", quand certaines graines sont isolée et poussent séparément pendant beaucoup de saisons que la plante change suffisamment pour produire une autre espèce. Ceci a dû se passer sur une base expérimentale sans aucune économie fermière pour la guider, nous dit Cauvin. Les archéobotanistes pensent qu’il est difficile de déterminer avec précision le moment où le froment sauvage est devenu du froment domestique. " Nous observons uniquement les conséquences, à un moment où le phénomène, déjà bien établi, a largement modifié l’ensemble de l’information quantifiable que nous pouvons saisir. " (p.60) Alors que la Révolution des Symboles se développe et que la religion de la " néolithisation " se maintient, la Déesse et le Taureau uploads/Societe et culture/ j-cauvin-2000-la-naissance-des-dieux-et-les-origines-de-l-x27-agriculture-recenzija-slyk 1 .pdf

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